Qu’est-ce qui peut bien se passer dans la tête des femmes en ces moments de fête ? Nous avons fait un tour dans quelques salons de coiffure. Les femmes avouent tenir à leur coiffure plus que tout.
A une semaine de la fête du trente et un décembre communément appelée fête de saint-sylvestre, les salons de coiffure ne désemplissent pas à Bamako. Les femmes prennent d’assaut les instituts de beauté dès les premières heures de la journée. Elles veulent être congratulées la nuit du réveillon. Pourquoi spécialement cette nuit-là ? Qu’a-t-elle de spéciale cette nuit ? Mah COULIBALY, cadre à la SOMAGEP écarquille des yeux et nous balance tout de go « mon frère, le 31 est une nuit unique, vous n’êtes pas malien n’est-ce pas ! Je vous comprends et vous ne pouvez pas comprendre : nos hommes peuvent nous tromper tous les soirs sauf la nuit du 31 décembre, cette nuit là appartient aux officielles, aux élues, aux premières. L’homme malien peut tout se permettre sauf de dribbler sa femme le 31 décembre donc nous sommes obligées de préparer cette nuit. Moi, j’ai acheté trois paquets de mèche brésilienne à 75 000 F CFA l’unité pour me faire toute belle, toute mimi, toute jolie afin que le 31, mon homme soit fier de moi ».
Notre interlocutrice précise « vous savez, une femme c’est d’abord sa coiffure, quand elle est bien faite, le reste n’a pas d’importance ». Dans ce salon 1,2,3 sis à Hamdallaye, la maîtresse des lieux gâte ses clientes avec de la boisson, de la musique et une bonne ambiance. Chaque cliente fait ses manies pour ne pas passer inaperçue. Barbara, une Sikassoise étudiante à Bamako lit un magazine de mode et feint de s’intéresser à nous. Approchée, elle dit « être venue pour une séance de shampoing assortie d’une pose RIHANNA car le 31 décembre, mon homme doit se rendre compte que je ne suis pas n’importe qui. Je vais lui en faire voir de toutes couleurs avec une coiffure attirante. Nous avons déjà réservé pour un dîner dans un hôtel de la place et je veux y être fortement remarquée. Quoi, monsieur une femme mal coiffée est une femme banale et à banaliser ». Humm… On en apprend avec la gent féminine.
A Missira, une sénégalaise trouvée dans un salon à ciel ouvert ne cache pas sa joie de refuser du monde. Mame Khady MBAYE parle de « moments exceptionnels avec les fêtes de fin d’année. La malienne aime se faire belle. Elle dépense sans compter pour avoir une belle tête. Défrisage, nattes, chignon haut ou bas, tiré, greffage, mireille, les clientes déboursent sans compter. Vous les voyez, elles vont au marché faire le « diaby » en inscrivant le nom de leur homme sur le dos de la main. Moi, je leur dis la vérité, il leur faut des coiffures simples et jolies et non les mèches qui prennent du temps ». A la question de savoir combien coûte une coiffure ? Madame MBAYE répond « tout dépend du modèle choisi, cela peut aller de 5000 francs à 20 000 francs. Quand nous leur donnons les mèches, la facture est plus salée ». Tatou avec ses yeux de paon rectifie « la facture ne peut pas être salée d’autant que l’argent vient des hommes. Ils aiment se vanter en montrant leurs conquêtes alors qu’ils payent. Moi, je peux me passer de toutes les fêtes sauf du 31 décembre, là c’est du ton pied mon pied, collé, serré, cimenté. Les petites copines perdent tout le 31. Mon homme est obligé de passer à la caisse et de me faire plaisir. Nous nous coiffons bien car la nuit du 31 est immortalisée par des photos qui seront accrochées au mur du salon ».
A Badalabougou, le salon Nawari Tresses affiche le plein. C’est le temple des « sourakha » les filles blanches de race arabe avec des cheveux longs et noirs. Aïchétou Mint Hammoudy, nouvellement mariée, explique être venue pour « une coupe qui mettra en valeur ses yeux. Mon mari aime les coiffures de classe et je suis sûre de casser la baraque le 31 décembre avec une robe mauve en bustier. Malheureusement, je m’inquiète au fil des heures car le rang est long or je veux vite en finir». Un homme du nom de DIABATE Madou assis dans un coin du salon dévisage les femmes avec un œil inquisiteur. Il révèle « être venu accompagner sa douce moitié. L’attente est longue, c’est vrai mais pour sa beauté je resterai ici tant qu’elle n’aura pas été bien coiffée. La coiffure n’est pas une préoccupation pour les hommes et paradoxalement tout homme aime être aux côtés d’une femme bien coiffée. Mon ami, une femme mal coiffée est une poule sans crête, moi je veille particulièrement sur la coiffure de ma petite amie, la coiffure est sa carte d’identité visuelle, elle reflète sa personnalité ».
Se coiffer est donc un chemin de croix, nous ne le savions pas pire les hommes que nous sommes avons l’art de détruire une œuvre réalisée après de longues heures d’attente difficile. Merci mesdames, nous ne savions pas que vous souffrez autant pour nous plaire. Désormais, au retour du salon, chers messieurs, dites à madame « a tié gnéna » autrement dit c’est joli, juste pour apprécier la coiffure et l’encourager à mieux faire.