Dans l’observance des préceptes de l’Islam, la célébration des rites est fondée sur le cycle lunaire dont l’évolution est scrupuleusement suivie dans le milieu des oulémas. L’apparition du croissant lunaire rythme ainsi la vie des communautés musulmanes et marque des périodes essentielles pour le croyant.
Deux lunes font dans ce cycle l’objet d’une vigilance particulière, commandant le début et le terme du jeûne du mois de Ramadan. Les différentes communautés se trouvent ainsi de façon récurrente confrontées à cette question, quitte pour chacune, d’asseoir sa conviction, obéissant en cela aux prescriptions selon lesquelles : « quiconque parmi vous verra poindre le croissant, jeûnera tout le mois » (2:185).
Dans le recueil de hadiths parvenus à la communauté musulmane grâce à Moslim, le Messager, (PSL) recommande notamment de jeûner et «rompez votre jeûne à la vue du croissant. S’il est voilé, complétez le compte jusqu’à trente jours».
Les exégètes rapportent ainsi qu’il suffit, pour confirmer l’entrée de Ramadan, du témoignage de deux ou même d’un seul homme honnête. Selon les oulémas, le Messager avait accepté l’attestation d’un seul. Mais pour la rupture du jeûne, il est exigé le témoignage de deux personnes. Et sur ce point, le Prophète ne s’était pas contenté d’un seul témoin. Les conditions mises pour la rupture sont plus strictes, car selon les théologiens, lorsqu’un seul individu aperçoit le croissant la veille de la rupture normale et que son témoignage est refusé, il doit continuer de jeûner. Un autre hadith recommande au fidèle «de jeûner quand tout le monde jeûne, de rompre quand tout le monde rompt. On célèbre la fête du sacrifice le jour où tout le monde la célèbre». Pour les oulémas, l’unité de la communauté musulmane est essentielle dans ses pratiques.
Afin d’aplanir les interrogations qui surgissent régulièrement, des chercheurs se sont ainsi employés à lever nombre de préjugés sur le croissant. Selon une étude publiée sur la question, il est erroné de croire que la nouvelle lune est plus ténue au soir du 29 ème jour qu’au crépuscule du 30. L’astronome relie cette épaisseur du croissant au circuit elliptique de la lune qui se rapproche ou s’éloigne de la terre selon les périodes de l’année. Pour le chercheur, il est également inconsistant de considérer qu’au terme d’un cycle de 29 jours, le croissant s’escamoterait plus tôt du firmament que s’il s’était agi d’un cycle de 30 jours. Il serait inconvenant de ce fait, de déduire à la vue d’un croissant d’une certaine largeur se maintenant quelques temps au-dessus de l’horizon, que le fidèle se trouve face à une lune de deux jours.
L’étude, étayée de nombreux paramètres astronomiques, renvoie aux hadiths et recommande la concorde au sein des communautés, soulignant que tout le monde musulman ne saurait percevoir le même croissant à la même date sur le calendrier grégorien. Tout comme l’appel du muezzin à la prière de l’aube au Haram ne saurait correspondre au même rite partout ailleurs où vivent des fidèles musulmans. Pour éteindre la polémique sur l’exactitude de la vision du croissant, polémique qui risque de brouiller l’esprit du jeûne et masquer ce pilier de la foi, les oulémas en appellent à la cohésion : « Dieu a su unir étroitement les cœurs des fidèles. Eusses-tu dépensé tous les biens de la terre, tu n’y serais point parvenu ! Dieu seul a réalisé cette union. Il est le Tout-Puissant, le Sage. » (8:63)
A. K. Cissé
Source: Essor