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Gouvernement Modibo Kéïta : Le ver n’est pas totalement tiré du fruit !

Sans pour autant l’affirmer ouvertement, le président de la République, IBK ne sent pas bien certaines pontes de son parti, le RPM. A la tête duquel, il a confié son intérim à Boulkassoum Haidara. Avant de porter son choix sur un apolitique. Deux faits qui démontrent que le « Kankéletigui » a opté pour la carte de la sagesse. Sans doute, pour une fois de plus le secrétaire général du RPM, Bocary Téréta, à qui on prête le rôle de déstabilisateur du gouvernement, devra prendre son mal en patience. Il devra se contenter avec le poste de ‘’vice-Premier ministre’’. Va t-il s’en contenter ou tourner casaque ? Comme cela a été le cas entre Mamadou Lamine Traoré et Alpha Oumar Konaré en 1994 ? Lisez plutôt.

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Dans notre analyse, intitulée “IBK dans un dilemme cornélien” nous avions évoqué les difficultés qu’il éprouvait à trouver le bon équilibre entre la forte influence de sa belle-famille dans la sphère de l’Etat et la juste stratégie à trouver pour une meilleure implication de sa famille politique (RPM et ses alliés), notamment le jeu d’influence entre les diverses tendances. Comme solution, nous avions préconisé la convocation d’une assise de son parti pour confirmer un leadership, qui allait assurer également celui de la majorité présidentielle et la nomination d’un RPM à la Primature. Peu de temps après, une assise a été convoquée. A l’issue de laquelle Boulkassoum Haïdara a été désigné comme président par intérim. Une partie du problème venait d’être réglée. Il restait la question cruciale, qu’est la Primature. Mais, à la différence des deux précédentes nominations, cette fois le Président a opté pour la sagesse.

Le ton était ferme et le message présidentiel très clairement énoncé, le mercredi dernier, à Koulouba. Pour la deuxième fois consécutive, le discours de cadrage du président de la République, El Hadj Ibrahim Boubacar Kéïta, prononcé à la faveur du premier conseil des ministres, laisse entrevoir des légers écartements entre les lignes. Comme cela était le cas dans le gouvernement sortant de Moussa Mara. Celui du sexagénaire, Modibo Kéïta, semble manquer de l’apport du réel engagement du parti présidentiel. Quand bien même que la forte personnalité du Chef du gouvernement lui donne un avantage, garantissant sa réussite. Mais, il doit s’armer d’arguments pour contenir les caprices des dirigeants, militants et sympathisants du Rassemblement Pour le Mali (RPM). C’est à dire réussi, là où Mara a échoué. C’est une intelligence politique que le Président lui-même en sait beaucoup. Pour s’en rendre compte, un bref retour en arrière s’impose.

Rappel du scénario de la crise politique sous AOK !

On était en 1993. Le premier gouvernement formé par le 1er président de la République de l’ère démocratique, Alpha Oumar Konaré (AOK), alors dirigé par Younoussi Touré, fait face à sa première crise. Le banquier, qui n’avait pas l’expérience des coups politiciens fut surpris par une crise politico-estudiantine. Ce jour là, les élèves et étudiants ont rendu en cendres plusieurs édifices publics et privés, dont le siège de la Coopérative Jamana, dans laquelle, l’ancien président AOK est actionnaire. Pour les initiés au “Komo”, la manifestation portait la marque de certains mécontents du parti majoritaire. Le choc émotionnel a été tel que le Premier ministre, Younoussi Touré, n’a pas eu le répondant nécessaire pour faire face à la crise. Il présenta sa démission au Président de la République, qui l’accepta avec des pincements au coeur.

Arriva, l’heure d’Abdoulaye Sékou Sow, qu’AOK nomma à la place de Younoussi Touré. Mais, pour les observateurs de l’arène politique, AOK, n’avait fait que déplacer le problème. Car, les mêmes causes vont produire les mêmes effets, par le fait que les zombies étaient toujours aux aguets. Abdoulaye Sékou Sow, le confirmera plus tard dans son ouvrage polémiste, intitulé “L’État démocratique républicain : la problématique de sa construction au Mali”, publié peu de temps avant sa mort.

