Une fois de plus, une fois de trop, notre pays est encore frappé par le terrorisme immonde. Un mois, jour pour jour, avant même qu’on ne finisse d’établir le bilan de Boulkessi et en tirer les leçons, une cinquantaine de nos soldats payent ce vendredi 1er novembre la facture d’une épreuve incompréhensible, la guerre asymétrique où la règle est l’absence de règle, de morale et de logique. À qui la faute, que faire pour arrêter le cycle macabre et insoutenable : attaque, carnage, renfort, condamnation, dénonciation, rééquipement…
Face à la tragédie, le peuple est sous le choc, s’interroge, s’inquiète. Le Malien d’aujourd’hui, contre toute logique, se drape de quelques expertises usurpées, scrute et accuse ! Réduisant la guerre (c’est bien de la guerre à notre pays qu’il s’agit au-delà de l’affirmation honnête du Chef de l’État), à une cogitation licencieuse sur les réseaux sociaux et dans les grins, on développe à scénarios, stratégies, plan d’opération… on instruit à charge contre de boucs émissaires tout désignés ! On dresse l’échafaud… Et d’improvisés procureurs appellent à la barre de l’inquisition :
La France, coupable idéale de tous les péchés d’Israël. L’ancienne puissance coloniale, qui est au Mali comme ailleurs dans le monde pour défendre d’abord ses intérêts et assurer sa sécurité, celle de ses citoyens et leurs intérêts, devient la courte échelle au-dessus de laquelle passent toutes les rancœurs, frustrations et colères orchestrées. Oubliant qu’on a tous applaudi à cette France en janvier 2013, que cette France paye aussi la facture de notre guerre en homme (hommage à Ronan Poiteau qui a succombé ce samedi à ses blessures suite à l’explosion d’un EEI et 30 autres soldats français morts dans notre guerre) et moyens matériels et financiers.
Demanderions-nous à la France de faire toute notre guerre à notre place, de restaurer notre intégrité territoriale, notre souveraineté ? Où est notre fierté de Malien, notre dignité et notre prétention d’être un pays indépendant ? Si nous pouvions, la France ne serait pas là. Avec nos avions cloués au sol, faute d’entretien, si Barkhane s’en va qu’allons-nous devenir ?
Surtout qu’on arrête de se leurrer : si la Russie vient, ce sera pour ses intérêts et non pour une grandeur d’âme. Autrement, la puissante Fédération de Russie, « grand ami du Mali » aurait été à nos côtes quand les hordes djihadistes convergeaient vers Bamako. Six ans après, pourquoi la Russie n’a toujours pas de Casques bleus sur notre territoire, contrairement à la Chine et aux États-Unis d’Amérique ? Ouvrons les yeux et soignons notre naïveté incurable qui frise par moment l’ingratitude !
La Minusma, co-accusée de la France est un des boucs émissaires attitrés de notre faillite. L’inertie de l’indolente force onusienne, due à l’inadéquation de son mandat, est révoltante et répugnante. Le Mali paye au cash l’immaturité diplomatique et l’imprévoyance stratégique de ses dirigeants depuis la transition. Parce que nulle part, les Casques bleus n’ont mené et gagné une guerre pour libérer un pays agressé, annexé et occupé comme le Mali. Le déploiement de la Minusma sous le Chapitre II n’est qu’un antalgique pour soigner un cancer, pour ne pas dire une duperie. Lisez pour en convaincre les articles 41 et 42 relatifs à ce fameux chapitre :
Article 41
Le Conseil de sécurité peut décider quelles mesures n’impliquant pas l’emploi de la force armée doivent être pris pour donner effet à ses décisions, et peut inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Celles-ci peuvent comprendre l’interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques.
Article 42
Si le Conseil de sécurité estime que les mesures prévues à l’Article 41 seraient inadéquates ou qu’elles se sont révélées telles, il peut entreprendre, au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu’il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales. Cette action peut comprendre des démonstrations, des mesures de blocus et d’autres opérations exécutées par des forces aériennes, navales ou terrestres de Membres des Nations Unies.
On ne peut pas compter sur la Minusma pour faire la guerre à notre place. Elle est là pour garantir la paix que nous devons imposer par nous-mêmes. Alors, de grâce, épargnons-là.
Cette guerre est la nôtre, c’est à nous de la faire et de la gagner. Les autres ne peuvent que nous aider, ils ne vont jamais se substituer à nous. Les bambara disent : pour appeler les gens à l’aide pour abattre ton lion, il te faudra toi-même le saisir par la tête ! (aw yen deme ka nga wara faga, o ka a soro a kounkolo de be i yèrè bolo) !
