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Dieudonné: portrait d’un provocateur

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L’« affaire Dieudonné » est une nouvelle affaire d’Etat. Le gouvernement a fait intervenir le Conseil d’Etat pour maintenir l’interdiction du spectacle de l’humoriste.

Avec l’entrée en scène du Conseil d’Etat, l’affaire Dieudonné prend une ampleur inattendue. La plus haute juridiction administrative a annulé, jeudi 9 janvier, la décision du tribunal administratif de Nantes levant l’interdiction préfectorale qui pesait sur le spectacle de l’humoriste prévu dans la soirée au Zénith de Nantes. « Le Mur » avait été initialement interdit par le préfet du département sur instruction du gouvernement qui accusait l’humoriste d’avoir proféré des propos antisémites lors des représentations à Paris de son spectacle.

Ce n’est pas la première fois qu’un spectacle de Dieudonné fait l’objet de plaintes pour antisémitisme. L’humoriste a régulièrement défrayé la chronique depuis le début des années 2000 pour avoir tenu des propos inadmissibles lors des représentations données dans son théâtre de la Main d’Or. Si l’homme a obtenu systématiquement devant les tribunaux l’annulation des arrêtés d’interdiction de ses spectacles au nom de la liberté d’expression et de réunion, il a quand même été condamné une fois pour diffamation, injure et provocation à la haine et à la discrimination raciale.

Antisioniste sulfureux

Avec son nouveau spectacle, Dieudonné a créé de nouveau le buzz. En décembre dernier, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls s’était personnellement ému des « propos racistes et antisémites » tenus par le polémiste contre un animateur radio célèbre et avait annoncé vouloir étudier toutes les voies juridiques permettant d’interdire les prises de parole publique de Dieudonné. En faisant interdire le spectacle incriminé par le Conseil d’Etat, le gouvernement socialiste fait preuve de fermeté et de cohérence. On parle aussi de la fermeture de son théâtre la Main d’Or.

Or, avant d’être un antisioniste sulfureux, Dieudonné a été un humoriste talentueux qui avait fait du racisme, toutes les formes de racisme, sa cible privilégiée. Il s’est fait connaître en travaillant avec Elie Semoun, un comique de sa génération. L’un est Noir et l’autre juif. Ils ont formé l’un des premiers grands duos comiques français. A travers leurs sketchs parfois grinçants mais souvent brillants, ils dénonçaient les tares de la société, s’inscrivant ainsi dans la grande tradition humoristique française qui n’épargne personne. Le légendaire Pierre Desproges faisait écrouler de rire son public en déclamant sur scène avec le plus grand sérieux que les juifs s’étaient montrés hostiles au régime nazi pendant la Seconde Guerre mondiale. Ou l’impérial Coluche qui lançait pendant un show à la télé que Jésus était juif parce qu’il « avait vécu trente-trois ans chez sa mère » !

Laurel et Hardy multiculturels

Né d’une mère bretonne et d’un père camerounais, Dieudonné Mbala Mbala a grandi dans la banlieue parisienne. Attiré très tôt par la scène et plus particulièrement par la scène comique, il se lie d’amitié avec son camarade de lycée Elie Semoun. Ensemble, ils produisent des spectacles joyeux et caustiques dans des cafés et des restaurants de la capitale. Dieudonné exerce parallèlement le métier de vendeur de voitures, jusqu’au moment où leurs parodies et jeux de rôles très convaincants persuadent un producteur de leur donner la chance de leur vie. Leur premier spectacle professionnel date de 1991. Dieudonné et Semoun travailleront ensemble pendant six ans avec la plus grande complicité. Leurs numéros comiques connaîtront un succès populaire certain, inspirant des comparaisons élogieuses. Les critiques voyaient en eux une version multiculturelle et postcoloniale des comédies à la Laurel et Hardy.

Malheureusement, le duo se sépare en 1997 à cause de différends artistiques et, semble-t-il, aussi financiers. Depuis, si Dieudonné a diversifié ses performances, faisant des percées remarquées dans le cinéma, ses textes comiques ont perdu en subtilités et complexités et franchissent régulièrement la ligne, disent les critiques. D’aucuns estiment que ses spectacles oscillent désormais entre la haine et la rage. Son premier dérapage date de 2002 : lors d’un sketch sur France 3, il conclut ses propos en lançant un tonitruant « IsraHeil ». En même temps, paraissent coup sur coup deux interviews où Dieudonné déclare préférer « le charisme de Ben Laden à celui de George Bush ». Des déclarations à l’emporte-pièce qui choquent. De surenchère à surenchère, ciblant systématiquement les juifs, le comédien s’enfonce progressivement dans des discours obsessionnels et monomaniaques.

Dans une interview parue dans le New Yorker et consacré à l’affaire Dieudonné, Pierre-André Taguieff, un spécialiste français sur le racisme, explique que « Dieudonné est un provocateur né et la provocation est sa raison d’être ». Pour l’intéressé lui-même, son obsession s’explique par la mission qui est la sienne : « Je suis le fou du roi, aime-t-il répéter. Le fou est celui qui met le doigt sur un certain nombre de vérités que la cour du roi ne veut guère écouter ».

rfi

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