La formation de ce 2ème attelage a été suivie par une courte pause. Le temps de préparer un nouveau bataillon, cette fois plus tenace. A moins de deux mois, les mouvements estudiantins reprenaient de plus bel et gagnaient en intensité alternant sortie de classes et casses dans les rues de Bamako et dans les grands centres urbains du pays. Très lassé et ne sachant plus où mettre de la tête, le Premier ministre Abdoulaye Sékou Sow, abdiqua. A la différence de son prédécesseur, Younoussi Touré, qui démissionna en bonne et due forme, au terme d’un discours pathétique radio-télévisé, Abdoulaye Sékou Sow, utilisa le terrain, comme disent les militaires (qui signifie fuir). C’est de son domicile, qu’il informa le président de la République, AOK, de sa démission. Celui-ci, qui feignait  jusque-là d’ignorer le message de ses détracteurs à l’intérieur de son parti, refuse encore une fois de mordre à leur hameçon. C’est ainsi, qu’il sortira de sa besace, le ‘’Mandé mansa’’ pour le mettre à la tête du gouvernement et plus tard du parti, au grand dam du président intérimaire, Mamadou Lamine Traoré (MLT), jusque-là tout puissant ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité.

Le Mandé Mansa, doté de tous les pouvoirs, règne sans état d’âme. Cette main de fer aura raison de la ruse et du malice de MLT et les siens, qui ont préféré partir que de se soumettre à l’autorité du nouveau PM, bombardé à la tête du parti majoritaire, à la faveur de son 1er Congrès ordinaire, tenu en 1994. De cette date au clash entre les deux hommes en 2000, IBK pacifie l’arène politique, non sans peine. AOK eut alors raison de ses adversaires internes et par ricochet des opposants politiques, qu’IBK tenait à bonne distance. Le gouvernement commença alors a soufflé et se consacrer aux actions de développement, pour lesquelles, il a été élu.

Pourquoi une bisbille a séparé AOK et son ancien camarade de lutte de longue date, MLT ? Selon certains proches du second, le 1er aura trahi l’accord de partage du pouvoir entre les diverses composantes de l’Alliance, qui formait l’ADEMA (le PRMD et le PMT). C’est-à-dire que l’un prenait la Présidence, l’autre la Primature. Mais, AOK ayant eu peur de la forte personnalité de MLT, s’est rebiffé une fois au Pouvoir. Celui-ci aussi et ses camarades n’entendaient pas se laisser faire. D’où l’instabilité politique intelligemment entretenue par la tendance du second, jusqu’à la fin du régime AOK en 2002. Après avoir vaincu MLT par l’entremise d’IBK et d’autres camarades du parti, en les utilisant comme moyen d’écrasement de la résistance du MLT, ce fut alors le tour d’IBK lui-même d’être éjecté du système pour faire de la place à l’ancien président de la Transition, Amadou Toumani Touré (ATT).

Le Président IBK, désormais imperturbable !

Les errements d’IBK rappellent ceux d’AOK. Car, comme AOK, IBK aussi chercherait probablement à se détacher de son camarade secrétaire général du RPM, devenu un peu plus encombrant. Il ressort des témoignages recueillis auprès de certains acteurs politiques, y compris du RPM, le petit extrait passé au journal télévisé du 20 heures lui était clairement destiné. Selon ses détracteurs il aurait usé de son influence au sein de l’appareil d’Etat pour mettre du bâton dans les roues des deux anciens Premiers ministres, Oumar Tatam LY et Moussa Mara. Tous les deux ont eu du mal à tenir le gouvernail. Le travail de sape a beaucoup handicapé le second, qui était monté sur un piédestal suffisamment haut, au point de se prendre pour un intouchable. Si bien que les multiples réunions qu’il convoquait étaient boudées par les Ministres. Pas besoin donc d’être alchimiste pour constater l’insubordination de certains ministres, qui ne rataient pas d’occasion pour braver son autorité. Certaines scènes prouvaient à suffisance le comportement rebelle de ces ministres, notamment la guerre de visibilité engagée par Bocar Téréta vis à vis de Mara sur le terrain. Mêmes les observateurs les moins avertis n’avaient pas du mal à constater le désamour entre les deux hommes. Pour le secrétaire général du Rassemblement Pour le Mali (RPM) et ses camarades, Moussa Mara aurait, non seulement usurpé de son fauteuil primatorial, mais en profitait pour donner de la visibilité à sa formation politique ‘YELEMA”. Donc, écouté sous cet angle, il est évident qu’on ne peut mettre le discours musclé du Président de la République qu’au compte de Bocary Téréta. Une situation qui avait fini par mettre en mal la cohésion du gouvernement obligeant le Président de la République à arbitrer entre les deux hommes.

