L’information de l’enlèvement, en pleine ville, du Président par intérim du Forum des organisations de la société civile, Aliou Badara Sacko, a fait le tour des réseaux sociaux, le vendredi 14 mars 2025. Cet énième enlèvement d’une personnalité, dont le seul tort est d’émettre des opinions critiques contre des décisions du gouvernement de transition, rallonge la liste noire des personnes qui disparaissent et réapparaissent en toute impunité.
Ibrahim Nabi Togola, Président du Mouvement Nouvelle Vision pour le Mali et Daouda Magassa, un proche de l’Imam Mahmoud Dicko, sont les deniers cas d’enlèvement et de subite réapparition. À la différence des précédents, l’enlèvement d’Aliou Badara Sacko a suscité des réactions.
«Quand allons-nous enfin sortir de cette nuit noire d’atteintes aux libertés publiques ?», s’interroge l’ancien Premier ministre, Moussa Mara, qui réaffirme son «soutien à M. Sacko et à tous ceux qui sont victimes de privations arbitraires de leur liberté ! … Je demande à nos autorités d’œuvrer pour que M. Sacko soit immédiatement libéré et puisse poursuivre ses activités consacrées par la Constitution qu’elles-mêmes ont promulguée. J’insiste sur le fait que de tels actes ne peuvent qu’entamer la cohésion sociale et fragiliser davantage nos institutions»
Par la voix de son Président Modibo Sidibé, «le M5-RFP Mali Kura constate avec amertume la perpétuation des enlèvements extrajudiciaires de citoyens, en violation des dispositions de la constitution et des lois en vigueur. Le M5-RFP Mali Kura exige l’arrêt immédiat de ces pratiques et la libération sans conditions de tous les détenus d’opinion dont Aliou Badra Sacko».
De l’avis de Me Mamadou Ismaïla Konaté, ancien Garde des Sceaux, «cet acte s’apparente à un grave abus de pouvoir et à une violation des garanties constitutionnelles …. Il est de notre devoir, en tant que citoyens épris de justice et de liberté, de dénoncer avec force ces pratiques répressives et d’exiger la libération immédiate de M. Sacko. Nous appelons également à des sanctions exemplaires contre les auteurs et commanditaires de cette atteinte à la dignité humaine, ainsi qu’à la fin définitive des arrestations arbitraires, qui sapent la confiance dans les institutions et mettent en péril les fondements mêmes de la démocratie et de la justice», dénonce l’avocat.
Ce timide réveil d’hommes politiques et de personnalités publiques, en réaction aux atteintes à la liberté et aux droits fondamentaux des citoyens, suscite quelque espoir, malgré l’attitude des autorités judiciaires : pas la moindre annonce d’ouverture d’informations judiciaires de leur part !
Les auteurs de ces pratiques d’autres époques et leurs complices passifs devraient se rappeler que la roue de l’histoire tourne. Ceux qui s’adonnent aujourd’hui à ces enlèvements peuvent être enlevés demain par d’autres. Le faible d’aujourd’hui peut devenir le puissant de demain. Le puissant d’aujourd’hui peut être le faible de demain. Comme aussi, l’oppresseur d’aujourd’hui peut être dans la peau de l’opprimé de demain. Et l’opprimé d’aujourd’hui peut être l’oppresseur de demain. Sachons donc raison garder ! Et refusons de faire la promotion de pratiques arbitraires et illégales.
Par Chiaka Doumbia