Alors que le projet, déjà contesté, de réforme pénale voulu par Christiane Taubira est entre les mains du Conseil d’État, les policiers sont furieux contre ce qu’ils appellent un «nouvel exemple de laxisme judiciaire».
À la surprise générale, un juge des libertés et de la détention (JLD) du tribunal de grande instance de Toulon a remis en liberté le 1er octobre dernier un militaire de 27 ans mis en examen après avoir violé une mineure, entre le 1er juillet 2009 et le 31 août 2012. Ce pédophile endurci, qui a agi en usant de son «autorité sur la victime», en l’occurrence sa nièce, aujourd’hui âgée de 15 ans, avait par ailleurs été surpris en train de détenir et consulter entre janvier et mai dernier des images pornographiques mettant en scène un mineur sur Internet. Inconnu des services, il était jusqu’alors considéré comme un «bon père de famille» par son entourage.
Libre, il devra pointer une fois par semaine au commissariat
Pour justifier son ordonnance de «refus de placement en détention provisoire», le magistrat a considéré que le pervers «s’est expliqué sur l’ensemble des faits qui lui sont reprochés» (sic), qu’aucun élément «ne permet de penser qu’il aurait menti lors de ses auditions» (re-sic), et que rien ne permet de dire «que d’autres victimes pourraient être concernées». Dans sa clémence, que contestent les policiers, le magistrat estime que le pervers – qui a reconnu cinq viols sur la fillette – présente de «sérieuses garanties de représentation».
Le contrôle judiciaire du pédophile, depuis que ce dernier a retrouvé la liberté de ses mouvements, prévoit qu’il se présente juste «une fois par semaine» au commissariat, ne quitte pas le «territoire national métropolitain», s’abstienne de croiser la route de sa petite victime et se soumette à «des mesures de traitements ou de soins (suivi psychiatrique)».
L’effet d’une bombe
«Cette affaire, qui vise des faits d’une extrême gravité, est un scandale et risque d’avoir l’effet d’une bombe, s’insurge Patrice Ribeiro, secrétaire général du syndicat Synergie-officiers. Elle prouve une fois encore qu’il existe un gouffre entre le travail de la police, qui travaille pendant des mois pour confondre un prédateur, et une réponse judiciaire qui démotive les fonctionnaires engagés sur le terrain.»
Pour ce syndicaliste, «le discours de Mme Taubira, qui fait quasiment de la prison la cause de la délinquance, a déjà été reçu cinq sur cinq par les voyous. Et son projet de loi, même un peu retardé, ne fera qu’amplifier les difficultés pour les forces de l’ordre sur le terrain».
Face au feu qui couve dans les rangs des forces de l’ordre, Manuel Valls avait reçu le 16 septembre dernier Unité SGP Police-FO, premier syndicat de gradés et de gardiens, le Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN, majoritaire), le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI, majoritaire chez les officiers de police) et l’Unsa police, troisième force chez les gardiens de la paix. Alliance, deuxième syndicat chez les gradés et les gardiens, a quant à lui demandé le retrait du texte.