L’Association culturelle « Acte Sept », en collaboration avec le Centre culturel Sénoufo de Sikasso, a organisé un Café Littéraire et Artistique, le samedi 25 septembre 2021, à son siège sis au quartier Hamdallaye ACI 2000 de Bamako. Deux invités animaient ce Café Littéraire. Il s’agit de l’écrivain Yaya Elie Bamba qui a développé le livre intitulé « Les KOREDUGAW en milieu Sénoufo» et de l’écrivain Edouard Coulibaly qui a présenté le livre « Rites Agraires en milieu Senoufo, y compris le Ciwara ». La modération des débats était assurée par Madou Diakité du Centre culturel Sénoufo de Sikasso, en présence de Daouda Cissé de l’Association culturelle « Acte Sept » et de plusieurs autres personnalités.
Dans son exposé, l’écrivain Yaya Elie Bamba, membre du Centre culturel Sénoufo de Sikasso, a fait savoir que le « Kôrèduga » est une personne qui a la ceinture autour des reins, toujours disposé à servir l’intérêt de la société. « Compte tenu de leur importance, les Kôrèdugaw ont été inscrits comme un bien du patrimoine mondial de l’UNESCO», a-t-il dit. Selon lui, le Kôrèduga s’habille en haillons, c’est-à-dire avec des habits déchirés, rapiécés. Cet habillement bizarre, ajoute-il, est signe d’humilité et de simplicité en toute chose devant la vie et la mort. « De la manière dont il s’habille, de cette même manière il mange. Il peut mélanger plusieurs types de nourriture et les manger à satiété : Exemple : mélanger la farine sucrée au lait, le riz au gras, le to au gombo et le couscous, il peut mélanger tout cela et les manger ensemble. Il a un langage particulier. Chez lui, tout tourne à l’envers. Exemple : Pour dire « j’ai faim, il dira je suis rassasié ». Le kôrèduga joue à la comédie pour distraire. Il intervient comme régulateur amiable dans les conflits intercommunautaires et interpersonnels (Exemple : Supposons qu’un conflit de terre oppose deux personnes, le litige peut être porté devant le chef de village ou le chef de terre. Si celui-ci ne parvient pas à le solutionner, il fait appel aux kôrèdugaw) », a souligné l’écrivain Yaya Elie Bamba. Pour lui, le Kôrèduga peut transformer la tristesse en joie à travers l’animation. Selon l’auteur Bamba, le Kôrèduga est un médiateur, un éducateur, un thérapeute. Pour preuve, il dira que le Kôrèduga détient en général trois types de poudres médicinales : Une poudre noire qui lui permet de lutter contre l’ensorcellement, l’empoisonnement ; une poudre rouge qui lui permet de détecter les nourritures ensorcelées ou empoisonnées, et une poudre blanche qui lui permet de manger seul la ration de plusieurs personnes. « Le kôrèduga éduque et forme les enfants à mieux affronter les exigences de la vie, à réussir dans la vie, à réussir leur vie. Chaque kôrèduga porte un nom d’initiation qui détermine son caractère ou son rôle dans la société. Exemple : Kuluyaangi : Nom donné au chef coutumier, le détenteur du couteau, qui veille à ce que la terre ne soit pas souillée. C’est lui qui répare la terre à l’aide de sacrifices appropriés », a-t-il dit. Selon lui, l’adhésion au « Kôrèdugaya » peut être volontaire, héréditaire ou par décision des Esprits. A ses dires, l’exercice du kôrèdugaya requiert une certaine formation, une certaine initiation à défaut de laquelle vous n’exercez votre kôrèdugaya que de nom. Parlant de l’origine du mouvement korèduga, Yaya Elie Bamako a indiqué qu’une légende rapporte que deux frères se bagarraient. Le troisième qui était le plus jeune et le plus faible, ne sachant pas comment mettre fin à la bagarre, s’est mis à sautiller avec ses habits déchires tout autour des antagonistes au point qu’il a fini par attirer leur attention sur lui, ce qui a ainsi mis fin à la bagarre.
Le second conférencier, Edouard Coulibaly, a présenté le livre «Rites Agraires en milieu Senoufo, y compris le Ciwara ». Selon lui, le Ciwara qui est un rite agraire, encourage la jeunesse lors des travaux champêtres.
Répondant aux questions des uns et des autres, le conférencier, Yaya Elie Bamba a fait savoir que les KOREDUGAW doivent être impliqués dans tous les domaines de la vie sociale du pays. « On doit aussi sensibiliser la population sur l’importance du Kôrèduga à travers les masses medias. Si cela est fait, ils contribueront à la stabilité du Mali. Chacun doit se mettre en tête qu’il est un régulateur de la société. Les KOREDUGAW font partie des mécanismes endogènes de prévention de conflit. Le Kôrèduga est un grand connaisseur », expliquent les conférenciers. Par ailleurs, Yaya Elie Bamba a invité les griots à compléter les KOREDUGAW dans la lutte pour la cohésion sociale au Mali.
Aguibou Sogodogo
Source: Républicain