Deux jours après le naufrage d’une embarcation de clandestins au large de l’île de Lampedusa, qui a causé la mort de quelque 300 migrants, le drame prend un tour politique. Quelle politique d’immigration l’Union européenne doit-elle adopter pour en finir avec ces tragédies humaines qui se multiplient à ses frontières? Les réponses diffèrent selon les orientations politiques.
Pour le Parti socialiste, «l’Union Européenne doit aujourd’hui s’interroger sur la gestion de ses frontières maritimes qui la transforment parfois en forteresse notamment pour les demandeurs d’asile». «L’Europe ne saurait rester indifférente face aux destins tragiques de ces familles qui ont quitté leurs terres d’origine dans l’espoir d’une vie meilleure et qui l’auront perdue», explique Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire national du PS à l’international dans un communiqué.
Une vision des enjeux migratoires qui a fait bondir Jean-François Copé. «Les bras m’en tombent!», s’est exclamé, selon plusieurs participants, le président de l’UMP à propos du fameux communiqué lors d’une réunion des cadres du parti à Paris. Selon lui, «tant que nous laisserons croire à des millions d’hommes et de femmes à travers le monde que l’Europe est un continent ouvert à tous les flux, que nos frontières sont des passoires, alors il y aura des mafieux pour les exploiter, il y aura des réfugiés prêts à tenter le tout pour le tout pour arriver sur notre sol».
Le patron de l’UMP estime que «réformer Schengen est une priorité absolue de la part des dirigeants
européens». «Certains pays, comme la Grèce, ne se sentent pas concernés parce qu’ils savent que les gens qui arrivent en Grèce n’y resteront pas (…) Nous devons sanctionner et même exclure les pays qui ne contrôlent pas les frontières extérieures de l’Europe, en dépit de leurs engagements», a-t-il assuré. Une proposition qui avait déjà été émise par Nicolas Sarkozy lors de son discours de Villepinte, pendant la campagne présidentielle de 2012. L’ancien chef de l’Etat avait même menacé de suspendre la participation de la France aux accords de libre circulation, si le système n’était pas rapidement réformé.
Samedi, Jean-Marc Ayrault a souhaité une réunion rapide des partenaires européens. «Au-delà des mots, je crois qu’il est important que l’Europe se préoccupe de cette situation particulièrement dramatique», a indiqué le premier ministre en marge d’une visite à Metz, sans préciser quelle solution la France souhaitait apporter à cette crise migratoire.
Après le drame de Lampedusa, l’Italie a demandé que la question de l’immigration soit mise à l’ordre du jour mardi prochain du conseil des ministres européens des Affaires intérieures à Luxembourg. Le premier ministre italien Enrico Letta a d’ores et déjà demandé à l’Union européenne «d’accroître son niveau d’intervention» alors que l’Italie a connu un afflux de 30.000 migrants et réfugiés sur ses côtes depuis le début de l’année.
Comme les autres pays qui se trouvent sous la pression croissante d’un afflux de migrants – la Grèce, Malte ou encore Chypre -, l’Italie déplore le manque de solidarité de ses partenaires européens. Ces pays du sud critiquent la règle en vigueur depuis 2003 dans l’UE, qui laisse au premier pays dans lequel arrive le migrant le soin de gérer sa demande d’asile et son hébergement.
Une politique «égoïste», dénonce le Parti communiste français. De son côté, le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders rappelle «la nécessité d’une politique européenne de l’immigration globale, solidaire et équilibrée. Le contrôle des frontières extérieures ne constitue qu’un des éléments de cette politique», assure-t-il.