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Discrimination dans la ville de Macina : La justice vit la galère et la préfecture fait la fête

La Justice de Paix à Compétence Etendue de Macina vit toutes les misères du monde. C’est le constat que nous avons fait lors d’une récente visite dans cette localité dont votre fidèle serviteur est originaire.

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La juridiction de Macina figure pourtant parmi les toutes premières du pays. Située à 200 mètres du fleuve Niger, elle semble aujourd’hui habitée par des esprits et des fantômes: sous-bassements troués, bureaux du juge et du greffier en chef sans plafonds, portes et fenêtres rouillées… Pas d’électricité. Pas de robinet. Pas d’ordinateur. Le secrétaire de service, un sexagénaire, passe le plus clair du temps à sommeil devant une table croulante et poussiéreuse. Il a certes un vieil ordinadeur portable mais l’appartient est sa propriété privée. Les décisions du juge sont saisies et imprimées dans le seul Cyber-café de la ville, toute chose dangereuse pour le prestige du magistrat et la confidentialité des délibérations de justice.

Les résidences du juge et du greffier en chef partent elles aussi en ruines. Les ânes, les chèvres, les montons et les vaches y défilent à longueur de journée, comme dans un pâturage azawadien. Il n’est pas rare de voir le juge, monsieur Dicko, armé d’un bâton pàour faire place nette dans sa cour. Ni à son bureau, ni à sa résidence, le juge de paix ne dispose d’un garde chargé de le protéger. On peut déviner son indépendance quand il lui faudra juger des bandits armés !

Si le juge et le greffier n’ont pas assez de dossiers à traiter, ils ont, en revanche, une foule de co-locataires : des chauves-souris, que les scientifiques considèrent, par les temps qui courent, comme des réservoirs du virus Ebola. Un nouveau bâtiment destiné à servir de nouveau siège au tribunal a vu sa construction débuter il y a deux ans : sa construction est aujourd’hui abandonnée et l’édifice, abandonné à lui-même, menace pourtant de s’effondrer.

Maison d’arrêt en lambeaux

Quant à la maison d’arrêtde Macina, ses pensionnaires pourraient s’évader à tout instant, pour peu qu’ils en aient l’envie. Pas de mur d’enceinte digne de ce nom, des cellules en banco. D’ailleurs, l’an dernier, deux prisonniers qui voulaient leur liberté ont quitté les lieux sans être inquiétés le moins du monde. Curieusement, aucun ordre ne vient de Bamako pour mettre en service le nouveau bâtiment qui doit servir de nouvelle Maison d’Arrêt.

La brigade territoriale de gendarmerie de Macina n’est pas meilleure que les bureaux du juge et du greffier en chef. Aucun gendarme local ne possède la moindre moto de service. De quoi réjouir au plus haut point d’éventuels brigands ou bandits de grand chemin. Pour aller chercher des malfrats dans les localités voisines de Macina, le juge ou le chef de brigade est obligé de réquisitionner les véhicules de santé ou de la préfecture. Même là, il manque du carburant pour faire rouler la machine. Il arrive aussi que les autorités de santé ou de la préfecture rejettent la demande de réquisition. L’acheminement des prisonniers se fait à pied vers le tribunal.

Le préfet bien gâté

Paradoxalement, le préfet de Macina et son adjoint vivent sur un pied de roi. Chacun d’eux a un bureau climatisé, un véhicule de service tout terrain et une résidence de pacha. Comme s’il ne s’agissait pas du même pays ou que l’administration territoriale valait mieux que la justice !

Un reportage d’Abdoulaye Koné

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