Il ne serait nullement exagéré de qualifier la situation qui prévaut au Mali d’alarmante, tant la confusion est totale et les solutions tardent à venir. Si, sur le plan sécuritaire, le front du nord et celui du centre connaissent, ce dernier temps, une baisse de violence, ils ne semblent toujours pas se pacifier. Quant au front social, il est caractérisé par la grève de 240 heures des enseignants et un préavis de grève de l’UNTM. Au même moment, le gouvernement ouvre le front de la révision constitutionnelle. Pourra-t-il faire face à tous ces fronts en même temps ?
IBK et son PM ne dorment plus que d’un œil, tant il y a péril en la demeure et le temps n’est pas leur meilleur allié. Ils ont sur la table trois questions cruciales et toutes sont urgentes, à savoir la résolution de la crise socio-sécuritaire, les réformes institutionnelles et la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Le constat est qu’aucune n’a connu une solution pérenne. Il y a eu certes des tentatives, mais elles n’ont, pour le moment pas donné les résultats escomptés.
Sur le plan sécuritaire, malgré la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, les régions du nord sont toujours en proie au terrorisme et au banditisme transfrontalier. Au centre également, en dépit de la montée en puissance des forces de défense et de sécurité du Mali et de l’impressionnante présence des forces de la MINUSMA et de Barkhane, les massacres continuent. Alors que les sudistes s’angoissaient pour les populations du nord et du centre, aujourd’hui la peur semble s’emparer d’eux aussi avec trois assassinats ciblés en un mois d’intervalle. Il s’agit de deux commerçants Kalilou Coulibaly dit Baba et Oumar Touré, et d’un leader religieux Abdoul Aziz Yattabaré.
Sur le plan social, les travailleurs de tous les secteurs sont désormais sur un pied de guerre. Ils demandent une amélioration de leurs conditions de vie et de travail. L’UNTM, la principale centrale syndicale qui a observé une grève de 72 heures, n’entend pas lâcher du lest d’où un autre préavis sur la table du gouvernement. Selon nos informations, le gouvernement, après avoir reconnu une négligence dans la gestion de la grève précédente, a diligemment engagé les négociations avec l’UNTM. Les enseignants n’ont pas eu cette chance. Après 48 heures de négociations infructueuses, ils sont allés en grève de 240 heures, soit 10 jours ouvrables.
Les réformes institutionnelles
S’il est un impératif absolu de réviser la Constitution pour être en phase avec l’évolution de la société et pouvoir mettre en œuvre l’Accord, cette révision ne doit pas être faite à n’importe quel prix. Le comité d’experts mis en place à cet effet fait déjà l’objet de critiques tout comme son décret de nomination. Le gouvernement doit chercher l’inclusivité pour éviter le scénario de 2017 avec An Tè A Bana. Il doit comprendre que sans cette révision, la mise en œuvre de l’Accord serait impossible.
En somme, pour juguler la crise multiforme que connait actuellement le Mali, il faut une large union. Le premier round d’une telle retrouvaille doit être la mise en place d’un gouvernement de large ouverture comprenant toutes les sensibilités sociopolitiques. Le deuxième round serait la prise des décisions drastiques pour changer la gouvernance, en mettant fin à la corruption et le troisième round devrait être la résolution des crises socio-sécuritaires.
Youssouf Sissoko
Inf@sept