Le vaillant peuple du Burkina Faso, qui a fait partir le tout puissant Président Blaise Compaoré, pour s’inscrire dans la voie de l’alternance démocratique, vient d’être trahi par les autorités de la transition, lesquelles ont accompli un déni de démocratie: l’adoption d’une loi excluant les proches du régime défunt des scrutins d’octobre prochain.
En effet, le projet de loi modifiant le Code électoral a été adopté par 75 voix pour, 10 contre et 3 abstentions. Les députés du Conseil national de transition (CNT), sentant leur faiblesse sur le terrain politique, ont décidé d’exclure du jeu politique les partisans de Blaise Compaoré.
Le texte rend «inéligibles» les personnes ayant «soutenu un changement inconstitutionnel portant atteinte au principe de l’alternance démocratique». En clair, ce sont les responsables de l’ancien système qui sont visés. Il leur est donc interdit de prendre part aux élections présidentielle et législatives du 11 octobre prochain.
Voilà une très grande faute politique, disons démocratique. Comment peut-on empêcher des citoyens libres, égaux en droits et en devoirs, de participer à des consultations électorales? Même ceux qui ont été condamnés ailleurs à des peines d’emprisonnement et à des fortes amendes, n’ont pas perdu leur droit d’éligibilité. Dans le pays des hommes intègres, la vengeance et les rancœurs empêchent le pouvoir de transition d’être lucide.
Ce texte engage ainsi le Burkina Faso, l’un des pays les plus stables de la sous-région, sur la voie de l’instabilité politique. En effet, si, par extraordinaire, le Conseil constitutionnel laissait passer ce déni de démocratie, la real politik obligerait le futur Président à revoir la copie de cette loi inique, qui divise les burkinabè en citoyens de première et seconde zone.
C’est vraiment honteux et injurieux pour la défense des droits de l’homme et des libertés individuelles et collectives. En un mot, c’est un recul démocratique. On ne peut pas combattre un régime pour tentative de tripatouillage constitutionnel et après s’adonner au même jeu, à travers le détricotage de la loi électorale. Que non!
Les responsables de la CDP (ex- parti de Blaise) et tous les burkinabè épris de paix et de justice sociale doivent combattre cette loi, du reste scélérate. Au-delà des frontières du Faso, des voix doivent s’élever pour dire non à cette loi discriminatoire, qui crée l’instabilité au Faso.
Oui, parce que des manifestations auront bel et bien lieu contre ce texte. Même si, par anticipation, des leaders politiques et ancien barons du régime ont été arrêtés, soupçonnés, semble t-il, de préparation de troubles.
Tôt ou tard, des manifestants vont sortir pour réclamer leurs droits constitutionnels, qu’une loi, fût-elle organique, ne peut empêcher par le fait du prince du jour.
La démocratie ne rime pas avec la vengeance et la haine. C’est un comportement qu’on adopte, qu’il pleuve ou qu’il neige. Les principes démocratiques ne changent pas.
Malheureusement, au Burkina Faso, la loi n’est plus impersonnelle. C’est une camisole de force, prise sur mesure. Cela s’appelle un déni démocratique.
Chahana Takiou
SOURCE : 22 Septembre