Si la transition a mérité le coup de chapeau pour l’organisation de l’élection présidentielle, en juillet et août 2013, dans des conditions transparentes et crédibles en dépit de quelques dysfonctionnements dont les causes profondes remontent à plus loin dans le mauvais état du fichier électoral, même biométrique à la dernière minute,
elle a lourdement péché dans la prise de certaines décisions qui sont de nature à hypothéquer le bon fonctionnement des institutions de la république, singulièrement l’armée, avec des actes qui jurent avec la discipline et le respect de la chaîne de commandement au sein des forces armées et de sécurité.
En tête de ces peaux de banane : le Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense ou CMRFSD, placé sous le commandement du capitaine Amadou Haya SANOGO alors que des officiers « plus gradés », comme des commandants et autres colonels, y siégeaient.
Cette entorse à la discipline n’a été corrigée qu’à la faveur de la nomination du capitaine SANOGO au grade de « général de corps d’armée », à quelques encablures de la fin de la transition, tandis que le nom du nouveau président de la république était déjà connu en la personne du candidat RPM et alliés, Ibrahim Boubacar KEITA alias IBK.
Or, cette nomination, jugée très sélective, a laissé sur le carreau le plus gros contingent des hommes de rang, véritables auteurs du coup d’Etat militaire qui a renversé le régime du général ATT en mars 2012 pour incompétence à faire face à la grave crise sécuritaire au Nord du pays.
A cette frustration se sont greffés les avantages et émoluments liés au fonctionnement et au commandement du Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense.
Donc, tous les ingrédients étaient réunis pour créer un « sentiment de jalousie et de trahison » au sein des ex putschistes, pouvant déboucher à tout moment sur « un clash » des plus musclés entre les protagonistes qui sont tous « armés jusqu’aux dents ».
C’est ce qui s’est malheureusement produit le 1er octobre 2013 avec les événements de Kati où une trentaine de soldats, mécontents de n’avoir pas été promus aux grades supérieurs, ont fait irruption dans le siège du Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense Comité de suivi de réformes de forces armées (CNDRE), avant de blesser et d’enlever le lieutenant-colonel Mohamed El Habib DIALLO, le directeur de cabinet du général Amadou Haya SANOGO, accusé d’avoir « bloqué » leur liste.
« Nous sommes toujours au camp de Kati avec l’otage. Tant que SANOGO ne va pas nous donner nos galons, nos primes et nos avancements de salaires, on ne va pas le laisser. Nous attendons un rendez-vous avec lui. Lui, il a eu l’argent, le grade ; nous, on a rien eu. Ce n’est pas un problème entre l’Etat et nous, c’est un problème entre SANOGO et nous », avait confié à l’Afp, lundi, le sergent Ousmane COULIBALY, un des un des soldats en colère, après avoir confirmé la séquestration de l’officier DIALLO qui été ensuite relâché pour recevoir des soins avec l’intervention du ministre de la Défense et des anciens combattants, Soumeylou Boubèye MAIGA.
« Il s’agit de militaires mécontents après les récentes promotions au sein de l’armée nationale », nous a confirmé le chargé de communication de l’ex CNDRE (Comité national pour la démocratie et la restauration de l’Etat), M. COULIBALY, précisant que la situation était « sous contrôle » dans l’après-midi.
« Il s’agit des éléments de la garde rapprochée du capitaine Amadou KONARE et du colonel Youssouf TRAORE, qui accusent le chef de cabinet du Comité de suivi des reformes d’avoir enlevé leurs noms sur la liste de nomination au grade supérieur et d’oublier superbement le capitaine KONARE pour la promotion exceptionnelle. Ils sont venus avec des fusils mitrailleurs vers 10 h00 et ont commencé à tirer partout. Ils ont ensuite enlevé le lieutenant-colonel Mohamed El Habib DIALLO pour une destination inconnue », a révélé, pour sa part, Malijet, un journal malien en ligne, citant une source militaire à Kati.
C’est pour éradiquer le mal à la racine et en finir avec ces peaux de banane que le président IBK a pris la mesure courageuse concernant le fameux Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense qui sera dissout en bonne et due forme, « si nous voulons demeurer un pays d’honneur qui nous commande, en toute humilité, d’être attentifs aux déséquilibres, à l’iniquité et, d’une manière générale, aux dysfonctionnements dans l’armée ».
« J’ai d’ailleurs instruis au gouvernement de procéder sans délai à la liquidation des comptes et l’établissement du procès-verbal de dissolution du Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense », a-t-il préconisé, avant d’insister à l’endroit des chefs militaires qui sont mis devant leur responsabilité : « Que la hiérarchie prévale ! Que les chefs militaires s’assument ! Que la chaîne de commandement se fasse obéir ou qu’elle s’avoue impuissante et incompétente, alors ce qui doit être fait le sera, et ce, sans délai ».
Car, a-t-il justifié, il n’a pas été porté à la tête de ce pays « pour l’affaiblir, le trahir, le piller, en faire la risée du monde ou le laisser aller à la dérive », à l’instar des événements ineffables de Kati.
« Me sachant, vous imaginez aisément l’indignation et l’humiliation que me causent les évènements dont Kati est le triste théâtre depuis lundi », a-t-il pris à témoin le peuple malien, avant d’annoncer qu’une investigation est en cours sur les raisons et les acteurs de « cette gifle à la nation » au moment où, répète IBK, « les soldats d’autres nations, quittant leurs pays et leurs familles, sont sur notre sol, pour nous défendre, et cela parfois jusqu’au sacrifice suprême ».
« Pour l’armée républicaine promise et attendue comme pour les autres segments de la nation, il n’est guère de salut en dehors de l’ascenseur républicain, c’est-à-dire le mérite, la prévisibilité, l’équité et la justice », a professé IBK qui dit ne jamais « tolérer l’indiscipline et l’anarchie », tout en renouvelant ses engagements pour « l’avènement de la nouvelle République et de la nouvelle armée ».
Par Seydina Oumar
DIARRA-SOD
Source: Info-matin