Avec la grève des magistrats certains veulent faire porter l’échec des négociations par le ministre de la Justice, des Droits de l’homme, Garde des Sceaux, alors que la réalité est ailleurs. C’est le gouvernement qui joue à la mauvaise foi avec les magistrats. Les acteurs de la justice en savent les raisons.
L’actuel ministre de la Justice a hérité d’une situation potentiellement problématique avec la menace de grève des magistrats en gestation, au point que son prédécesseur avait initié des rencontres avec les magistrats pour détendre le climat. Certaines propositions avaient été faites sans jamais obtenir l’approbation des magistrats. C’est ainsi que la mise en exécution de la première grève de magistrats, en juillet 2016, a coïncidé avec la nomination de l’actuel ministre de la Justice. Ce dernier ne pouvait plus rien faire.
Après les 72 heures de grève, le ministre a initié un dialogue national. Une rencontre pour diagnostiquer tous les problèmes au niveau de la justice avec des experts nationaux, des inspecteurs des services judiciaires, des représentants des acteurs actuels, syndicats, greffiers, surveillants de prison, police judiciaire, OPJ et les parquetiers. Ce dialogue national a duré un mois avec l’aval du gouvernement. Mais depuis la publication des conclusions de cette rencontre nationale, le gouvernement refuse de les reconnaître.
À la primature, on parle de rapport d’étape ; la ministre de la Fonction publique et du Travail parle d’un travail en solo. Elle se permet même de communiquer les émoluments proposés aux magistrats à des responsables de structures de jeunes : Mohamed Salia Touré en est une illustration. Elle pense que les propositions de salaires et primes sont trop élevées. C’est elle qui est la première à avoir initié une véritable cabale d’intoxication contre le ministre Mamadou Ismaël Konaté. La ministre de la Fonction publique parle bien de lui en face, et le dénigre devant certains magistrats qu’elle avait entrepris pour saboter le mouvement de grève des magistrats. Mais ces derniers ont été remis à leur place par le bureau du SAM qui les avait démasqués il y a longtemps.
Dans les réunions de la commission du dialogue national du ministère de la Justice, des Droits de l’homme, avec le syndicat autonome de la magistrature et le syndicat libre de la magistrature, il a été conclu que les doléances à incidence financière des magistrats maliens soient traitées au même niveau que leurs collègues de l’espace UEMOA. Ce qui ne devrait pas poser problème d’autant qu’on dit que le Mali est le premier pays en bonne gouvernance des affaires financières, et un bon élève du FMI et de la Banque Mondiale.
C’est grâce à ce dialogue que de 57 revendications, les magistrats en sont aujourd’hui à 6 dont la satisfaction de certaines n’implique aucune incidence financière. En plus de tout cela, l’actuel ministre de la Justice est victime aussi des réformes annoncées au niveau de la justice, les actions qu’il compte entreprendre comme la déclaration des biens avant toute prise de fonction, la traduction des ministres fautifs devant la justice, la guerre contre les détourneurs de biens publics. Les annonces du ministre Mamadou I. Konaté ont coupé le sommeil à beaucoup de personnes qui savent très bien que l’actuel ministre n’a rien à perdre dans ces combats, sa vie n’étant pas liée à un poste ministériel.
Les multiples chantiers qu’il veut ouvrir dans la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite sont à la base aujourd’hui des divergences entre lui et certains membres du gouvernement d’abord, les partis de la majorité présidentielle ensuite. Ces gens avaient cru voir en la grève des magistrats une bonne occasion pour sacrifier Me Konaté. Peine perdue. Parce que la réalité est connue de tous les acteurs de la justice qui seront les premiers bénéficiaires des actions du ministre. Lequel veut que nos magistrats soient dans les meilleures conditions pour bien travailler afin de rendre des jugements de qualité.
Pour ainsi dire, le travail gouvernemental nécessite beaucoup de solidarité entre les ministres. Mais, aujourd’hui, tel n’est pas le cas. Cette solidarité, on ne la sent pas dans l’actuel gouvernement dont l’un des ministres cachés, mais très influent, est le directeur de cabinet du Premier ministre. Il se permet même d’inviter les magistrats sans en aviser son patron. Les magistrats ne demandent qu’un dialogue franc, un traitement digne d’un magistrat de la sous-région. Avec ou sans le ministre Konaté, les revendications des magistrats ont besoin de réponses au plus vite, au risque de bloquer l’appareil judiciaire.
Sinaly KEÏTA
Source : Le Reporter