L’indice IFO sur le moral des entrepreneurs allemands est franchement pessimiste: il affiche un recul de 3,6 points sur un mois à 88,6 après 92,2 (révisé) en juin alors que les économistes et analystes interrogés par Reuters prévoyaient en moyenne une baisse à 90,2. Ce qui montre que la hausse des prix de l’énergie et la crainte d’une pénurie de gaz ont pesé encore plus que prévu sur le climat des affaires de l’Allemagne, première économie européenne.
Cet indicateur sur le moral des entrepreneurs allemands est l’un des plus surveillés par les marchés: réalisé par le Leibniz-Institut für Wirtschaftsforschung (l’Institut de recherche économique de l’Université de Munich), l’indicateur IFO (acronyme formé avec les mots allemands “Information” et “Forschung”, recherche) montre l’évolution des conditions économiques en Allemagne au travers des résultats d’une enquête menée chaque mois depuis l’année 1980 auprès de milliers d’entreprises allemandes dans un vaste panel de secteurs d’activités : manufacturier, BTP, commerce de gros et de détail… Chaque entreprise répond à un questionnaire sur l’évolution des conditions actuelles et donne son avis sur leur évolution pour les 6 prochains mois. En dessous de l’indice 100, le moral des entrepreneurs tend au pessimisme.
Un plus bas depuis juin 2020
Pour Clemens Fuest, qui dirige l’institut IFO, c’est la valeur “la plus basse depuis juin 2020”, un mois qui marquait le point de la remontée du climat des affaires après l’effondrement de l’indice dû à la pandémie de Covid-19.
« Dans le secteur manufacturier, l’indice s’est effondré. Le pessimisme concernant les mois à venir a atteint son plus haut niveau depuis avril 2020. Ce pessimisme s’étend à presque toutes les industries », a déclaré Clemens Fuest, dans le communiqué publié ce lundi.
Dans le détail, la composante du jugement des chefs d’entreprise sur leurs conditions actuelles d’activité a baissé à 97,7 après 99,4 (révisé) le mois dernier, et celle mesurant l’évolution de leurs anticipations recule également, à 80,3 en juillet après 85,5.
Et l’indicateur sur les attentes a reculé de 5,2 points à 80,3, poursuivant une tendance observée depuis le début d’année avec l’éclatement de la guerre en Ukraine.
« L’humeur s’est retournée même dans le tourisme et l’hôtellerie, malgré un grand optimisme récent dans ce domaine », ajoute Clemens Fuens.
Et de préciser :
« Dans le commerce, l’indicateur a de nouveau chuté. (…) À l’heure actuelle, pas un seul segment du commerce de détail n’est optimiste pour l’avenir. »
Incertitudes sur le gaz, impatience sur le charbon, et canicule sur le Rhin
Les industriels allemands craignent un rationnement du gaz qui obligerait à fermer une partie de l’outil productif car, malgré la réouverture du gazoduc Nord Stream 1 et de l’approvisionnement vers l’Europe après 10 jours de maintenance sous haute tension, les quantités livrées restent bien en deçà de ce qu’attend l’Allemagne pour atteindre un niveau adéquat de ses réservoirs et être en mesure d’affronter l’hiver prochain.
C’est pourquoi le directeur de l’Association des chambres allemandes de l’industrie et du commerce (DIHK), Martin Wansleben, a regretté, ce même lundi sur la chaîne télé ZDF, que la “réserve de charbon”, qui sert à garantir la sécurité énergétique du pays, ne soit activée qu’à partir du 1er octobre et non pas maintenant.
Pour ne rien arranger, l’envolée des températures, qui a fait chuter les niveaux d’eau des principaux fleuves à des plus bas proches de ceux de l’année 2018, perturbe fortement la navigation marchande notamment sur le Rhin, par où transitent des millions de tonnes de marchandises et de minerais en provenance des ports néerlandais.
L’IFO corrobore l’indice PMI publié vendredi dernier
Cette chute du moral des entrepreneurs corrobore ainsi cet autre indicateur important de la santé de l’économie allemande annoncé vendredi, l’indice des directeurs d’achat (PMI) du secteur manufacturier allemand qui a, lui, chuté en juillet à 49,2 (une valeur en-dessous de 50 indique une contraction de l’activité).
Vendredi prochain, la donnée attendue sera la première estimation de la croissance de l’économie allemande au second trimestre dans ce contexte de craintes d’une récession.