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Cour d’assises : Après avoir dérobé une arme à feu : Trois étudiants toxicomanes tuent un gendarme pour vendre sa moto

Démarrée le 7 août 2017, la Cour d’assises de Bamako continue ses travaux. Les jugements du lundi 21 aout 2017 concernaient des cas d’homicide volontaire, vol qualifié, usage d’arme à feu ; assassinat et complicité d’assassinat, détention illégale d’arme à feu ; coups mortels et pédophilie.

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 La première affaire jugée  lundi dernier concernait trois étudiants toxicomanes (Moussa Kanté, Daouda Coulibaly et Aboubacar Sangaré) accusés de détention illégale d’arme à feu, d’homicide volontaire, vol à main armée, vol qualifié ; vol d’arme, vol qualifié, complicité d’homicide volontaire ; détention d’arme, vol d’arme, complicité de vol à main armée et d’homicide sur la personne du gendarme Mahamane Sissoko. Ces trois compères étaient devant la Cour pour se défendre des accusations portées sur à eux. Un procès fleuve qui a duré plus de 4 heures de temps.

Les faits

Selon les explications, les trois étudiants qui devaient passer leur examen le 8 août ont passé la nuit du 7 au 8 août 2014 à fumer de la drogue.  Mais les trois toxicomanes n’étaient pas satisfaits de la dose fumée.  Et comme ils n’avaient plus d’argent pour s’acheter de la drogue, Aboubacar Sangaré proposa au groupe d’aller voler le pistolet de son père pour l’échanger contre de la drogue.  Ainsi dit, ainsi fait ! Il remit le pistolet à Daouda Coulibaly qui le donna à Moussa Kanté pour l’échange. C’est en partant chez le vendeur de drogue à Bagadadji que Moussa Kanté, qui était transporté par Daouda Coulibaly, vit une moto Djakarta garée avec sa clé. Et Moussa Kanté qui avait le pistolet sur lui tenta de voler cette moto. C’est ainsi que son propriétaire, le gendarme Mahamane Sissoko (qui était cette nuit avec une certaine Aïssata Traoré) cria au voleur. Et Moussa Kanté n’hésita pas à tirer sur lui pour le tuer. Ayant entendu le coup de feu, Daouda Coulibaly prit la fuite en laissant Moussa Kanté sur place. Et ce dernier s’empara de la moto pour aller la céder à 50 000 Fcfa au vendeur de drogue qui reprit 5 000 Fcfa comme ristourne. Une fois l’argent en poche, Moussa Kanté revint au grin pour donner 5 000 Fcfa à Daouda et 10 000 Fcfa à Aboubacar Sangaré, tout en retournant le pistolet qui n’a plus été échangé. Et Aboubacar alla donc la remettre à sa place dans l’armoire de son père qui était en voyage en France. C’est après leur forfait que les trois compères furent arrêtés par la Police, le 8 aout 2014, le jour de leur examen.

Moussa Kanté, un accroc à la drogue

Interrogé à la barre, Moussa Kanté (étudiant en Sciences de l’éducation) a directement reconnu les faits à lui reprochés. Mais, a-t-il dit, en tirant sur le gendarme il ne savait pas que le pistolet était chargé. A la question du président de la Cour ” pourquoi a-t-il adopté ce comportement ? “, Moussa Kanté répondra qu’il ne sait pas. Mais, il révélera que c’est la fréquentation de Daouda Coulibaly, son camarade de classe, qui l’a amené à prendre de la drogue. Au départ, ils prenaient du chanvre. Et comme cette drogue ne leur suffisait plus, ils fumaient le ” Off “ qui serait un mélange du Chanvre indien ” Joint “ et d’une autre drogue forte. C’est ainsi qu’il devient accroc à la drogue. Ce qui, à ses dires, lui a causé beaucoup de torts. Et il ne pouvait plus se passer de la drogue. ” Plus j’en prenais, plus j’avais envie d’en prendre”, a-t-il confié, avant d’ajouter que s’il n’est pas drogué, il ne peut pas faire de mal à une mouche.

A la question du Ministère public : “Pourquoi a-t-il osé tirer sur le gendarme ?”, Moussa Kanté dira qu’il ne sait pas. ” Au lieu de revendre la moto du gendarme, pourquoi n’a-t-il pas échangé le pistolet contre la drogue ? “, Moussa Kanté ne répondra pas à cette question. Aux enquêtes, Moussa Kanté avait soutenu que le gendarme a été le premier à sortir son arme et c’est ce qui l’a amené à tirer. “Mais comment se fait-il que tu arrives à tirer le premier sans que le gendarme qui est un porteur d’uniforme ne puisse réagir”. Coincé, Moussa Kanté resta silencieux. Mais il jura qu’il ne touchera plus à la drogue. Et le Ministère public de laisser entendre que cette affaire contient des zones d’ombre et qu’elle a été mal ficelée parce qu’il ne comprend pas l’absence à la barre de la nommée Aïssata Traoré qui a été témoin de la scène. ” Il faut que cette affaire soit tirée au clair “, a-t-il prôné.

A la barre, Daouda Coulibaly (accusé de complicité d’homicide) est revenu sur la version de Moussa Kanté. Mais, il ajoutera que Moussa Kanté ne lui avait pas dit qu’il avait volé la moto du gendarme. En lui remettant les 5 000 Fcfa, il lui aurait dit qu’il n’a plus échangé le pistolet, mais qu’en partant chez le vendeur de drogue, il a rencontré son débiteur qui lui a payé 50 000 Fcfa. ” Pourquoi a-t-il pris le risque de prendre l’arme d’Aboubacar Sangaré ? “, il dira que c’était pour l’échanger contre la drogue.

