Suivez-nous sur Facebook, Telegram, WhatsApp pour ne rien rater de l'actualité malienne

Interview du Secrétaire Général de l’ADEMA-PASJ Yaya Sangaré dit tout :

-Situation des leaders d’opinion incarcérés

-La nouvelle Charte des Partis politiques

-Les élections : candidature au sein de l’Adema et le deal avec les militaires.

Yaya Sangaré, Secrétaire Général de l’ADEMA-PASJ et l’ex Ministre de la Communication a accordé un entretien à votre journal. Sa version sur sa  détention avec les 10 autres leaders politiques, la situation des autres leaders politiques incarcérés, l’avenir des formations politiques avec la nouvelle Charte des Partis politiques, la reconstitution de la grande famille ADEMA, les hypothèses sur l’élection présidentielle prochaine, sont entre autres sujets autour desquels cette grande interview a été réalisée. 

 

Le Sursaut : Monsieur le Secrétaire général, depuis votre libération conditionnée avec 10 autres leaders de votre collectif, nous constatons un certain mutisme dans vos actions politiques, notamment l’exigence de retour à l’ordre constitutionnel. Qu’est-ce qui explique cet état de fait ?

 

Yaya Sangaré : En effet, nous nous sommes retrouvés, un 20 juin 2024, avec 10 autres camarades leaders politiques en prison, pour avoir exercé notre droit constitutionnel : nous réunir dans un domicile privé. Et nous y avons passé 168 jours, un peu moins de six mois, avant d’être libérés, grâce aux efforts conjugués de tout le monde. Sans jugement. Chacun de vous s’est investi, d’une manière ou d’une autre, pour notre libération. À tous et à chacun, j’adresse mes sincères remerciements et ma gratitude. Nous avons été très touchés par la solidarité, le grand engagement, la mobilisation individuelle, les démarches auprès des autorités administratives, judiciaires et religieuses, la collecte de fonds pour les avocats et nos familles, les aides matérielles pour améliorer nos conditions de détention, les messages, et surtout les visites dans les prisons… La prison, la privation de liberté est une épreuve dure et on ne saurait la souhaiter à personne. Je voudrais le préciser ici et maintenant : je ne reconnais pas, comme mes autres camarades, les accusations d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat et de trouble à l’ordre public portées contre moi, et je les rejette catégoriquement. Je voudrais, à travers votre micro, rassurer le peuple malien que les 11 leaders politiques injustement détenus de juin à décembre 2024 sont tous profondément républicains et démocrates, que leur combat a toujours été et restera dans le strict respect des textes en vigueur dans notre pays, et en privilégiant toujours le dialogue et la concertation, au bénéfice des citoyens maliens. Ils sont tous fiers d’avoir traversé cette épreuve, cette privation prolongée de liberté, sans que leurs convictions politiques ne soient nullement ébranlées. Le retour à l’ordre constitutionnel est une exigence de tous les démocrates et républicains. Aucun signataire de la déclaration commune du 31 mars 2024 n’a changé de position et d’exigence sur cette question. C’est une question d’honneur, de morale et d’éthique politiques, surtout de convictions politiques. Le silence apparent des partis politiques sur le sujet, si l’on peut le qualifier ainsi, n’est pas à confondre avec l’abandon de leurs devoirs ou de leurs responsabilités vis-à-vis des défis du pays. Leur calme face à la bourrasque que l’on constate contre eux n’est pas non plus synonyme de l’acceptation de l’omerta en cours. Encore moins leur manque d’ardeur ne saurait être une quelconque faiblesse à l’égard de « quelques calculateurs » qui ont pourtant tiré leurs marrons du feu en se servant des partis politiques. Ce sont les mêmes qui, en retour, sont devenus les pourfendeurs zélés de la politique. S’il y a silence, il se caractérise par l’absence de débats publics qui fragilise le lien de confiance entre les autorités en place et la classe politique, d’une part et, d’autre part, entre les gouvernants et les gouvernés. Mais rien ne doit justifier le mutisme des partis politiques sur la conduite des affaires publiques, alors qu’ils sont censés incarner les aspirations profondes des Maliens. Leur silence est un danger pour la démocratie. Il est temps de le briser et de construire ensemble un avenir meilleur pour le pays.

