Député du Niger, Souley Dioffo est le chef de la délégation des parlementaires nigériens aux travaux de la 2è Assemblée générale du Comité Inter-Parlémentaire de l’espace G5-Sahel, qui s’ouvrent ce matin au Cicb. Dans une interview exclusive qu’il a accordée à la Lettre du Peuple, l’élu plaide pour un sursaut international autour du Mali. Lisez plutôt !
La Lettre du Peuple : Qu’est-ce qu’on peut attendre des travaux de cette 2è Assemblée générale du CIP G5-Sahel ?
Souley Djofo : En tant que parlementaire, nous souhaitons que ces échanges soient des plus fructueux, surtout que l’attente de nos populations est tellement pressente, urgente. Puisque les défis qui nous attendent sont énormes. Sachant aussi le rôle que nous devons jouer en tant que parlementaires, nous devons avoir conscience de la nécessité pour nous d’atteindre des objectifs qui nous sont fixés par nos institutions.
Quel est le rôle du CIP dans l’organisation du G5 Sahel ?
Le CIP-G5 est une suite logique de la création du G5 Sahel, dont le siège est à Nouakchott (Mauritanie) et qui est l’œuvre des dirigeants de nos 5 pays qui composent le G5 Sahel, à savoir le Tchad, le Niger, la Mauritanie, le Mali et le Burkina Faso. Cette initiative a vu le jour à la suite du développement de l’insécurité que nous avons observée de part et d’autre. A cet effet, nos dirigeants avaient pensé à un moment qu’il fallait mutualiser nos efforts, parler d’un même langage, afin que cette question soit traitée le plus efficacement possible. C’est l’objectif que nos dirigeants se sont assigné de faire en sorte que les questions sécuritaires trouvent une réponse appropriée au sein de l’espace G5 Sahel.
Malgré l’existence du G5 Sahel, on constate des attaques par-ci, par-là ; ne faut-il pas envisager d’autres approches ?
Vous savez, les questions sécuritaires sont très compliquées, surtout lorsque vos adversaires ne viennent pas vous toucher frontalement. C’est pourquoi on a souvent dit que cette question est une nébuleuse, parce que tout simplement, les pratiques et stratégies adoptées par les terroristes sont multiples et multiformes. Parfois, ils sont là où vous ne les attendez pas du tout. Donc, il va falloir certainement beaucoup de stratégies et d’efforts de notre côté. Mais aussi et surtout beaucoup de collaboration pour comprendre toutes les stratégies développées par les adversaires. Bien sûr que cela pourrait prendre du temps, mais avec toute l’expérience capitalisée de part et d’autre, nous espérons que dans les plus brefs délais, nous pourrions être en tout cas beaucoup plus efficaces sur le terrain. Nous ne pensons pas finir avec le terrorisme sous peu. Il ne faudrait pas que les gens se fassent d’illusion, mais l’important c’est d’être résilient. Je pense que dans tous nos pays, nous sommes en train de nous préparer à cela. Et l’institution G5 Sahel vient justement pour jouer sa partition pour que dans le cadre de ses attributions, elle puisse être présente partout où elle est sollicitée. Et plus particulièrement, il s’agit pour elle de pouvoir développer ses rapports avec les populations au service desquelles les parlementaires sont placés. Notre proximité avec les parlementaires nous donne quand même un atout pour bien informer et sensibiliser les populations. Mais également notre rôle de pouvoir contrôler l’action gouvernementale fait de nous des acteurs clés de cette lutte contre l’insécurité. Ce sont tant d’actions qui sont attendues des parlementaires. Ce sont des actions toutes nobles, qui devraient, à notre avis, garantir un accompagnement assez certain et efficace aux gouvernants et aux hommes qui sont sur le terrain pour s’occuper de l’opérationnalité de ces actions.
Que pensez-vous de l’approche de la France de transformer la force Barkhane ?
Vous savez, parlant des forces étrangères, particulièrement la force Barkhane, elle fait de son mieux pour appuyer nos forces nationales. Nous, au Niger, nous avons conscience de l’importance et du rôle qu’elle joue. En cela, nous ne pouvons que les encourager et encourager aussi les autres pays à faire un effort pour comprendre que leur présence est d’une très grande utilité. Je pense que nous devons parler d’un même langage. Ces forces étrangères sont utiles parce qu’elles ont des équipements dont nous ne disposons pas. Elles ont aussi des expertises et des expériences que nous n’avons pas. Donc, leur présence à nos côtés, est une garantie et un gage de réussite. Je ne vais pas m’attarder sur cette question. Tout ce que je pourrai dire en tant que parlementaire, c’est que personne ne peut gagner une lutte contre l’insécurité tout seul. En termes clairs, c’est une lutte qui se fait avec toute la communauté internationale. Et de surcroit, nous avons la chance d’avoir des collaborateurs qui veulent nous accompagner et nous appuyer, parce qu’ils ont compris que leurs intérêts sont liés avec les nôtres. Je pense qu’ils n’ont pas d’autres intérêts que de faire en sorte qu’ensemble, nous gagnions cette bataille. C’est l’appel que je pourrais faire à nos collègues parlementaires pour que cette sensibilisation se fasse sur le terrain. Parce que, quelque part, en tant que citoyen lambda, on ne peut avoir une connaissance parfaite de tous les aspects des choses. Il faut être au parfum du commandement, de la gouvernance pour comprendre effectivement le rôle qu’ils jouent. Ce sont aussi des rôles qu’on ne peut pas étaler au public. Il y a un effort à faire pour que chaque pays puisse contenir sa population et lui expliquer cet aspect. Je ne dis pas que tout ce que ces forces françaises font est bon, mais pour l’essentiel, sur les questions de sécurité, faisons beaucoup attention et travaillons dans la cohésion et dans le respect, et surtout dans la compréhension mutuelle avec des collaborateurs qui ont plus d’expertise que nous.
En tant que parlementaire, quel regard portez-vous sur la marche de la transition au Mali ?
Le Mali, c’est une partie du Niger. Tout ce que je souhaite, c’est que le Mali sorte de ces difficultés. Tant que le Mali ne sortira pas de ces difficultés, les Nigériens resteront dans des difficultés. C’est pourquoi j’appelle de tout mon cœur, tout le monde entier de faire un sursaut national autour du Mali. Car, le Mali n’a pas très tôt bénéficié de certains accompagnements. Cela a beaucoup joué au bon fonctionnement de la transition. Mais, nous comptons sur les synergies qui sont en train de se développer en ce moment pour que le pays sorte des chantiers battus. Parce qu’il y va de l’intérêt de la sous-région. Ce n’est pas seulement le Mali qui se sent interpellé aujourd’hui, mais c’est toute la sous-région qui est interpellé. Le Mali est particulièrement un pays essentiel pour la lutte contre le terrorisme.
Un appel ?
C’est de remercier les autorités maliennes pour toutes les commodités qu’elles nous ont offertes depuis notre arrivée en terre malienne. Nous ne nous sommes pas sentis être dans un pays en guerre. C’est la preuve que la Transition se passe très bien et que les Maliens sont conscients du rôle qu’ils ont tous à jouer et que cette conjoncture qui s’est abattue dans leur pays sera gérée avec la plus grande intelligence et courage et surtout dans une certaine compréhension mutuelle. C’est le plus important. C’est cela qui nous permettra, au sortir de cette transition, d’assoir des institutions viables, fortes pour que plus jamais le Mali ne revive cela.
Interview réalisée par Youssouf Diallo
Source: Source: La Lettre du Peuple