L’ONU affiche clairement son pessimisme sur une amélioration à court terme de la situation sécuritaire au Mali face à l’escalade des attaques terroristes durant ce premier trimestre de l’année 2021. « Nous devons nous assurer que des élections libres et équitables se déroulent à temps », a souligné l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield, lors de cette visioconférence du Conseil de sécurité consacrée au dossier malien. “La priorité absolue doit être l’organisation et la tenue d’élections libres et équitables d’ici la fin de la période de transition », « administrée par des autorités électorales compétentes et impartiales afin de publier un calendrier définitif confirmant les dates du processus électoral », a insisté la diplomate américaine à l’ONU.
À Lomé, lors de la réunion du groupe de soutien de la Transition au Mali, le ministre de l’Administration avait laissé fuiter la date du mars 2022 comme jour du scrutin à venir. « L’élection présidentielle, c’est ça qui intéresse tout le monde. Elle aura lieu en principe au mois de mars 2022 », avait annoncé aux médias Zeïni Moulaye, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, en marge de la cérémonie de clôture. Mais depuis, Bamako tarde à confirmer cette nouvelle. Alors que certaines sources laissent entendre que les militaires qui sont obstinément préoccupés par le partage des postes et les privilèges comme si ce putsch était un butin de guerre, peaufine à leur niveau des stratégies afin d’obtenir une prolongation chez les partenaires au regard du temps imparti pour l’organisation de cette élection à date. En principe, si la période de transition est de 18 mois, les autorités de la transition doivent annoncer la date à l’ensemble des partenaires techniques de même que pour la classe politique. Mais aucune date précise, à ce jour, n’a encore été annoncée. Chose qui agace les partenaires du Mali. Et cette sortie des États-Unis illustre à suffisance le mécontentement des uns et des autres sur l’attitude de Bamako.
Le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix, a aussi souligné l’importance d’un processus électoral mené dans les temps. “J’encourage les acteurs politiques maliens à travailler dans un esprit de compromis et à promulguer des réformes visant à créer un environnement propice à des élections pacifiques, inclusives, transparentes et crédibles », a-t-il déclaré. « Ces élections représentent le test décisif de la transition actuelle et une étape nécessaire vers le retour du Mali à la règle constitutionnelle », a-t-il fait valoir. «Nous encourageons les autorités de transition à accélérer les préparatifs en vue des élections de mars 2022″, a aussi dit l’ambassadrice française adjointe à l’ONU, Nathalie Broadhurst. « Il est essentiel que le processus soit accompagné d’un dialogue ouvert et approfondi avec l’ensemble de la classe politique et des représentants de la société civile », a-t-elle fait valoir.
Cependant, à moins de 11 mois de la fin de la transition, que feront les autorités pour organiser un nouveau dialogue sincère et inclusif, revoir le plan de sécurité entre autres afin d’organiser le scrutin sur l’ensemble du territoire national ? Car, à terme, il va falloir que cette élection soit le plus inclusive possible pour éviter les atermoiements. Alors qu’en 6 mois, les militaires, au lieu de travailler à la mise en place de la feuille de route, n’ont réussi qu’à diviser les Maliens avec des prises de décisions impopulaires en leur faveur.
Ayant pris goût du privilège, ces militaires ne sont pas prêts de laisser la main, rien qu’à regarder leurs agissements chaque jour.
La sortie de Washington réclamant un « calendrier électoral définitif, est une véritable désillusion pour les putschistes qui ont pris goût du pouvoir en manipulant le peuple à volonté. Car si la volonté d’une prorogation de la Transition est mise en branle du côté de Kati, cette sortie risque de tout chambouler dans la mesure où les militaires n’ont pas la force financière et militaire sans les partenaires qui peuvent, en cas d’un malentendu, suspendre toutes les aides au Mali sous sérum depuis 2012.
En clair, les États-Unis viennent ainsi de mettre du sable dans le plat des putschistes opportunistes.
Bourama Kéïta
Source: LE COMBAT