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Déception, urgence et incertitudes après le retrait de la CAN 2019 au Cameroun

Après des mois de polémiques et des dernières longues heures de pourparlers, la Confédération africaine de football (CAF) a décidé que la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations 2019 n’aura pas lieu au Cameroun.

Un choix qui heurte au pays des Lions indomptables et qui soulève moult interrogations, dont une majeure : qui organisera le prochain rendez-vous continental ?

Le Comité exécutif (ComEx) de la Confédération africaine de football (CAF) a rendu sa décision ce vendredi 30 novembre en fin de journée depuis Accra, au Ghana, pays-hôte de la Coupe d’Afrique des nations féminine 2018. La prochaine édition réservée aux hommes, qui doit avoir lieu du 15 juin au 13 juillet 2019, n’aura pas lieu au Cameroun.

Pour la CAF, le Cameroun n’est pas assez préparé

Dans son histoire, le Cameroun n’a organisé la CAN qu’une fois, en 1972. En septembre 2014, le ComEx désignait le pays des Lions indomptables comme pays-hôte de cette édition 2019 particulière : ce sera la première à se dérouler durant l’été et à réunir non pas 16 mais 24 équipes. Pourtant, la nation présidée par Paul Biya n’accueillera pas le grand événement continental. Ahmad, le président de la CAF, l’a annoncé lui-même.

Pour justifier cette décision, la CAF avance le manque d’organisation du Cameroun. Dans un long communiqué, l’instance affirme notamment que « les conditions de conformité n’ont pas été respectées » et qu’il y a un « écart existant entre les exigences et obligations du cahier des charges de la CAN et la réalité du terrain ». La CAF indique aussi, entre autres, avoir « entendu les conclusions des membres de la mission sécurité lors de sa toute dernière visite ». Et finalement, « la prochaine édition de la CAN 2019 ne peut se tenir au Cameroun ». Une décision qui est « sans appel », précise le communiqué. Dans une allocution, le président Ahmad rappelle que sa priorité est « de préserver l’intérêt de nos acteur et surtout nos joueurs », et que « beaucoup ont été blessés lors des CAN pour des raisons de conditions d’organisation ».

Je suis déçue, complètement déçue, je sais même quoi dire, on attendait cette CAN dans notre pays, on était tellement émerveillés

La CAN 2021 au Cameroun plutôt qu’en Côte d’Ivoire ? « A vous de voir », répond Ahmad

Le président Ahmad a soufflé le chaud et le froid concernant l’avenir du Cameroun et de la CAN. Dans son communiqué, la CAF « salue les efforts du Cameroun pour la conduite des projets infrastructurels en cours » et encourage le pays à « poursuivre dans cette voie pour une reconquête de son statut d’organisateur ». Dès 2021 ? Pour rappel, l’édition 2021 est censée être organisée par la Côte d’Ivoire, et que celle de 2023 a été confiée à la Guinée.

Mais le président Ahmad a laissé planer le doute : et si le Cameroun, privé de la CAN 2019, se voyait finalement octroyé l’organisation de la CAN 2021 ? Face à la presse, le Malgache a répété que « la CAF prend un engagement de soutenir le Cameroun, de donner du temps pour qu’il puisse  bien préparer une CAN ». Et quand un journaliste lui a demandé si cela signifiait que la CAN 2021 irait au Cameroun, Ahmad a rétorqué : « A vous de voir ».

Jean-Paul Akono: « Nous sommes vraiment dans la honte »

Toujours est-il que cette décision, bien qu’attendue, mine le moral des Camerounais. Jean-Paul Akono, l’ancien entraîneur des Lions indomptables, médaillé d’or aux Jeux olympiques 2000 avec Samuel Eto’o, Patrick M’Boma, Geremi Njitap et les autres, n’a pas caché son amertume au micro de RFI. Interrogé par Joël Wadem, l’ex-sélectionneur a confié : « C’est une déception totale, une frustration personnelle, comme pour l’immense majorité des Camerounais. (…) Nous retirer cette organisation, c’est comme cette CAN 1972, lorsque nous avons perdu en demi-finale contre le Congo-Brazzaville. C’est comme si ce le ciel s’abattait pour la deuxième fois sur toute une nation. Nous sommes vraiment dans la honte. Nous avons été traînés dans la boue. » Le gouvernement camerounais a prévu de s’exprimer dans la journée du samedi 1er décembre.

