Comment est née l’idée d’un roman sur les trains?
Ce roman fait partie d’un long travail littéraire que je mène depuis le milieu des années 1990 intitulé Cahiers de mémoires. Le premier carnet est sur les relations n’ayant pas existé et ce qui serait arrivé si elles avaient existé. Le deuxième carnet a pour thème le train. Le train est dans ma vie depuis que j’étais dans le ventre de ma mère et qu’elle a pris le train pour me donner naissance en Haute-Égypte. Mais pour moi, le train est aussi un symbole de la vie. En Égypte, il contient tout un monde. Des vendeurs de toutes sortes de nourriture s’y déplacent, mais il y a aussi les poètes qui s’accompagnent de la Rababa en racontant des histoires pour distraire les voyageurs, de même des relations se créent entre les passagers qui discutent entre eux avec beaucoup de facilité…
Ce livre qui vient d’être traduit en français a été écrit en 1997. Vos personnages en réfèrent beaucoup à Dieu et on sent une grande religiosité. Est-ce qu’ils vous semblent toujours actuels aujourd’hui?
André Malraux, grand écrivain français et que j’aime beaucoup, a dit que l’Égypte a inventé l’éternité. L’Au-delà se trouve dans le livre sacré égyptien connu à tort en Occident comme le Livre des morts, car son vrai nom en hiéroglyphe est l’Accès à la lumière. Les Égyptiens croyaient en effet qu’après la mort l’être humain revenait à la vie. Pour cela ils ont inventé la momification. En Égypte, la religion est profonde. Mais il s’agit d’une religion qui respecte l’éternité et la vie, non pas une religion extrémiste.
Vous faites partie des intellectuels qui ont soutenu le retour du gouvernement militaire et la destitution du président Morsi. Les Frères musulmans vous semblent aujourd’hui un danger pour l’Égypte?
Il n’y a pas de gouvernement militaire en Égypte. Je réfute cette appellation. Il y a un malentendu concernant la situation en Égypte. En résumé, les Frères musulmans ont gouverné le plus grand pays arabe grâce à un vote démocratique. Mais ils ont échoué à mettre en place un programme respectant le peuple égyptien et sa culture. Ainsi le peuple s’est rebellé et a fait tomber le régime le 30 juin dernier. À ce moment-là, l’armée s’est rangée aux côtés de la population. C’est une erreur de dire -comme il a été dit en Occident- qu’il y a eu un coup d’État militaire. Ce n’est pas vrai. C’est le peuple qui est descendu dans la rue et l’armée l’a soutenu. Car aujourd’hui l’Égypte est en danger. Des forces veulent faire tomber le gouvernement et nous avons besoin d’une personnalité forte comme celle du général de Gaulle après 1945, le Maréchal Sissi. Mais je voudrais aussi ajouter une chose importante. Les Égyptiens ont changé après la révolution de janvier 2011. Le dirigeant qui ne répondra pas aux demandes du peuple ne perdurera pas. Et il n’ y aura plus de dirigeant égyptien qui gouvernera durant 30 ans.
Donc vous êtes optimiste ?
Très optimiste.