Avons-nous posé les bons diagnostics ? Non, apparemment ! Parce que si ce n’est pas la France et la Minusma, c’est l’Azawad, les rebelles qui sont en connexion avec les terroristes ! Si cette collusion est très souvent dénoncée y compris par les Nations unies et d’autres pays de la sous-région, l’amalgame et la stigmatisation pourraient aussi être un cocktail explosif pour la cohésion nationale.
Sortons de la névrose azawadienne et prenons garde à ramener tout à Kidal. L’Azawad ne se résume pas à Kidal, tous ceux qui se réclament de l’Azwad ne portent pas les armes contre le Mali, ne trichent pas avec le Mali, ne triment pas avec les terroristes. Au contraire, ce sont des combattants de l’Azawad (ceux du MSA, Mouvement pour le salut de l’Azawad) qui sont en premiers venus au secours des Famas à Indelimane. Des soldats maliens qui se réclament de l’Azawad y sont également du nombre des victimes (Ghassim Ag Tazoudene) à côté d’autres Maliens.
Sortons de la névrose azawadienne. Un azawadienne n’a rien de moins qu’un malinké, un Bélédougouka, un Kiguiraké, un Kénédougouka, etc. Ils sont tous Maliens. Laissons chacun brandir son identité comme sa foi au sein de la République et faisons face ensemble à cette guerre pour sauver notre pays.
On ne gagnera pas cette guerre en rejetant notre faillite commune sur les autres et sur certains. Ce n’est pas en accablant le président IBK et sa famille que la donne changera. Ce n’est pas en entrant dans son intimité familiale, en jetant ses enfants à la vindicte populaire qu’on gagnera la guerre, qu’on sauvera le Mali. IBK n’est ni le meilleur ni le pire des présidents que le Mali a connus, de même que ses enfants.
Le crime du locataire de Koulouba est certainement d’être aux commandes d’un pays qui n’a jamais cessé d’être en guerre depuis 2012. Commandant en chef d’une armée à construire sur la durée (au moins 10 ans), le président IBK et sa famille est aujourd’hui la cible de tous les hypocrites et des traitres. Où étions-nous, nous les critiques acerbes au moment où le président IBK appelait au secours pour restaurer la dignité et la souveraineté du Mali en refusant de dialoguer d’égal à égal avec les rebelles ? Où étions-nous lorsqu’il demandait sans être entendu le désarmement des rebelles avant tout dialogue ? Lorsqu’il martelait qu’il n’y aurait ni autonomie ni indépendance ?
Dans les postures changeantes, certains en ces temps-là avaient dénoncé un refus irresponsable du président IBK d’aller au dialogue ! Ils ont applaudi l’inconséquence de son régime suite à la visite de Mara ; et sont restés en marge du processus d’Alger…
Aujourd’hui, leurs anciennes chapelles entonnent l’hymne de la magouille sur les lois de programmation en matière de défense et de sécurité… versent leur bile sur la non-combativité de nos soldats qui fuient à chaque à attaque et qui, comblent de malheur, volent et vendent à l’ennemi le peu d’équipements acquis. Mais où étions-nous quand ses soldats sans armes, sans munitions demandaient notre soutien pour aller la reconquête du nord ? Non merci, c’est pour venir nous tuer à Bamako : France, CEDEAO, Union africaine, ONU… venez avec vos hommes nous protéger.
Ce sont ces officiers, qu’on a hier trahi en ne les soutenant pas pour la levée de l’embargo sur leurs armes qu’on vilipende aujourd’hui et qu’on taxe d’être des officiers de salon ou grosses cylindrées. La guerre n’est pas un bavardage de grin. Le général Powel a gagné la guerre du Golf dans son QG… Arrêtons de blablater sur une matière dont l’expertise et la maitrise n’est pas la chose la plus partagée.
Où étaient ceux qui bavent aujourd’hui sur l’armée malienne lorsque la chorale droit-de-l’hommiste l’accablait quotidiennement et mensongèrement sur de prétendues exactions et les exécutions sommaires de ses membres ? Au lieu d’encourager et d’aider à former nos hommes à combattre, on les a stressé, culpabilisé, démobilisé en agitant devant eux comme une épée de Damoclès la Cour pénal international ! Conséquence : au lieu d’avoir des soldats formés à combattre, à tuer et à vaincre l’ennemi, on a eu des soldats formés à la peur, la peur de tuer, la peur d’être tué.
Quel résultat nous espérions ? On peut continuer à s’improviser expert en stratégie militaire à satiété, mais rien ne changera à la donne si nous ne changeons pas notre propre approche. Aucun pays n’a gagné la guerre sur les réseaux sociaux et dans les grins de causerie.
Soyons clairvoyants, la sauvegarde du pays en dépend.
La rédaction
Source: info-matin