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La nouvelle diplomatie souverainiste de Donald Trump

Donald Trump aura une diplomatie carrée, sans états d’âme. Mais elle aura au moins, pour les Européens, l’avantage d’être claire. L’article du Figaro signé Renaud Girard qui nous a aimablement autorisés à reprendre son texte, éclaire le lecteur sur les virages de la diplomatie américaine dans les prochains mois: pas de bellicisme, peu de multilatéralisme, beaucoup de diplomatie transactionnelle.

Il n’est pas besoin de se rappeler le rôle mondial de présidents comme Wilson, Roosevelt, Truman, Nixon ou Reagan, pour savoir que le président des Etats-Unis fait la politique étrangère de son pays. Il ne la fait pas tout seul car il a besoin du Congrès pour la financer et d’une majorité des deux tiers au Sénat pour ratifier les traités négociés par lui. Mais c’est lui qui impulse la diplomatie, appuyé sur l’expertise de son Conseil national de Sécurité et du Département d’Etat.

La politique étrangère que Donald Trump mènera à partir du 20 janvier 2025 sera marquée par trois caractéristiques majeures : pas de bellicisme, peu de multilatéralisme, beaucoup de diplomatie transactionnelle.

Trump belliciste? Pas certain!

Trump n’a jamais aimé la guerre. Il n’a jamais partagé l’idéologie des néoconservateurs, qui préfèrent à la paix l’idée qu’ils se font de la démocratie et de la justice. Il n’a jamais été un admirateur de George W Bush, ce président Républicain qui, en 2003, décida d’envahir l’Irak avec le projet proclamé d’y imposer la démocratie par la force, de démocratiser ensuite l’ensemble du Moyen-Orient, pour obtenir enfin une paix générale du monde arabo-musulman avec Israël.

S’il avait été aux affaires en 2011, jamais il n’aurait emboîté le pas à la France et à la Grande-Bretagne pour faire la guerre en Libye et y détrôner Kadhafi. Obama l’a fait, avant de reconnaître, dans ses Mémoires, qu’il avait commis là une faute. Cette intervention occidentale a en effet mis un chaos en Libye, puis dans tout le Sahel, qui n’est toujours pas résolu.

En juin 2019, après qu’un drone de surveillance américain eut été abattu par les Iraniens en survolant le détroit d’Ormuz (le débouché du Golfe Persique), les généraux du Pentagone avait préparé une riposte militaire. Peu avant l’heure H, Trump leur demanda combien de morts elle risquait de faire en Iran. « On ne peut pas savoir, Monsieur le Président, mais probablement entre cent et deux cents ». Estimant la riposte disproportionnée parce que l’incident du drone n’avait tué aucun Américain, Trump l’annula à la dernière minute.

Trump, adepte du face à face
L’idée de faire la guerre à l’Iran pour l’obliger à changer de régime est totalement contraire à la psychologie de Trump. En revanche, lorsque le chef de la brigade Al Qods des Gardiens de la Révolution iraniens entreprit d’instrumentaliser les milices chiites irakiennes contre l’ambassade des Etats-Unis à Bagdad, le président Trump n’hésita pas. Au voyage subséquent du général Qassem Soleimani à Bagdad, le 3 janvier 2020, sa voiture fut réduite en chaleur et poussière par un missile américain tiré par un drone MQ-9 Reaper. A Téhéran, le message fut reçu cinq sur cinq. Ne pas être belliciste ne signifie pas qu’on soit faible ou intimidable.

Le multilatéralisme dans les relations internationales n’a jamais convenu au caractère de Trump. Il s’en méfie. Cet ancien roi de l’immobilier new-yorkais préfère les deals à deux ou trois partenaires maximum. Il n’a pas la patience d’écouter d’innombrables discours ; il se plie difficilement aux tours de table où l’on fait semblant que tous les joueurs sont égaux. Sans le moindre gain évident pour l’Amérique, Trump l’a retirée des accords de Paris sur le climat, de Vienne sur le nucléaire iranien, d’Auckland sur le libre-échange transpacifique, qui avaient été négociés par Obama.

Fondée sur le principe America First, sa diplomatie passera donc très peu par l’Onu, par l’OMC (Organisation mondiale du Commerce) et par les autres organisations internationales. S’il se rend à l’OTAN, ce sera pour y donner ses instructions, pour obliger ses membres européens à accroître leurs dépenses militaires, sous peine de perdre la protection américaine.

Elon Musk incontournable
Là où Trump se sentira le plus à l’aise, c’est dans la diplomatie transactionnelle. Il s’est dit prêt à résoudre très rapidement le conflit en Ukraine. Sa première démarche, en termes de relations internationales, après son scrutin victorieux, fut d’appeler le président ukrainien Zélensky, pour le rassurer, pour lui dire qu’il ne le laisserait pas tomber. Associé à l’appel, il y avait Elon Musk, l’homme qui sauva, en février 2022, les communications des Ukrainiens agressés par la Russie, en mettant gratuitement à leur disposition Starlink, ce fournisseur d’accès à internet par satellite de sa société SpaceX, qui s’appuie sur une constellation de milliers de satellites de télécommunications placés sur une orbite terrestre basse.

Trump est convaincu d’être capable de forcer les présidents Zélensky et Poutine à aboutir à un accord de cessez-le-feu, sinon à la paix. Il est vrai que les Russes sont aussi las de la guerre que les Ukrainiens et que Poutine vient de déclarer, au forum de Valdaï, qu’il était ouvert au dialogue avec l’Occident.

Au sein du parti démocrate, certains rêvaient d’un renversement de Poutine, et d’une arrivée de la démocratie en Russie. Rien de tel chez Trump, adepte de la Realpolitik, et opposé à l’ingérence dans les affaires intérieures des autres pays que le sien. Est-ce à dire qu’il cédera tout au Kremlin ? Rien n’est moins sûr. Pendant son premier mandat, les sanctions contre Moscou ne cessèrent de s’alourdir.

Avec l’Iran, beaucoup d’observateurs pensent que Trump va durcir la posture américaine. Pour ma part, je parie qu’il va tenter d’ouvrir un « grand bargain », une négociation générale sur tous les sujets, avec les ayatollahs de Téhéran. « Vous pouvez redevenir la grande puissance commerciale du Moyen-Orient, mais vous renoncez à votre programme nucléaire ainsi qu’à l’instrumentalisation militaire de l’axe chiite », proposera le président Trump aux hiérarques iraniens.

Auront-ils l’intelligence de saisir l’offre ? Là est toute la question. En septembre 2019, Trump avait bien accueilli la médiation de Macron en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies : il avait accepté une rencontre avec le président iranien. Hélas, un absurde veto de dernière minute prononcé par le Guide de la Révolution iranien avait empêché un tel sommet.

Au Proche-Orient, Trump n’hésitera pas à imposer ses vues au gouvernement israélien pour mettre fin à la guerre. Il ne se laissera pas mener en bateau par Netanyahou comme le furent les pauvres Biden et Blinken. En revanche, il aura à cœur d’étendre les Accords d’Abraham à l’Arabie saoudite.

En matière commerciale, il ne fera aucun cadeau, ni à la Chine, ni même à l’Union européenne, sans égard pour l’appartenance à l’Otan de la grande majorité de ses membres. Bruxelles doit donc oublier ses jérémiades et se préparer à construire des rapports de force avec Trump. Ce sont les seuls qu’il entende.

Source: https://mondafrique.com/

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