Après des contacts menés tous azimuts jusque tard lundi à Ouagadougou pour relancer de difficiles négociations, un accord était espéré dans les prochaines heures entre le pouvoir malien et les rebelles touareg qui occupent Kidal, dans le nord-est du Mali.
Sauf nouveau rebondissement, le projet d’accord soumis par la médiation burkinabè et ses partenaires internationaux devrait être adopté mardi par les deux camps, selon des sources diplomatiques.
« La signature se fera demain (mardi) fort probablement », a déclaré à l’AFP l’une d’elles. « On est optimistes », a avancé une autre source.
Une nouvelle réunion entre les parties est prévue mardi à 10H00 (locales et GMT).
Après une dizaine de jours d’âpres négociations, il s’agit d’entériner un accord sur le retour de l’armée malienne à Kidal en vue de la présidentielle du 28 juillet, une élection jugée cruciale pour sortir le pays de l’ornière.
Djibrill Bassolé, le chef de la diplomatie burkinabè, a eu une nouvelle réunion lundi soir avec les représentants du régime malien et la délégation conjointe touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), a constaté un journaliste de l’AFP.
Les diplomates qui assistent M. Bassolé au nom de la communauté internationale étaient également présents.
Durant toute la journée, les contacts s’étaient multipliés pour sortir les discussions de l’impasse. Le président burkinabè Blaise Compaoré a reçu deux fois son ministre des Affaires étrangères pour faire le point des avancées.
Avant la réunion de lundi soir, un diplomate confiait, résumant l’impatience des médiateurs internationaux: « on espère qu’on aura un dernier et ultime compromis ». « Dans tous les cas, on leur a dit que ce sont les derniers amendements » qui sont actuellement discutés, a-t-il ajouté.
Bamako calme le jeu
De fait, de fortes pressions se sont exercées ces dernières heures sur les deux camps, et spécialement sur la délégation des autorités maliennes qui avait rejeté dimanche soir le dernier projet d’accord, décevant les attentes du Burkina et de ses partenaires.
Mais Tiébilé Dramé, l’émissaire principal de Bamako, s’est employé à calmer le jeu lundi.
« Il n’y a pas de rupture des négociations. Nous sommes toujours présents à Ouagadougou, déterminés à conclure un accord qui sera le prélude au dialogue intermalien », a-t-il déclaré à l’AFP.
Les représentants du pouvoir malien sont « prêts à signer » si leurs « légers amendements » sont pris en compte, a-t-il assuré, refusant de préciser l’objet des amendements proposés.
Selon des sources diplomatiques et la délégation MNLA-HCUA, Bamako avait rejeté dimanche soir le coeur de l’accord, portant sur le calendrier et les modalités de retour de l’armée malienne à Kidal ainsi que sur le cantonnement et le désarmement des rebelles touareg.
Ces derniers jours, les discussions avaient buté notamment sur l’exigence du régime malien de procéder à un désarmement des combattants touareg dans les plus brefs délais.
Devant ce nouveau blocage, des négociateurs s’étaient demandés dimanche soir s’il ne fallait pas « suspendre les discussions », mettant du coup la pression sur les représentants de Bamako.
« Nous sommes dans les meilleures dispositions, nous ne souhaitons pas du tout une suspension des louables efforts de la médiation africaine et internationale », a réagi M. Dramé.
Concernant le retour de l’armée malienne dans la ville de Kidal, berceau des rébellions touareg, une chose semblait au moins acquise: les soldats maliens ne se redéploieront pas seuls, mais seront accompagnés par la future mission onusienne (Minusma) qui absorbera à partir de juillet la force africaine présente au Mali (Misma). Une façon de limiter le risque de confrontation entre les forces belligérantes d’hier.
« Les forces de défense et de sécurité du Mali seront bientôt redéployées à Kidal et dans sa région en tandem avec les forces internationales, comme à Tombouctou et à Gao », les deux autres principales villes du nord du Mali, a confirmé M. Dramé.
Ces négociations excitent aussi les passions au Mali. Une coalition d’ONG, le Forum des organisations de la société civile du Mali (FOSCM), avait appelé à manifester lundi à Bamako contre le projet d’accord élaboré à Ouagadougou.
Mais le rassemblement a été empêché par la police malienne, qui a interpellé 21 personnes. L’état d’urgence en vigueur dans le pays interdit théoriquement toute manifestation pouvant troubler l’ordre public.
Les mouvements armés touareg se sont installés fin janvier à Kidal à la faveur de l’intervention militaire française contre les groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda. Les jihadistes avaient pris en 2012 le contrôle du nord du Mali, s’alliant d’abord au MNLA qui avait lancé l’offensive, avant d’évincer ce mouvement dans la région.