Quand vous êtes du pays qui a vu naître Amadou Hampâté BA, vous avez une relation particulière avec la sagesse authentique. Cet attribut de sage a une signification particulière. Quand vous êtes du pays qui a vu dame Manassa Danioko à l’œuvre, vous êtes, aussi, en droit de douter de votre amour de la sagesse.
Loin d’un pamphlet sur la Présidente de la Cour Constitutionnelle, qui depuis son élection en mars à la tête de cette institution, n’a jamais rendu d’arrêt sans polémique majeure, cet édito se veut une fenêtre sur le dysfonctionnement de la machine électorale dans notre pays et donc sur le discrédit qu’elle jette sur tous les acquis démocratiques.
Pour schématiser, l’administration territoriale, Maître d’œuvre de ce chantier électoral, a donné des résultats provisoires, qui, comme beaucoup s’y attendait, ont été « sauvagement » désavoués par la Cour Constitutionnelle. En effet, en 2020 au Mali, il est devenu commun d’annuler, non pas des bureaux de vote pour irrégularités, mais des centres entiers de vote voire dans des communes entières.
Il existe un écart monstre entre les résultats de l’administration des élections au Mali et ceux de la Cour Constitutionnelle. Cet écart a permis au parti de la majorité de gagner environ 11 sièges après révision de la Cour Constitutionnelle.
Cette situation, justifiée par de nombreux « Considérant » de l’arrêt 2020-04/CC-EL du 30 avril 2020, pointe du doigt deux probabilités dont l’une est forcément la bonne.
La première serait que l’Administration territoriale, malgré près de 30 ans de pratique démocratique dans notre pays, n’a pas encore acquis la maturité et la sagesse requise pour une parfaite (si tant est que la perfection est de ce monde) organisation des élections nationales et locales. Ce qui serait un paradoxe quand on se fie au budget, toujours, en augmentation de l’organisation de ces élections. Ce serait encore un paradoxe, quand on sait l’avancée technologique dans le monde et dans notre pays, qui devrait permettre une meilleure maîtrise du maillage territorial. Ce serait, enfin, un paradoxe quand on voit l’implication des partenaires techniques et financiers dans la tenue de ces élections au Mali. L’auteur a dit : « Les paradoxes-vérités ont une certaine clarté charmante et bizarre qui illumine les esprits justes et qui égare les esprits faux. ».
La deuxième probabilité, qui pourrait à son tour justifier cet écart, incroyable parfois, entre les résultats de l’administration en charge des élections et la Cour Constitutionnelle, serait qu’il y’a une volonté manifeste de tripatouiller les chiffres. Sinon, comment comprendre, qu’avec moins de moyens que l’administration territoriale, avec moins de temps de comptage et de vérification, la Cour Constitutionnelle arrive à circonscrire la fraude dans les bureaux, les centres et mêmes les communes entières ? Cette probabilité met en cause à la fois les partis politiques sur le terrain, les relais de l’administration territoriale, le peuple qui vote et surtout les Sages de la Cour Constitutionnelle.
Dans le pays de Tierno Bocar, le Sage de Bandiagara, osons espérer que la fraude ne fasse pas partie de nos codes de construction de la démocratie. D’ici la prochaine élection, à moins d’un quatrième tour de Dame Manassa Danioko, croyons avec les philosophes qu’ « avec l’âge vient la sagesse ».