 

D’autres leaders d’opinion restent toujours derrière les barreaux pour exactement les mêmes motifs, est-ce que la classe politique a entrepris des démarches auprès des autorités pour leur élargissement sans condition ?

 

SG Sangaré : Beaucoup de démarches ont été entreprises et d’autres sont en cours, publiques comme discrètes, mais toutes efficaces, les unes comme les autres, car les informations qui nous parviennent sont rassurantes. Des autorités administratives, des leaders religieux et de la société civile, des personnalités indépendantes sont impliqués dans le dossier afin d’obtenir, dans les meilleurs délais, l’élargissement de ces acteurs majeurs détenus pour leurs opinions notamment Mohamed Youssouf Bathily, alias Ras Bath, avec qui j’ai partagé près de six (6) mois, le même cadre de vie à la Maison d’Arrêt et de Correction de Koulikoro, Mme Sidibé Rokia Doumbia dite ‘’Rose Vie chère’’, Clément Dembélé, Issa Kaou Ndjim, les deux imams-prêcheurs Sékou Sidibé (mon petit cousin) et Bandiougou Traoré, et de favoriser l’apaisement social et la réconciliation nationale. J’ai espoir que ces médiations ne seront pas vaines et obtiendront un écho favorable de la part des décideurs actuels. J’exhorte les autorités de la Transition à libérer tous ces autres détenus d’opinion, mais aussi à faciliter le retour au pays des exilés politiques afin d’assurer la paix, la réconciliation nationale, la cohésion sociale et la stabilité du pays. Force doit rester à la loi, mais respect et considération doivent être accordés à la médiation.

 

Récemment vous étiez en conclave autour d’un document consensuel de la Charte des Partis. Peut-on savoir les grandes orientations de votre rencontre ?

 

SG Sangaré : En effet, des partis politiques se sont retrouvés, avec pour objectif, de reprendre la parole, d’être une force de réflexion et de propositions et surtout d’aider à trouver des solutions aux préoccupations des Maliens, singulièrement la problématique de la Charte des partis politiques. Il s’agissait donc de réfléchir sur le système multipartite, ses forces, ses faiblesses, et la manière dont il pourrait évoluer pour mieux servir les intérêts du Mali et de ses citoyens. Avoir une lecture convergente, le droit pour les partis de se former et d’exercer librement leurs activités est un principe du multipartisme intégral inscrit dans la Constitution ; repenser la manière dont les partis politiques doivent se structurer et interagir ; contrôler le pullulement des partis politiques… Bref, il s’agissait de proposer des pistes de restructuration et de rationalisation de l’univers des partis politiques. Cependant, cette rationalisation doit se faire de manière responsable, avec des mesures incitatives et non des contraintes, l’objectif demeurant de respecter la diversité des idées, des idéologies, des valeurs voire des approches. Il est encourageant de constater que, malgré leurs divergences de vue, les formations politiques ont su trouver un terrain d’entente autour des questions essentielles, notamment la réforme de la Charte qui les régit. En dépit des tensions et des différences idéologiques, le consensus a prévalu sur les intérêts personnels, partisans. Un signe de maturité et de responsabilité à saluer et à encourager. Mais au-delà de ce dialogue, il reste encore beaucoup à faire. La révision de la Charte des partis politiques ne doit pas se faire comme une simple formalité administrative. Elle doit s’inscrire dans un processus participatif qui doit nécessairement aboutir à la moralisation, à la réglementation stricte des conditions de création de partis politiques et à la réduction de leur nombre par des mesures incitatives et non coercitives. Un véritable assainissement du secteur afin d’avoir un paysage politique plus cohérent, plus responsable et plus efficace. Elle doit amener les partis politiques à devenir des forces de proposition et de gouvernance, et non des instruments de division et de confrontations stériles. J’ai noté quelques propositions très intéressantes comme la lutte contre la transhumance politique ou le nomadisme politique en cours de mandat, avec la perte d’échéance du mandat électoral, l’impossibilité de se représenter aux prochaines échéances électorales et de créer un parti politique pendant au moins un an. Il y a aussi la clarification et le renforcement du statut du chef de file de l’opposition, la suspension des partis politiques pendant une durée limitée ou le retrait définitif du récépissé pour manque de résultats à certaines élections de proximité, l’encouragement au regroupement des partis politiques par idéologies, etc.