Le fait que cette CAN ait été attribuée au Cameroun depuis plusieurs années et qu’on voit surtout les autorités camerounaises travailler d’arrache-pied depuis peu de temps est symptomatique de la gestion de l’Etat stationnaire camerounais. Il y a un autre phénomène pour lequel on peut être un peu plus indulgent et que les Camerounais ne pouvaient pas prévoir : la crise sécuritaire qui frappe le nord-ouest et le sud-ouest et qui a aussi pesé dans la décision de la CAF

Pour Fred Eboko, directeur de recherche à l’IRD, cette décision de la CAF est révélatrice du fonctionnement même du régime camerounais 01/12/2018 – par Marie-Pierre Olphand

L’Afrique du Sud et le Maroc parmi les rares candidats ?

La CAF indique qu’un cabinet va être recruté et qu’un « appel urgent à de nouvelles candidatures de pays » est lancé. Et tout devrait aller vite. La CAF le promet : elle va « s’assurer qu’un nouveau pays-hôte soit trouvé d’ici le 31 décembre ». Ahmad « sait qu’il n’y en aura pas beaucoup » toutefois. Quelques nations sont déjà évoquées, bien qu’aucune, hormis l’Egypte (voir plus bas), n’ait encore annoncé ses intentions.

D’après nos informations et celles colportées dans la presse, l’Afrique du Sud serait intéressée. Le pays dispose des stades et de l’expérience ; c’est la seule nation africaine à avoir organisé une Coupe du monde, en 2010. Pour ce Mondial, elle dut se doter de dix stades aux normes internationales. Le Maroc serait aussi sur les rangs, quelques mois après avoir vu l’organisation du Mondial 2026 lui passer sous le nez au profit du trio américain Etats-Unis/Mexique/Canada. L’Afrique du Sud a déjà organisé deux CAN, à chaque fois en tant que pays-remplaçant. En 1996, la « nation arc-en-ciel » prit la relève du Kenya, dans l’incapacité de tenir son rôle. Et en 2013, l’Afrique du Sud remplaça la Libye, en pleine guerre civile. Le Maroc, lui, a organisé la CAN 1988. Il devait aussi se charger de l’édition 2015, mais il y renonça, officiellement par crainte du virus Ebola.

Le Maroc était prêt à organiser la Coupe d’Afrique en 2015, mais on a refusé à cause du virus Ebola. Mais on est prêt, on a toute les infrastructures, les hôtels, les grands stades, etc.

L’Egypte, candidate ou soutien du Maroc ?

Un troisième pays pourrait briguer l’organisation de la CAN 2019: l’Egypte, qui partage avec le Ghana le record d’accueil de la compétition (quatre fois, en 1959 conjointement avec la Syrie, en 1974, en 1986 et en 2006). Mais la position du pays n’est pas claire pour l’heure. Deux versions différentes se sont fait entendre ce vendredi. Au micro de RFI, Oussama Ismaïl, porte-parole de la Fédération égyptienne de football, a déclaré : « Nous sommes intéressés par l’opportunité d’organiser la Coupe d’Afrique des Nations. Nous n’allons pas dire non. L’Egypte est toujours prête à accueillir ce genre d’événements. Nos stades militaires et civils pourront accueillir de fortes affluences de supporters en toute sécurité. »

Mais dans le même temps, Magdi Abdel Ghani, membre du conseil d’administration de la Fédération, a confié, selon son responsable presse cité par l’AFP: « L’Égypte ne présentera pas de dossier de candidature et estime qu’il y a un consensus pour que le Maroc accueille la compétition. » L’Union nord-africaine de football (UNAF) serait, en effet, derrière le royaume marocain pour cette CAN 2019.

RFI

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