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L’Afrique du Sud confrontée aux défis de la relance

RELANCE. Dette publique qui explose, chômage en hausse, inégalités croissantes : le ministre des Finances présente son budget 2021 dans un contexte explosif.

 

Tito Mboweni, le ministre des Finances sud-africain, est sans nul doute l’homme le plus important du pays ces derniers jours. Il a présenté l’un des budgets les plus difficiles de l’histoire de l’Afrique du Sud devant le Parlement. Habituellement, l’ex-gouverneur de la Banque centrale, très populaire sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter où il cumule près d’un million d’abonnés, apporte toujours en ce jour spécial un plant d’aloe vera, réputé capable de survivre en pleine sécheresse… La métaphore est plus qu’utile cette année, dans un contexte où désormais un nombre record de Sud-Africains sont au chômage, 7,2 millions, soit 32,5 % de la population, et les prévisions tablent sur une dette publique qui devrait atteindre 80 % du PIB cette année. Mais c’est bien la vaccination qui est au coeur des priorités de son budget annuel. Le ministre des Finances a annoncé que le pays allouera 568 millions d’euros au programme de vaccination contre le coronavirus. Le gouvernement prévoit de vacciner les deux-tiers de sa population de 59 millions d’habitants, d’ici la fin de l’année. « Cette année, nous sommes confrontés à un exercice d’équilibre exceptionnellement difficile », a t-il reconnu. « D’un côté, il y a une pandémie qui fait rage (…), de l’autre, une économie faible avec un chômage massif ».

Une multitude de mauvaises nouvelles

Car le moins que l’on puisse dire est que l’économie sud-africaine n’est pas épargnée. Le pays a bien sûr été frappé de plein fouet par la pandémie de coronavirus, mais il faut souligner qu’il était déjà fragilisé par plusieurs années de croissance faible. Pays africain officiellement le plus touché par le Covid-19, l’Afrique du Sud a rapidement déclaré « l’état de catastrophe » après l’arrivée du virus, en mars, sur le continent. Et le gouvernement a mis en place un des confinements les plus stricts au monde.

Mais, en tentant de se protéger de l’épidémie, le pays s’est également fermé aux touristes et aux capitaux étrangers. En Afrique, où l’arrêt brutal de l’économie mondiale lié à la crise du Covid-19 a frappé de plein fouet les revenus des pays émergents, les économistes des Nations unies annonçaient en 2020 une chute des investissements directs étrangers de 25 à 40 %. Un retrait significatif pour l’Afrique du Sud, qui tire 8 % de son PIB des exportations de minerais et de métaux.

Sur le plan social, « la pauvreté est en hausse et les inégalités s’accroissent », a déploré mi-février le président Cyril Ramaphosa, dans son discours annuel à la nation. « Il n’y a pas d’argent et nous devons trouver un équilibre entre soutenir les plus pauvres et soutenir la croissance », explique à l’AFP Daniel Meyer, qui enseigne le commerce à l’université de Johannesburg.

Le gouvernement est également confronté à des besoins croissants de la part d’entreprises publiques en difficulté, comme la compagnie d’électricité Eskom. Les efforts pour réduire la masse salariale de la fonction publique se poursuivent, a également assuré Tito Mboweni.

 

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Un chômage record

Conséquence : la tension est montée d’un cran dans les rues. Dans la matinée, plusieurs manifestations contre le chômage étaient en cours dans le pays, à l’appel des syndicats. Pour de nombreux experts, le coût réel de la pandémie de Covid-19 est à lire dans les chiffres du chômage record de l’Afrique du Sud. Au Cap, la police a tiré des gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants qui marchaient vers le Parlement. À l’hôpital de Soweto, une centaine de personnes en chemise rouge ont dansé et entonné des chants de lutte contre l’apartheid, en solidarité avec le personnel médical sous-payé et épuisé par la crise sanitaire. L’Agence gouvernementale des statistiques a fourni également une notion plus élargie du chômage, différant du taux officiel, lequel ne tient compte que du nombre de personnes cherchant activement du travail. Ainsi, explique-t-elle, si l’on prend en compte les personnes sans emploi « découragées », qui ont abandonné toute recherche, il faut ajouter au chiffre de sans-emploi du quatrième trimestre 235 000 personnes, soit une augmentation de 8,7 % par rapport au troisième. Mais, si l’on y ajoute les sans-emploi qui ont abandonné leurs recherches « pour d’autres raisons que le découragement », le nombre de sans-emploi total a baissé au quatrième trimestre de 1,1 million, soit une réduction de 7,4 % par rapport au troisième. Si l’on intègre le nombre de sans-emploi ayant renoncé à leurs recherches (toutes catégories confondues) au nombre de sans-emploi du quatrième trimestre – pris en considération pour le taux officiel –, on arrive à un taux de chômage de 42,6 % pour le quatrième trimestre, en baisse de 0,5 point de pourcentage, par rapport au troisième.

Réponse du ministre des Finances : une enveloppe supplémentaire de près de 320 millions d’euros a été annoncée, dans le cadre d’un plan de 5,6 milliards pour stimuler l’emploi des jeunes. « Les dégâts causés par le Covid-19 sont profonds et nous partageons la douleur collective de nombreux Sud-Africains qui ont perdu leur emploi ».

L’après vaccination très attendue

« Nos finances publiques sont dangereusement sous pression », a mis en garde Tito Mboweni. Mais le gouvernement espère qu’une vaccination de masse contribuera à stimuler la croissance à 3,3 % cette année, après une forte contraction de 7,2 % en 2020. Les besoins d’emprunts resteront toutefois « bien supérieurs » à 28,2 milliards d’euros par an, au moins jusqu’en 2024, a-t-il averti.

D’importantes hausses des taxes ont également été annoncées pour combler « le plus grand déficit fiscal jamais enregistré », notamment sur l’alcool, le carburant et le tabac. Une mesure qui va « augmenter le coût de la vie pour tous les Sud-Africains », a réagi le premier parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), dans un communiqué. « Comme tous ceux qui ont marché sur cette terre avant nous, nous nous relèverons », avait tenté de rassurer le président Cyril Ramaphosa, choisissant pour sa part la comparaison avec le fynbos, une autre plante locale, symbole de résilience pour sa capacité à se régénérer après avoir brûlé.

 

Source: lepoint

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