 

Que pensez-vous des propos de ceux qui affirment qu’il faut supprimer l’aide publique aux Partis politiques ?

 

SG Sangaré : Je voudrais commencer par corriger ce lapsus : l’appui accordé aux partis politiques n’est ni une aide ni une subvention de l’Etat. C’est un financement inscrit dans le budget d’Etat et prélevé sur les recettes fiscales. À ce titre, il s’impose aux gouvernants ; donc refuser de le verser aux partis politiques s’assimile à un détournement de fonds publics. Ce qui doit être vite corrigé, au risque de rattraper tôt ou tard les responsables. Je crois avec force conviction que le financement public des partis politiques doit être considéré comme un acquis irréversible de la démocratie malienne, tout comme la liberté d’association, d’expression et de presse. C’est à la suite d’une analyse sereine et approfondie du rôle et de la place des partis politiques dans l’ancrage démocratique et l’animation de la vie socio-politique que la loi sur le financement public des partis politiques a été initiée et votée par notre Assemblée nationale. Le confort de notre jeune démocratie en résulte aussi. C’est donc un appui aux partis politiques dans le cadre de leur animation quotidienne de la vie politique nationale, la formation et la sensibilisation de leurs militants aux grandes questions nationales. Autant, on constate des insuffisances dans sa mise en œuvre, autant il y a des dérives dans le fonctionnement des associations, des syndicats et même dans la presse. Personne n’imaginerait la restriction de ces libertés ; au contraire, il nous faut les protéger davantage en les encadrant au mieux des intérêts du pays. Le financement public des partis politiques ne doit pas être perçu comme une aumône ni, encore moins, une dilapidation des ressources publiques. Loin s’en faut ! C’est un droit inscrit dans une loi de la République. Toutes les autorités, même transitoires, doivent s’y soumettre. Toutefois, je suis d’avis que les conditions d’accès au financement public des partis politiques doivent être plus renforcées, sinon mieux moralisées, car il s’agit de l’utilisation de l’argent du contribuable malien. Un devoir de recevabilité s’impose aux bénéficiaires. Sans financement public, les partis politiques n’ont que peu de chances de transmettre leur idéologie, leur projet de société et de parvenir aux plus hautes sphères du pouvoir d’Etat. Pour exiger la transparence du financement des partis politiques, il est impérieux de le maintenir justement et de l’octroyer sans marchandage et à temps. Il est cependant difficile de parler du financement public des partis politiques sans faire référence au financement des campagnes électorales. En effet, les candidats aux élections qui représentent les partis politiques, sont soutenus par leurs partis politiques. Ces dépenses sont justifiées et contrôlées conformément aux textes en vigueur, dans un souci de transparence. Quand l’Etat s’engage à encadrer la gestion  financière des partis politiques, il se doit d’accomplir sa mission régalienne. À défaut de ce financement public, les partis politiques seront contraints de se tourner vers les contributions privées potentiellement porteuses du risque de corruption  en leur sein et même les transformer en lieu de blanchiment d’argent sale. Alors, vous comprenez donc que, tous les partis politiques bénéficiaires du financement public sont soumis à une obligation de transparence aussi bien en termes de recettes que de dépenses. C’est pourquoi, je soutiens, sans réserve, ce combat démocratique et républicain pour le maintien voire le renforcement du financement public des partis politiques. Il est simplement juste. C’est une exigence démocratique.

 

Par contre, l’unanimité est dégagée sur la réduction du nombre des Partis politiques, avez-vous imaginé un schéma à cet effet ? Va-t-on assister à la reconstitution de l’Adema-PASJ ?