Sans doute, IBK aussi fait face à quelques contradictions à l’intérieur de sa formation politique. Mais, à la différence d’AOK, les contradictions qui émoussent un peu les énergies du ‘’Mandé Mansa’’ ne sont pas aussi raides. Il semble avoir la maîtrise de la situation. Sa position de Président de la République et du grand ‘’Manitou’’ de son parti font qu’il a toujours le dernier mot. Il a donc une ascendance sur ses supposés détracteurs. Certes, il se méfierait de la forte personnalité du secrétaire général du RPM, Dr Bocary Téréta, à qui l’on prête le rôle de déstabilisateur dans l’ombre des gouvernements successifs d’IBK, mais en même temps, il a conscience, que celui-ci est un tigre en carton. Car, il doit sa superpuissance à son poste. Dès qu’on  le débarque, il devient très transparent, comme ce fut le cas entre Djibril Tangara et ATT après sa réélection en 2007. Au moment où ce dernier se prenait pour le nombril de la terre. Comme on le dit en Bambara, le veau peut ne pas connaître le lion, au point de s’amuser avec sa queue, mais la vache n’oserait pas s’y approcher.

Du ring sans projecteurs !

C’est dire que les coups bas  qui se fomentent dans l’arène politique relèvent plutôt d’un combat de caniveau, entretenu par certains de ses proches. Sinon, Tréta lui-même, malgré son aura auprès de certains de ses inconditionnels, hésite de combattre à visage découvert, car n’ayant pas les moyens d’entretenir un bras de fer avec son patron. C’était le cas avec Oumar Tatam Ly (OTL), qui avait été nommé à la surprise générale de tout le monde, y compris les tisserands. Mais jusqu’à son départ de la Primature, Bocary Téréta a été obligé de faire avec. Mais, OTL a péché par son inexpérience politique de la même manière que son successeur, Moussa Mara qui a, semble t-il, été rattrapé par une autre faute originelle. Au lieu de briser la force de frappe de l’intérieur, malheureusement les deux ont  fermé les yeux sur le bras de fer, jugé par eux inutile, car mené contre la volonté du locataire de Koulouba.

Mais au fait, que devraient-ils faire ? Ils devraient d’abord se faire des amitiés à l’intérieur du parti. En entretenant ces amitiés, ils allaient faire d’eux des inconditionnels à leur cause, de telle sorte qu’ils aient des avocats défenseurs lors des débats sur leur avenir à la tête du gouvernement dans les réunions des Tisserands. Mais malheureusement, ils ont pêché quand bien même que leur patron nourrissait l’espoir de compter sur leur intelligence pour réussir son début de mandat.

Là où ces deux ont échoué, le sage Modibo Kéïta devra réussir pour le plaisir du Président de la République, qui  a jeté son dévolu sur lui pour diriger le gouvernement, au moment où des noms des tisserands revenaient dans les conversations de salons feutrés, pour prendre les rênes de la cité des bords du Djoliba. D’abord, par ce que le vieux Kéita a eu la hauteur d’esprit d’aller rendre visite aux tisserands avant même de prendre fonction, aussi d’accepter de faire son second naturel dans l’attelage gouvernemental, Dr Téréta. Toute chose qui pourra rassurer le russe-politique que son destin ‘’primatorial’’.

Au demeurant, une question brûle les lèvres. Celle de savoir si Bocary Téréta se contentera de son fauteuil de vice-Premier ministre, ou s’il va continuer à déstabiliser le gouvernement dans l’ombre ?

En tout cas, dans l’une ou l’autre hypothèse le président IBK, a été ferme sur toute tentative de déstabilisation.

Affaire à suivre

 

Mohamed A. Diakité

Source: Tjikan

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