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Contribution : Les voleurs de dignité

Le pouvoir périra par là où il a, depuis si longtemps, gravement péché: la corruption étatique, la fraude électorale, l’hypocrisie diplomatique, la mise en soins intensifs répressifs de toutes oppositions, la tyrannie constitutionnelle, la précarité économique et la fracture sociale. Peut-être que l’un de ces IBK-péchés émergera avant les autres et entraînera une nouvelle violente colère et possible révolte populaire ? Peut-être y aura-t-il convergence de deux ou trois en un temps circonstanciel ? Ce régime autocratique et illégitime (Moussa Traoré, républicain) est trop rongé par le cancer de la dictature des scandales et de la forfaiture gouvernementale pour ne pas agoniser à terme et mourir dans l’indignité.

La cascade des révélations sordides, permanentes, coupables et perverses que le peuple a vraiment découverte lors de cette élection présidentielle, non seulement fait trembler et vaciller sur ses bases un régime massivement rejeté, mais a profondément meurtri toutes les générations maliennes… pour la plupart en survie.

Les exhortations tactiques d’un président perclus de contradictions et de compromissions pour appeler à la concorde nationale, à la fraternité civique et à la transparence démocratique, après tant d’atrocités financières, de manipulations outrancières et de dévoiements de gouvernance, ces exhortations ne sont qu’une supplique, teintée de roublardise et de fausse repentance, pour voler au secours de son mandat en péril.

Ibrahim Boubacar Kéita (IBK) n’a pas changé, ni de mentalité, ni de morale. Il ne s’est même pas réformé en esprit et encore moins en vision tant son clan familial et courtisan contrôle ses faits et gestes et articule, par d’habiles déclarations et de subtiles manifestations à sa gloire, les principaux points logistiques de sa présence institutionnelle dans son palais doré. Et de son exposition médiatique à l’étranger… où il dépense sans compter l’argent public et compense le discrédit énorme intérieur qui marque sa chaotique gouvernance.

IBK a abandonné, dès le premier jour du premier mois de son premier mandat, son peuple. À la dramatique réalité du pays, il a privilégié celle virtuelle, si magique à ses yeux, des privilèges attachés à son titre, ou qu’il estimait tels: tapis rouge et griots, excellence étoilée et luxueuse des palaces, courtoises flatteries et modestes honneurs, potentialité d’investissements familiaux hors Mali, et accessoirement tentatives, le plus souvent vaines, de convaincre d’en réaliser en son pays.

Toujours avec cet irrépressible penchant pour le secret des affaires et la défense de son proche entourage. Oui, IBK a sacrifié l’intérêt supérieur de son peuple pour son confort personnel dans les hôtels internationaux.

La communauté internationale, tout en blâmant dans les coulisses le président malien pour son appétence au luxe, son indolence dirigeante, sa connivence mafieuse, sa déficience au travail et son absence récurrente de son pays, a non seulement cultivé un insupportable silence à son endroit au sein des institutions partenaires, mais, avec une duplicité digne de ses petits arrangements colonialistes d’antan, a protégé un coupable de tricheries, de vols et d’infamies en cautionnant et orchestrant sa réélection. Au mépris du vote d’un peuple souverain.

L’accablant plus encore dans sa dignité et l’humiliant ouvertement dans sa citoyenneté. Brisant son espoir de changement et paralysant son avenir. Au nom de quoi ? D’intérêts cachés et peu nobles à avouer, de desseins diplomatiques complexes pour préserver son pré carré, de calculs sournois pour étouffer certaines alliances contre-nature ?

La communauté internationale, donc les contribuables occidentaux, a sans doute aussi financé, peut-être à son insu logistique mais de son plein gré partisan, la fraude éhontée et intolérable qui a été opérée sous ses yeux. Leurs observateurs constatent ce que l’on leur permet de vérifier, dans moins de 2% des bureaux de vote, parfaitement identifiés par les autorités pour maîtriser les irrégularités.

Ils ont bonne conscience alors sur la qualité de leur mission accomplie, déclarant sans l’ombre d’un doute que l’élection est crédible et transparente. «Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil»: un refrain universel très en vogue en Afrique qui engendre systématiquement des communiqués de félicitations des éminences des pays frères, amis ou… complices en arnaque électorale.

Parfois même avant la proclamation officielle des résultats par les cours constitutionnelles… le plus souvent les obligées du pouvoir. Elle s’étonne ensuite que des résistances se créent et manifestent. «Ah le peuple, pourquoi ne respecte-t-il pas un semblant de décence ?», chuchote-t-elle dans ses salons feutrés.

«Tout faire alors afin que ce peuple contestataire ne bouleverse pas l’ordre des choses qui arrangent le monde que nous voulons pour lui… surtout pour nous !». Le fossé se creuse donc de plus en plus profond entre les élites et les peuples. Des peuples en mouvement cependant. Qui refusent qu’on leur impose des comportements grégaires.

Le Mali ne veut pas d’un gourou international institutionnel. Il veut sa liberté de penser, d’agir et de choisir son destin. N’en déplaise à tous les tartuffes de la planète.

IBK qui se targue de ses connaissances littéraires et abuse, en plus de ses «Inch Allah» chaque dix (10) mots, de locutions latines pour épater sa cour et appâter son auditoire, connaît bien le personnage de Tartuffe. C’est le rôle qu’il interprète à merveille, depuis si longtemps. Depuis trop longtemps, pense majoritairement son peuple.

Il est venu le temps pour lui de faire définitivement ses adieux s’il ne veut pas demain être en plus de Tartuffe, Guignol, célèbre marionnette manipulée de main de maître par des hommes de l’ombre. Qui n’ont qu’un seul programme pour les cinq années à venir: «Voler plus encore la dignité du peuple et le pays».

Adeptes de ce proverbe toujours d’actualité de Joseph Michel Antoine Servan (1807): «Telles sont aujourd’hui nos mœurs, qu’une grande fortune sans dignité est préférée à une grande dignité sans fortune, et qu’une grande dignité sans mérite est plus estimée qu’un grand mérite sans dignité». Il n’est plus certain que le peuple du Mali veuille subir désormais ce spectacle !

Ousmane Mohamed

Inter De Bamako

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