 

SG Sangaré : La volonté de reconstituer la grande famille politique de l’Adéma-Pasj figure en bonne place de toutes nos instances. C’est devenu une nécessité impérieuse et urgente, une exigence des militants à la base. Nous n’avons pas attendu ces sorties orchestrées pour tenter de réduire les partis politiques, pour engager des réflexions approfondies, de reconstituer la grande famille Adema et le pôle de Gauche, en vue de former une vaste plateforme politique autour des valeurs de justice, de solidarité et de travail bien fait. Face aux défis qui se présentent, les patriotes doivent se rassembler au-delà des clivages politiques pour sauver l’État du Mali menacé dans ses fondements. L’émiettement du paysage politique ne favorise pas une telle vision. Si les nouvelles dispositions consensuelles de la Charte des partis politiques devaient entraîner la réduction du nombre de partis politiques, cela pourrait aussi favoriser une recomposition de la classe politique malienne. Nous serions heureux d’accueillir, dans la ruche, ceux qui avaient pris de nouvelles directions. Qu’il s’agisse du MIRIA du regretté Pr. Mamadou Lamine Traoré, de l’ASMA-CFP de feu Soumeylou Boubèye Maïga, de l’Union pour la République et la Démocratie (URD) de feu Soumaïla Cissé, du Rassemblement pour le Mali (RPM) de feu Ibrahim Boubacar Kéïta et de l’APR d’Oumar Ibrahim Touré. S’y ajoutent les FARE AN KA WULI de Modibo Sidibé. En ce qui concerne la volonté de réduire le nombre de partis politiques, on constate, malheureusement, que l’explosion du champ politique malien ne reflète nullement une diversité d’idéologies ou de programmes politiques. Elle s’explique essentiellement par les conditions sans doute trop libérales de la création des partis politiques, le mode et les critèwres de financement de ceux-ci et la personnalité de leurs leaders. Après plus de trois décennies d’exercice démocratique et multipartite, notre pays se trouve confronté à de multiples épreuves qui ont fini par fragiliser et discréditer les acteurs et les partis politiques aux yeux des citoyens. Vouloir réduire leur nombre n’est pas forcément la solution idoine au problème structurel que connait l’offre politique dans notre pays. De ce point de vue, la Charte des partis politiques revue et réadaptée pourrait s’avérer providentielle dans une optique d’assainissement, de moralisation et de contrôle politiques et, cela, sans porter préjudice aux droits et libertés garantis par la Constitution de juillet 2023. Il incombe donc aux hommes politiques d’unir leurs forces au sein de leurs formations politiques dont ils feraient des outils aiguisés dans l’art des négociations habiles et de dynamiques alternatives. Le multipartisme, même dans un contexte limitatif circonscrivant le nombre des partis, donne la chance à toutes les sensibilités de s’exprimer dans l’arène politique. Vouloir affaiblir les acteurs et les institutions politiques, c’est ignorer l’évidence que ceux-ci sont incontournables et irremplaçables dans l’animation politique, si tant est que la démocratie signifie un repère pour nous. Évidemment, une démocratie toujours marquée du sang de nos compatriotes sacrifiés en mars 1991 pour l’ouverture politique et l’idéal démocratique. Ce n’est pas anodin si la Constitution de juillet 2023 prête autant d’importance, en son article 185, au multipartisme intégral qu’à la forme républicaine et laïque de l’Etat voire à la limitation du mandat présidentiel : « La forme républicaine de l’État, la laïcité, le nombre de mandats du Président de la République et le multipartisme ne peuvent faire l’objet de révision ». Pour ma part, les réformes souhaitables pour les partis politiques ne relèvent pas d’un ajustement d’ordre quantitatif mais de l’amélioration des lignes programmatiques et de l’animation politique. Or, jusqu’ici, les propositions qui reviennent dans le débat public comme alternatives à l’inflation des partis politiques consistent à ramener leur nombre à cinq ou à moins de cinq. La question aurait pu être posée autrement : comment les partis politiques pourraient à la fois correspondre aux aspirations éclectiques des Maliens et élargir les horizons de leur perception globale et pertinente de la vie publique. Au fait, quelle est ou pourrait être la portée d’une opération de réduction à outrance des choix ?  S’il est vrai qu’il existe une crise de nombre des partis politiques, la régulation à marche forcée de ces derniers risque d’ouvrir la porte à une fragilisation du processus démocratique.

 

Selon vous, peut-on nourrir l’espoir d’assister dans un avenir proche à des élections au Mali ?

