Créé en mars 2016, l’association Dogon vision se bat à bras le corps pour le développement du pays Dogon. Pour en savoir davantage sur l’association, nous avons rencontré son Président Adama Diongo. Il nous a tout dit sur son association, ses rôles, actions menées et les projets pour le futur …
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Le Pays : Veuillez-vous présenter à nos lecteurs
Adama Diongo : Je me nomme Adama Diongo, président de l’association ‘’Dogon Vision’’. Je suis aussi le président du festival international de la caricature de Bamako.
Depuis quand l’association a été créée ? Quels sont ses objectifs ?
Elle a été créée en mars 2016 suite à un constat. Nous, jeunes ressortissants du Pays Dogon, avons remarqué que les quatre cercles marchent de façon séparée alors qu’ils ont pratiquement les mêmes populations et les mêmes difficultés dont les solutions devraient être les mêmes. L’association s’est fixée comme objectif : unir toutes les forces vives du Pays Dogon autour d’un objectif de développement intégré et durable. Pour cela, il nous faut une stratégie et pour l’avoir, il faut faire asseoir tout le monde pour échanger sur les problèmes majeurs et ce qui peut être des solutions. Nous préparons d’ailleurs un grand forum dans ce cadre où nous allons inviter tout le monde, jeunes, femmes, les autorités traditionnelles et religieuses et surtout les élus du Pays Dogon. Au cours de ce forum, nous allons travailler sur une stratégie globale du développement du pays Dogon.
Quelles sont les actions que vous avez menées depuis la création de l’association ?
Notre première action après la création de l’association a été la visite du Pays Dogon. Nous avons créé une grande mission qui a scionné les 68 communes du pays Dogon. Nous avons recensé les vrais problèmes, les besoins réels avant de revenir faire une stratégie là-dessus. A notre retour à Bamako, nous avons réuni les associations de développement de tous les quatre cercles. Nous avons fait quatre rencontres du genre. Tout le monde était convaincu qu’il faut réunir les forces. Cela est même le plus grand acquis de l’association. Une autre de nos actions, nous avons rendu hommage à la grande cantatrice Dogon, Kadidia Goro dit Kadia Lélé. En mars 2017, nous avons organisé une nuit d’hommage à elle au palais de la culture. Nous avions aussi organisé une assemblée à laquelle ont pris part toutes les associations des peulhs, Bozos… pour parler de la paix et le développement au Pays Dogon. Pour nous, il n’y a jamais de développement sans paix et vice versa. C’est au cours de cette assemblée que nous avons vu venir tout ce que nous voyons aujourd’hui et nous avions même alerté les autorités à travers une correspondance adressée au premier ministre et au président de la République. Dans ces derniers jours, nous sommes en train d’élargir l’association partout à travers le monde. L’association existe actuellement à Abidjan. Le 08 avril passé, elle a organisé un grand rassemblement. A la date d’aujourd’hui, nous avons un point focal dans chacun des quatre cercles ( Bandiagara,Bankass,Douentza et Koro).
Que comptez-vous faire dans les jours à venir ?
Je rappelle que nous nous sommes donnés un programme de 10 ans. Qu’est-ce que nous devons faire d’ici 2028 pour que le Pays Dogon puisse sortir de ce sous-développement ? Nous avons pensé que la première chose qu’il faut, c’est de se donner une stratégie de développement. Pour cela, nous sommes en train de prévoir deux types de rencontres dans les prochains mois. La première va réunir tous les porte-voix (chefs traditionnels, coutumiers et religieux) au niveau du Pays Dogon à Kani Bonzon pour discuter des chemins à emprunter pour le développement de la zone. La deuxième sera un forum qui fera l’état de lieu de tous les processus de développement du Pays Dogon. Les recommandations de ce forum de paix et de développement du Pays Dogon seront soumises aux hautes autorités afin qu’elles valident. Nous allons les demander d’intégrer ces recommandations dans le plan national de développement. L’association va aussi demander à l’Etat de l’aider à organiser une conférence internationale sur le Pays Dogon. Nous allons réunir ici à Bamako tous ceux qui aiment le Pays Dogon (ceux qui l’avaient visité et veulent le faire dans les jours à venir), afin de les présenter le plan de développement validé par l’Etat et demander à ce que les amis du Pays Dogon puissent nous trouver des bailleurs pour financer ce plan spécial de développement. Nous voulons aussi aller vers la figuration de toutes les associations du Pays Dogon pour qu’il ait un porte-voix. Dans le cadre de la cohabitation et de la réconciliation, nous allons demander aux autorités à réinstaurer un certain nombre de mécanisme traditionnel de résolution des conflits. Nous allons aussi nous battre pour les questions d’eau au Pays Dogon. Nous avons recensé 680 points d’eau au Pays Dogon qui sont en panne. Il faut que ce problème d’eau soit réglé rapidement parce que sans eau il n’y a pas de vie. Un programme a déjà été élaboré dans ce sens et on attend du soutien.
Quel est votre rapport avec les cadres du Pays Dogon ?
Nos rapports ne sont ni tendus ni heureux. Nous pensons que nos cadres sont en déphasage avec la réalité du Pays Dogon. Je pense même que c’est ce qui explique notre retard Parce que pour que l’autorité puisse prendre une décision, il faut qu’elle reçoive de vous des informations réelles. Quelques-uns parmi eux nous ont compris mais d’autres non. Nous les invitons à nous comprendre et nous accompagner.
Le Pays Dogon est victime du conflit intercommunautaire. Quel rôle votre association a-t-elle joué ?
C’est vraiment malheureux de voir ces deux ethnies frères en conflit. Je pense que la grosse faute, c’est à nous les organisations de la société civile, les cadres et même les autorités. Je pense qu’il n’y a jamais eu des actions de prévention de ces conflits. Quand cette histoire a commencé, nous avons fait beaucoup de propositions. Nous avions proposé qu’au lieu des missions de réconciliation, il faut que les organisations de la société civile et l’Etat mettent en place une commission d’investigation pour savoir les vraies raisons de ces conflits. Cette commission doit faire un rapport dont l’application sera prise en charge par l’Etat. Il est temps qu’on change les démarches de négociation.
Réalisée par Boureima Guindo
Source: Le Pays