C’est parti depuis hier, pour trois jours de concertations nationales, au Centre international de conférence de Bamako (CICB) avec pour mandat d’amender la feuille de route et les grands axes de la transition élaborés par un groupe d’experts. Ce faisant, 5 groupes de travail ont été mis en place pour travailler sur les mêmes documents.
Le président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), Assimi GOITA, a ouvert, ce 10 septembre 2020, au CICB les travaux des concertations nationales pour baliser la transition. Des représentations diplomatiques accréditées au Mali ont assisté à l’ouverture de ces rencontres.
Un rendez-vous historique
Pendant trois jours, quelques 500 participants venus de Bamako, de l’intérieur du pays et de la diaspora prennent part à ces assises très attendues pour déterminer la gestion de l’après-Ibrahim Boubacar KEITA renversé par le coup d’État. Ils sont issus de la société civile et membres de partis politiques.
Outre ces participants, des personnalités politiques, administratives et coutumières ont également été témoins de cet événement majeur pour le pays. Au nombre desquelles, l’Imam Mahmoud DICKO, Modibo SIDIBE, Bamoussa TOURE, Bokary TRETA…
Souhaitant la bienvenue, le maire de la commune III du District, Mme DJIRE Mariam DIALLO, s’est réjoui de l’initiative de ces assises nationales pour réfléchir sur une sortie définitive de la crise qui mine le pays depuis des années.
« C’est un rendez-vous historique pour le pays et on n’a pas droit à l’erreur. Aussi, ces rencontres constituent-elles une opportunité de faire l’autocritique », a indiqué l’élu communal. Pour elle, la feuille de route en gestation doit être bréviaire pour tous les acteurs. Cette feuille de route doit permettre également au redémarrage de l’appareil étatique.
À suite, l’homme fort du Conseil national pour le salut peuple a, à l’entame de ses propos, rendu hommage aux victimes civiles et militaires du pays.
« La concertation nationale à laquelle vous êtes conviés aujourd’hui est l’expression des aspirations légitimes de notre Peuple pour une meilleure refondation de la Nation. Cette refondation se justifie par la recherche d’une bonne gouvernance afin que les préoccupations des citoyens soient au centre de la politique publique », a indiqué le président du CNSP.
Ainsi, selon lui, la présente concertation est donc l’occasion pour les forces vives de la Nation de discuter les préoccupations du moment et de l’avenir d’une manière générale. Sans complaisance, il s’agit de diagnostiquer sans complaisance, les maux qui minent le système démocratique du pays afin d’adopter les mesures urgentes et nécessaires.
Nouveau départ
« Je ne doute point l’esprit patriotique de tout un chacun afin que nous puissions adopter les bases des reformes politiques et institutionnelles nécessaires à la refondation de notre nation », a-t-il exhorté avant d’ajouter que le pays est à un tournant important de son histoire. Ainsi, il appelle à taire les divergences et de saisir l’opportunité de ces assises pour bâtir les jalons d’un Mali refonder sur le travail, l’efficience, la justice sociale, un Mali paisible, créatif et solidaire où il fait bon vivre.
« Nous sommes condamnés à réussir pour les futures générations et nous réussirons par la grâce d’Allah et par les bénédictions de nos anciens », a affirmé le président de la junte militaire.
Ces rencontres s’ouvrent alors que des acteurs sont toujours très divisés sur le profil du président de la transition. Faut-il aller avec un civil ou un militaire ? Sur le sujet, le colonel Assimi GOITA a indiqué, dans son discours, que le CNSP se conformera à la décision du peuple malien.
« Je tiens à renouveler notre volonté de participer à la mise en place d’une architecture de la transition et cela dans le strict respect de la volonté du Peuple Malien », a-t-il laissé l’équivoque.
Les enjeux du rendez-vous
Après l’ouverture des travaux, des participants, malgré leur divergence sur certains aspects de la transition, estiment que le plus important est le nouveau départ pour le pays. L’essentiel, pour eux, est le choix d’un président jouissant de bonne probité morale et intègre.
« Peu importe que la transition soit dirigée par un civil ou par un militaire. Le plus important est la qualité de la personne », a précisé Modibo KADJOKE. Même son de cloche pour le président du Conseil supérieur de la diaspora malienne (CSDM), Chérif Mohamed HAIDARA. Il a invité la CEDEAO à donner le temps aux Maliens pour discuter et convenir du choix de la présidence de la transition.
« Militaire ou civil, on veut une personne qui va apporter du changement dans la gouvernance afin que plus jamais un président ne fasse ce qu’il veut, dans ce pays. Pour que plus jamais, des postes de responsabilité ne soient attribués sans aucun critère de compétence. Pour que plus jamais, nous n’assistons à la nomination d’un député », a déclaré M. HAIDARA.
La refondation de l’État
De son côté, le coordinateur de la CMAS, Issa Kaou DJIM, a indiqué que la transition doit créer les conditions de la refondation de l’État et de donner de l’espoir au peuple. Et il affirme avoir de bonne impression sur le CNSP et sa disponibilité à accompagner la transition.
« Ce qui est important, c’est de réussir la transition sur les réformes et de créer les conditions d’une bonne gestion des biens de l’État. Il faut aller à des réformes pour que plus jamais les élections ne se transforment en des tricheries généralisées », a ajouté le coordinateur de la CMAS. L’autre enjeu de ces assises, a-t-il fait savoir, est de montrer que le peuple malien est fort, que nous avons la volonté de nous mettre ensemble pour réussir l’avenir du Mali et de résoudre les problèmes de l’école, du chômage, de l’insécurité.
« C’est en se mettant ensemble qu’il a l’espoir que le pays trouvera des solutions à ces problèmes », a-t-il soutenu.
Pour la présidence de la transition, il réaffirme la position du Mouvement du 5 juin sur le choix d’un civil.
« Nous devons tenir compte de l’exigence de la communauté internationale qui est une exigence mondiale. Nous sommes convaincus qu’il faut un président civil », a rappelé Issa Kaou DJIM. Cette fois-ci, le M5-RFP dont la CMAS est membre adhère aux propositions de la CEDEAO. Quelques semaines plus tôt, ils étaient allergiques à la CEDEAO. Pour sa défense, les mots ne manquent pas : « Ce n’est pas faire preuve de lâcheté, mais c’est de faire preuve de grandeur et de responsabilité. Un civil est Malien comme un militaire ».
Personne n’a intérêt à mettre le CNSP en difficulté. Personne ne doit leur donner aussi un chèque en blanc. Il faut encadrer la transition pour le bonheur de tous les Maliens sans aucune exclusion.
« Pour nous, ce combat doit être mené avec responsabilité et intelligence. Aider le CNSP, c’est aider le Mali sans aucune démagogie », a expliqué Issa Kaou DJIM.
Les priorités de la transition
L’ouverture de travaux a été marquée par la mise en place de 5 groupes de travail pour les 3 jours. Tous ces groupes vont travailler sur les mêmes documents produits par les experts. Il s’agit des documents sur les grands axes de la transition et la feuille de route. Ces commissions de travail ont été constituées dans la plus grande cacophonie et désordre total.
Le projet de feuille de route, qui doit être amendé, s’articule autour de 5 priorités, à savoir : le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national, le lancement du chantier des réformes politiques et intentionnelles, l’adoption d’un pacte de stabilité sociale, la promotion de la bonne gouvernance et enfin l’organisation des élections générales.
Par Sikou BAH
Source : INFO-MATIN