 

SG Sangaré : La Transition devait se terminer le 26 mars 2024, par l’organisation d’élection présidentielle, mais elle a été reportée unilatéralement, à travers un communiqué laconique du Ministre d’Etat, Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Cela, sans débat au sein du Gouvernement, selon l’ancien Premier Ministre, Dr Choguel Kokala Maïga. Après tant d’atermoiements, de nombreux doutes subsistent à mon niveau et dans la plupart des formations politiques notamment sur la capacité ou la volonté des Autorités de la transition à les organiser. Il urge, après cinq (5) ans de transition, l’équivalent d’un mandat électoral, hors tout processus électoral, de fixer un chronogramme détaillé et précis. C’est avec un grand étonnement que nous notons la quasi-absence de toute référence à l’organisation des élections devant mettre fin à la période transitoire, même si les charges liées à l’organisation de l’élection présidentielle avaient été inscrites, un moment, dans le budget d’Etat 2025. J’exhorte encore les autorités en place à organiser, dans les meilleurs délais, un cadre de concertation entre le Gouvernement et la classe politique, pour dégager un consensus sur la question du retour à l’ordre constitutionnel et sur une nouvelle architecture inclusive, ainsi qu’il ressort de la déclaration commune des partis, regroupements politiques et organisations de la société civile du 31 mars 2024. Il est vraiment temps pour le pays de sortir de cette phase transitoire, de cet état d’exception. Nous travaillerons à ce que les élections se tiennent en 2025. Ceux qui conseillent aux autorités de se soustraire à la tenue d’élections ne rendent service à personne… Le refus ou le report sine die des élections apparaît comme une impasse voire un piège à éviter à tout prix, qui peut se refermer sur ceux qui l’ont installé. Au regard de l’importance des élections pour un pays traumatisé comme le nôtre, nous sommes engagés pour leur tenue dans un climat sociopolitique serein et inclusif.

 

Parlant des élections, de la voix de votre Président, l’Adema-PASJ aura son candidat à la présidentielle, comment cela va se passer ? Assisterons- nous à la réédition du scénario avec ATT en 2002 et 2007 ?

 

SG Sangaré : À priori, rien n’empêche l’Adéma-PASJ, la première force politique et sociologique du pays, de présenter un candidat à la présidentielle, le jeu d’alliance pouvant se jouer, par la suite, sous des conditions transparentes, respectant les valeurs des parties concernées et les intérêts vitaux du peuple malien. Dans une dynamique d’équipe, au Comité Exécutif, nous travaillons dur pour notre parti en laissant aux militants le soin de décider où nous devons être pour l’intérêt collectif du parti et de la nation. Comme le dirait l’autre : «Faisons juste notre boulot et nous progresserons ».

Donc, à la suite de nos différentes assises, il ne doit plus exister de doute sur cette question. Le parti ne saurait faire l’économie d’une candidature interne, mais ne saurait aussi cracher sur l’opportunité de nouer des alliances électorales et politiques gagnant-gagnant, avant, pendant et après les échéances électorales. Car, nous sommes convaincus que rien de durable et de stable ne pourra se construire dans notre pays sans alliance des forces politiques et sociales œuvrant pour le bonheur des Maliens. Rien de nouveau sous le soleil de l’Adéma-PASJ, en ce moment. Les supputations peuvent aller bon train, mais nous restons imperturbables et sereins dans notre logique. Et nous ne nous engagerons dans aucune compromission, encore dans un marchandage politique sans consistance. Seuls la volonté et les intérêts de nos militants nous guideront dans notre choix définitif. Il est vrai que la gestion de l’Adéma-PASJ n’est pas aisée, surtout le choix de son candidat pour la présidentielle, car notre parti est traversé par plusieurs courants (et non des clans) qui, malheureusement, ne s’affrontent pas sur les idées, les principes et les valeurs qui nous ont réunis. Ce qui biaise parfois les débats. Le choix de notre candidat interviendra dès que toutes les conditions favorables y seront réunies. La raison d’être d’un parti politique étant la conquête et l’exercice du pouvoir d’Etat, l’Adéma-PASJ ne manquera pas de cadres valables pour participer à cette belle compétition démocratique qu’est l’élection présidentielle. Toute autre décision serait synonyme de suicide politique pour les dirigeants et les cadres du parti. Car nous avons tiré tous les enseignements de nos accompagnements voire nos soutiens parfois inconditionnels aux régimes successifs depuis notre départ du pouvoir d’Etat en 2002.

