C’est en donnant aux enfants la possibilité d’aller et surtout de rester à l’école qu’on les préservera d’un avenir fait de précarité ou de chômage
La pratique persiste malheureusement malgré les efforts déployés pour sa réduction. Ce qui rend malheureusement indispensable la célébration d’une Journée internationale dédiée au travail des enfants. Le thème retenu pour l’édition 2015 est on ne peut plus explicite : « Non au travail des enfants, oui à une éducation de qualité ». Lancée en 2002 par l’Organisation internationale du travail (OIT), la Journée qui a été célébrée chez nous vendredi dernier donne l’occasion d’attirer l’attention sur l’étendue mondiale du phénomène ainsi que sur l’ampleur des actions et les efforts nécessaires à son élimination. Il faut en effet informer et sensibiliser toutes les consciences publiques sur les contraintes, les risques et les dangers liés au travail des enfants. Ces différents périls se manifestent aujourd’hui sous une forme exacerbée par un contexte marqué par la recrudescence de la pauvreté et des inégalités sociales. Ils ne peuvent être réduits que par un effort accru en faveur de la scolarisation des enfants.
Le moment est bien choisi pour insister cette corrélation entre éducation et travail des enfants. En effet, en cette année 2015, la communauté internationale examinera les raisons pour lesquelles les objectifs de développement en matière d’éducation n’ont pas été atteints et fixera de nouveaux objectifs et stratégies. L’OIT saisit donc l’opportunité offerte par cette évaluation pour plaider en faveur d’une éducation de qualité, gratuite et obligatoire pour tous les enfants, au moins jusqu’à l’âge minimum d’admission à l’emploi et des mesures pour atteindre ceux qui sont actuellement en situation de travail des enfants. L’OIT recommande également de nouveaux efforts pour s’assurer que les politiques nationales sur le travail des enfants et l’éducation soient cohérentes et efficaces.
DE QUALITÉ, OBLIGATOIRE ET GRATUITE. Pour le coordinateur national du projet BIT-Ipec, Hamidou Cissé, il est reconnu que de nombreux enfants en situation de travail ne sont pas scolarisés. D’autres combinent école et travail, mais souvent au détriment de leur éducation. Une fois devenus adultes, faute d’éducation et d’acquisition de compétences adéquates, les enfants qui ont été astreints au travail des enfants sont plus susceptibles d’être destinés à des emplois précaires et mal rémunérés, ou de se trouver au chômage. Leurs propres enfants seront à leur tour plus susceptibles de tomber dans le travail des enfants. Mettre un terme à ce cercle vicieux de désavantage social est un défi mondial dans lequel l’éducation a un rôle clé à jouer.
Hamidou Cissé a plaidé pour une plus grande coordination des politiques et stratégie nationales dans le domaine du travail des enfants et celui de l’éducation. Une synergie d’action entre le ministère chargé du Travail et celui en charge de l’Education est nécessaire pour efficacement lutter contre le phénomène. L’intervenant a fait remarquer que des progrès ont été réalisés et que d’autres sont encore possibles. En effet, le nombre d’enfants en situation de travail des enfants a baissé au cours des 10 dernières années, alors que le nombre de ceux qui fréquentent l’école a augmenté. Afin d’accélérer sensiblement les tendances positives, il serait urgent d’examiner les progrès qui ont déjà été réalisés et d’en tirer les leçons.
Parmi les mesures les plus importantes à adopter, le coordinateur national du projet BIT-IPEC propose d’offrir une éducation de qualité, gratuite et obligatoire. Il faut aussi garantir que tous les enfants, filles et garçons aient accès à des conditions d’apprentissage sûres et de qualité. Il est question d’offrir aux enfants plus âgés qui n’ont jusqu’à présent pas reçu d’éducation formelle, la possibilité de suivre des programmes de formation professionnelle ciblés qui offriraient également des possibilités d’acquérir une éducation de base. Sékou Oumar Diarra, spécialiste de la protection de l’enfant à l’UNICEf, dira qu’il n’y a aucun avantage à inscrire un enfant à l’école si la qualité de l’éducation est mauvaise.
L’ÉCOLE, LA VRAIE PLACE D’UN ENFANT. Le directeur national de la Pédagogie, le Dr. Bonaventure Maïga a, quant à lui, expliqué que l’école apparaît comme le palliatif à la déperdition des enfants. L’Etat doit donc se donner des politiques cohérentes en vue d’éliminer totalement le travail des enfants. Ces politiques doivent être liées à des dispositions qui prévoient une éducation pour tous et à plein temps pour chaque enfant. Il a assuré que le département de l’Education a toujours œuvré pour une éducation de qualité qui cadre bien avec les objectifs fixés par le gouvernement dans le cadre du programme intérimaire de l’éducation et la préparation du Prodec II.
Le ministre du Travail et de la Réforme de l’Etat, chargée des Relation avec les Institutions, a souligné qu’en ratifiant les principaux instruments internationaux concernant les droits de l’enfant, notre pays s’est engagé à prendre des mesures pour assurer l’interdiction et l’élimination du travail des enfants, surtout sous ses pires formes. Cet engagement s’est concrétisé par la mise en place de plusieurs programmes et projets de lutte contre le phénomène. En outre, d’importantes mesures institutionnelles ont été également prises pour soutenir les actions entreprises, au nombre desquelles la création d’une Cellule nationale de lutte contre le travail des enfants. Le ministre a aussi mis l’accent sur l’élaboration par notre pays du Plan d’action national pour l’élimination du travail des enfants couvrant la période 2011-2020.
Parlant du thème de la journée, Mme Diarra Raki Talla réitérera la conviction qu’une éducation de qualité gratuite et obligatoire pour tous les enfants au moins jusqu’à l’âge minimum d’admission à l’emploi et des mesures pour atteindre ceux qui sont actuellement en situation de travail sont des outils clés dans l’élimination du travail des enfants. Car la fréquentation scolaire retire les enfants en partie au moins du travail forcé et jette les bases de l’acquisition de compétences professionnelles nécessaires sur le marché du travail.
Selon le ministre, nous devons tous comprendre que la place d’un enfant est à l’école, et non sur un site d’orpaillage ou dans les champs où il manipulerait des outils dangereux ou des produits chimiques toxiques. Brandissant symboliquement un carton rouge, Mme Diarra Raki Talla a invité les uns et les autres à dire « non » au travail des enfants, surtout sous ses pires formes.
M. A. TRAORÉ
source : L Essor