Ogossagou est devenu un village fantôme et presque rayé de la carte du Mali : barbarie, exactions et assassinats planifiées imputables aux milices dogons qu’on a pris l’habitude d’appeler par la dénomination traditionnelle donzos ou chasseurs traditionnels regroupés au sein de Dana Amassagou. Cette milice a outrepassé sa mission initiale de défense du terroir selon sa conception originelle et procède désormais quotidiennement au nettoyage ethnique. Sa dissolution, prononcée par le gouvernement, a été entendue par une oreille de sourds puisque leur chef spirituel, soutenu par leurs bras financiers disséminés dans l’administration, a osé défier l’Etat malien qui a fait preuve de dol et de pusillanimité en faisant marche arrière.
L’existence des fosses communes à Ogossagou corroborée par des missions onusiennes prouve à satiété qu’il s’agit d’un crime contre l’humanité perpétré sur la communauté peule puisque les massacres s’inscrivent dans un contexte d’attaque systématique coordonnée. Ce qui s’est passé à Ogossagou est un holocauste, une extermination dirigée contre des peuls, une épuration ethnique tout court. Justice sera-t-elle rendue ? Ou alors les peuls seront-ils astreints à s’unir sur toute l’étendue du Mali pour se défendre car qui veut la paix prépare la guerre ?
On l’a dit et répété, le Mali est devenu un pays insécurisé, une zone à risque où la gouvernance est faible et où il y a l’obligation de reprendre la main au niveau sécuritaire. L’appui financier extérieur de plusieurs milliards par an n’arrive pas à sécuriser un pays versé dans la criminalité avec des réseaux en bande organisée opérant dans des zones de non-droit. Voilà une situation qui profite à Dana Amassagou.
Ogossgou 1 et Ogossagou 2, deux carnages, des exécutions sommaires, un village décimé, des destins brisés à jamais, des enfants égorgés devant leur mère… c’est le comble de l’atrocité. Ici, le seuil de l’intolérance humaine a été franchi sous le regard coupable de l’armée malienne, de la MINUSMA et de la force Barkhane. On se croirait dans un film Hollywoodien, dans un peloton d’exécution, une barbarie digne de James Bond ou dans une mise en scène de décapitation publique d’Ho Chi Minh. Oui, c’est l’épuration ethnique, l’âme humaine a été bafouée et traînée au pied.
On se souvient que le 26 mars dernier, dans la précipitation, le gouvernement, informé de l’invasion contre la communauté peule, a tenu un conseil des ministres extraordinaire, 8 hauts gradés de l’armée sont démis, et surtout un décret est publié ordonnant la dissolution de la milice dogon. Parallèlement, Youssouf Toloba annonçait que le gouvernement ne peut pas dissoudre Dana Amassagou. Voilà un seul homme qui défit l’Etat. Quelle faiblesse ! Quelle inconséquence ! Si ce n’est le Mali, quel gouvernement ramerait à plat – ventre devant une milice dont la propension et le mobile social est de tuer ?
Après enquête, le procureur de Mopti Maouloud Ag Najim a déclaré que cinq des blessés soignés aux hôpitaux de Sévaré et Mopti ont été arrêtés après avoir été désignés comme rescapés ayant fait partie des assaillants identifiés comme des dogons. C’est la preuve que ce sont les dogons qui massacrent les peuls. Le 2 mai 2019, la MINUSMA a conclu après enquête que l’attaque a été planifiée, organisée et coordonnée contre la partie peule et menée par des donzos. L’holocauste continue puisque 21 personnes identifiées comme des peuls ont péri le 14 février tout près dans le même village d’Ogossagou. IBK a fait une sortie publique laconique indiquant qu’une partie des coupables se trouve à Bamako. Enigmatique et surprenant de la part d’un président qui connaît le fautif et qui se refugie dans un silence froid, dubitatif et culpabilisant.
Le directeur du projet Sahel Jean Hervé Jesequel a appelé les autorités à enrayer l’engrenage du nettoyage ethnique et avait averti en son temps.
Le constat est amer aujourd’hui. Quand il s’agit des peuls, c’est le jihadisme, le massacre sans distinction de sexe ou d’âge, mais lorsqu’il s’agit de dogon, on parle d’autodéfense. Le village de Koulongo dans le cercle de Bankass a enregistré 37 morts le 1er janvier 2019.
Actuellement, on recrute dans la population dogon pour fournir en combattants Dana Amassagou, bourreau de la population peule.
Dana Amassagou est une véritable force paramilitaire ayant acquis des armes de guerre au vu et au su des autorités. Ils disent se mobiliser pour les dogons et entend lutter contre l’armée au besoin. C’est l’armée dans l’armée. Décidément, l’Empire dogon est en gestation avec la formation, en prélude, d’une armée Dana Amassagou qui terrorise plus que les jihadistes. Elle constitue la force du mal et conduit l’imposture génocidaire, l’exécution des basses besognes. Certes, le jihadisme doit être combattu mais leurs auteurs ne se sont jamais attaquées aux femmes et aux enfants. La communauté peule est pour Dana Ambassagou ce que les juifs étaient pour Hitler. On a déjà vu des appels au fonds pour le financement de l’association sur les réseaux sociaux, mais des appels à la vengeance organisée par les jeunes. Une mission se rend constamment en Côte d’Ivoire pour récolter des fonds.
Historiquement, les peuls ont toujours subi des violences de la part des dogons, en témoigne le massacre de 16 pasteurs en 2012 lors d’un litige foncier à Sari dans le cercle de Koro. L’armée malienne est indexée de complicité avec les dogons d’assassinat contre la communauté peule.
Des cadres dogons ont trouvé refuge en France parce qu’ils ont peur d’être arrêtés car ils constituent le bras armé et financier des milices dogons.
L’Etat est devenu laxiste, incapable de traduire le décret de dissolution de Dana Amassagou en acte concret. C’est ça l’urgence aujourd’hui. Car Dana Amassagou est une association de malfaiteurs, une association criminelle, les mains tachées de sang. Les peuls ont droit de vie sur la terre des ancêtres. Les dogons ne peuvent pas massacrer une communauté entière, les astreindre à la fuite pour hériter de leur terres et en tirer l’usufruit. Les Peuls veulent se défendre. La complicité de certains cadres de l’armée est mise à nu puisqu’ils soutiennent un acteur non étatique sur la base ethnique.
Correspondance particulière
Le Matinal