 

S’il devait y avoir un deal entre les hommes forts de l’heure et la  classe politique pour un retour à la normalité, selon vous, en votre qualité de Secrétaire Général de la plus grande formation politique du pays, quels seront les contours de ce deal ?

 

SG Sangaré : Il ne peut y avoir de deal, en tant que tel, mais nous serons ouverts à tout compromis dynamique qui sauvegarde la paix sociale, la stabilité dans le cadre du respect mutuel de nos identités propres et du respect des textes qui régissent la vie nationale. Je suis formel : toutes les contradictions politiques doivent être tranchées dans les urnes. L’accès, le maintien ou la destitution à une fonction politique comme celle de Président de la République ou Chef de l’Etat doit revenir pleinement au peuple souverain malien, à travers les urnes. Toute collaboration doit avoir comme fondement la confiance réciproque, le dialogue permanent. Il nous faut travailler à cela au lieu de la confrontation, du rapport de forces qui sont puériles et sans lendemain. Ce jeu profite généralement à ceux-là qui sont tapis dans l’ombre et qui n’ont aucune base politique ni sociale à mobiliser, aucune proposition positive à faire. Tout Malien a le droit d’avoir des ambitions présidentielles, pourvu que ces ambitions soient conformes aux lois que nous nous sommes librement octroyées. La source de tout pouvoir réside dans les urnes, d’où l’obligation de retourner à l’ordre constitutionnel qui consacre les élections comme seule voie d’accès à la magistrature suprême de notre pays. Persister dans la voie actuelle est une aventure assez risquée, et pour les autorités en place et pour le pays tout entier. Aucune intrusion ne doit être tolérée dans le jeu démocratique. Aujourd’hui, nous constatons que nos nouveaux généraux sont portés à bout de bras par des légitimités traditionnelles coutumières, tandis qu’aucun espace public n’est épargné par des générations spontanées de soutiens tous azimuts. Il en faut peut-être plus, dans une élection à plusieurs inconnues, organisée dans les urnes, à différents endroits du pays, pour rafler l’adhésion des citoyens, les vrais électeurs. C’est pourquoi, des pourparlers sont nécessaires pour arrondir les angles et convenir de la meilleure stratégie électorale pour aller à des résultats inattaquables sortis des urnes. Le retour à l’ordre constitutionnel exige l’organisation d’élections générales démocratiques, inclusives, transparentes, apaisées et peu contestées. Pour cela, il nous faut des assurances à l’adresse de toutes les parties prenantes, des compromis dynamiques qui ne compromettent pas les intérêts vitaux du pays, de la sincérité dans les relations de collaboration autour d’un projet de société consistant et ambitieux. Si j’ai un conseil à donner aux hommes forts de l’heure, je leur dirai ceci, en toute franchise : La multiplication des mouvements de soutien à la transition leur donne l’illusion d’une adhésion populaire massive à leur cause. Cependant, ces initiatives sont souvent portées par des figures déjà bien établies dans les appareils politiques et de l’administration publique, voire dans les organisations de la société civile, cherchant à préserver leurs privilèges. Plutôt que de mobiliser les citoyens autour des enjeux cruciaux, ces mouvements créent une bulle d’autosatisfaction, les éloignant, en tant que dirigeants, certainement de bonne foi, des réalités du pays…C’est vrai qu’il faut vivre avec ses convictions, mais il faut savoir écouter les autres exprimant d’autres opinions et porteurs d’autres convictions… Dans tous les cas, la violation répétée des lois de la République par ceux qui en ont la garde peut entraîner d’autres transgressions aux conséquences imprévisibles pour le pays. Sachons donc raison garder.

 

Propos recueillis par Mariam Sissoko

Source : Le Sursaut
Suivez-nous sur Facebook, Telegram, WhatsApp pour ne rien rater de l'actualité malienne
Ecoutez les radios du Mali sur vos mobiles et tablettes
ORTM en direct Finance Les plus bas prix du Mali Acheter à bas prix au Mali Achat terrain à Bamako Terrain à vendre Bamako Immobilier titre foncier TF à Bamako ORTM en direct, RTB en direct RTN tele sahel niger ne direct