Accusé de vol et de détention d’arme, de complicité de vol à main armée et d’homicide, Aboubacar Sangaré (fils d’un ancien député, opérateur économique de son état), reconnaîtra avoir volé le pistolet de son père pour l’échanger contre de la drogue. Il déclarera qu’il n’était pas présent lors du forfait de Moussa Kanté. Il révélera à la Cour qu’il a toujours volé de l’argent à son père pour acheter de la drogue, mais que c’est la première fois qu’il échangeait quelque chose contre de la drogue.

Tout en demandant à la Cour de faire comprendre aux accusés qu’il y a la Justice pour rassurer la société, le Ministère public demandera à la Cour, dans son réquisitoire, de déclarer les accusés coupables des faits qui leur sont reprochés.

Les arguments des avocats défenseurs

Avocat de Moussa Kanté, Me Haïdara demandera la clémence de la Cour. “En les libérant, le regorgement de la prison peut être résolu. Et il y a des facteurs qui militent en leur faveur. C’est le fait qu’ils sont étudiants. S’ils doivent retourner en prison, leur réinsertion posera problème. Nous déplorons le fait qu’il y ait eu mort d’homme. Nous plaidons coupables. Nous demandons la clémence de la Cour”, a argumenté Me Abdoulaye Haïdara.

Avocat de Daouda Coulibaly, Me Diarra demandera à la Cour de juger avec leur intime conviction. A ses dires, le dossier des accusés est mal ficelé à cause des policiers qui ont failli durant les enquêtes.  “Si les accusés sont retenus dans le lien, que cela soit conformément à la loi. L’accusation d’association n’est pas constituée. Il n’y a pas eu d’entente pour tuer le gendarme. S’il y a entente, c’est autour de la consommation de drogue. Donc, il faut écarter l’accusation d’homicide “, a-t-il argumenté, avant de reconnaître que la possession illégale d’arme est établie. ” Il n’y a pas de pièce dans le dossier attestant de l’intention de donner la mort. Nous souhaitons écarter l’intention d’homicide volontaire. C’est une violence non intentionnelle qui a entraîné la mort du gendarme. En apportant l’arme à Moussa Kanté, Daouda Coulibaly est complice passif dans l’infraction involontaire. La Cour doit tenir compte de l’inexistence des constances positives car il y a un doute. Et s’il y a doute, ce doute doit bénéficier aux accusés”, a-t-il dit, avant de solliciter de la Cour son attention et sa compréhension en faveur de Daouda Coulibaly.

Avocat d’Aboubacar Sangaré, Me Demba Traoré a qualifié cette affaire de malheureuse et qu’il apporte son concours à l’Administration de la justice pour corriger des errements. Tout en se disant d’accord avec le Ministère public sur le traitement des dossiers des accusés qui contient des zones d’ombre. Il dénonce le fait que la procédure a été conduite sans les avocats. A ses dires, il n’y a pas eu d’expertise ni de rapport pour la manifestation de la vérité. Comme argument, il avancera le fait que les deux accusés n’ont jamais dit qu’Aboubacar a donné l’arme pour commettre le forfait. ” Donc, Aboubacar ne peut pas être accusé de complicité de vol qualifié. Il n’y a pas d’élément qui l’incrimine “, a-t-il indiqué, avant d’indiquer que le père de son client est en traitement en France. Selon Me Demba Traoré, le père d’Aboubacar, en apprenant que son fils prenait de la drogue, a piqué une crise de tension. Car Aboubacar, aux dires de son avocat, est un enfant exemplaire, qui étudie bien. Et les gens se demandent pourquoi a-t-il pu virer dans la drogue. “La drogue est devenue aujourd’hui un phénomène de société qui n’est pas tombé du ciel. Quand on veut appliquer le droit, on ne peut rien reprocher à Aboubacar Sangaré. On ne juge pas avec infraction, on juge avec raison. Divisons la poire en deux. Nous plaidons pour le port illégal d’arme. Nous demandons la clémence de la Cour. Aboubacar Sangaré a regretté son acte. Car, étudiant à Sup Management, il ne va plus à l’école depuis trois ans et il fait même prier ses codétenus en prison “, a-t-il développé.

10 ans de prison pour Moussa Kanté et Daouda Coulibaly, Aboubacar libéré

Sur la personnalité des accusés, le président de la Cour dira que le certificat d’expertise mentale fait ressortir qu’ils n’ont aucune maladie mentale ou anomalie physique jouant sur leurs responsabilités. Et les renseignements généraux leur sont favorables. Il n’y a aucune condamnation antérieure. Et que la Cour tiendra compte de ces renseignements. Ce qui donna espoir aux avocats. Comme derniers mots, les accusés ont demandé le pardon et la clémence de la Cour.Après sa délibération, la Cour a condamné Moussa Kanté et Daouda Coulibaly à 10 ans de prison et Aboubacar Sangaré à 3 ans de prison. Comme Aboubacar avait passé trois ans en prison, il sera libéré. Les accusés avaient trois jours pour se pourvoir en cassation. Ainsi se termine ce procès fleuve.

                 Siaka Doumbia

Aujourd’hui-Mali

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