Depuis quelques jours, la tonne est vendue entre 95.000 et 100.000 Fcfa. Les commerçants et les sociétés de cimentérie se rejettent la responsabilité de cette augmentation qui intervient moins d’un an après celle d’avril 2019.
On s’en souvient, en avril 2019, le prix de la tonne du ciment avait connu une hausse sans précédent, en atteignant 125.000 Fcfa. Quelques semaines après, le prix a baissé et la tonne sera cédée à 90.000 Fcfa. Nos compatriotes n’ont pas encore oublié cette période difficile et personne ne souhaitait revoir le prix du ciment prendre à nouveau l’ascenseur, surtout pas les personnes qui sont en chantier. Malheureusement, depuis quelques semaines, on constate une hausse progressive et inquiétante du prix de ce matériau de construction sur le marché national. Ainsi, la tonne de ciment est passée de 90.000 à 95.000 Fcfa, voire 100.000 Fcfa dans certains magasins. Qu’est ce qui explique cette hausse brutale ?
À la direction générale du commerce, de la consommation et de la concurrence (DGCC) où notre équipe de reportage s’est rendue, on assure ne pas être au courant de cette flambée du prix du ciment. Les responsables que nous avons rencontrés, assurent n’avoir jamais eu écho de cette information. «C’est à travers votre passage dans nos services que nous avons appris la nouvelle», lance un agent de la DGCC, avant d’ajouter que des collègues seront envoyés sur le terrain pour s’enquérir de la situation.
Pourtant, le commerçant Adama dont le magasin se trouve à Kalaban sur la route de l’Aéroport international président Modibo Keïta-Sénou, est très clair. Ce lundi 17 février, il dit avoir reçu une commande de 7 tonnes, mais pas à l’ancien prix. «Depuis quelques jours, le prix du ciment a augmenté et nous vendons la tonne à 100.000 Fcfa. Personnellement, je ne suis pas sur le terrain, mais on nous rapporte que ce sont les transporteurs qui ont augmenté leurs frais», confie le commerçant.
DES COÛTS SUPPLÉMENTAIRES- Malamine Diakité, un autre commerçant qui a son magasin à Hamdallaye, confirme les propos d’Adama, mais pointe du doigt les producteurs de ciment. Selon lui, ce sont ces derniers qui sont à l’origine de la hausse. «Les usines locales ont augmenté le prix. La tonne est cédée à 97.500 Fcfa au départ de nos usines contre 85.500 Fcfa au Sénégal. Ainsi, nous revendons la tonne à 100.000 Fcfa», dit Malamine Diakité, en brandissant sa facture comme preuve. C’est faux, rétorque le directeur commercial et marketing de la Société des ciments d’Afrique (CIMAF). «Nous constatons qu’il y a eu effectivement une augmentation sur le marché. Je suis surpris que les revendeurs parlent d’augmentation au niveau des usines. À CIMAF, il n’y a eu aucune augmentation et selon mes informations, il n’y a pas d’augmentation non plus au niveau des autres cimenteries. La tonne de ciment au départ de l’usine est vendue à 85.500 Fcfa, cela depuis septembre 2019», explique Moussa Diakon.
Notre interlocuteur ajoutera que s’il y a hausse au niveau des commerçants, cela pourrait s’expliquer simplement par la forte demande. Il y a des chantiers un peu partout dans le pays et la demande en ciment a aussi accru au Sénégal. Comme effet, les usines sénégalaises peinent à fournir aux importateurs leurs quotas. «Le Sénégal est en pleine activité de développement, notamment le projet de Diamniadio, une nouvelle ville en construction à quelques kilomètres de la capitale. La demande en ciment y est forte actuellement. D’autres pays comme la Guinée équatoriale sont également approvisionnés par le Sénégal. Le niveau d’approvisionnement vers le Mali a ainsi baissé, ce qui a réduit l’offre au niveau national», détaille Moussa Diakon.
Selon lui, l’augmentation du prix du ciment peut avoir une autre explication, à savoir la durée de l’attente des transporteurs. «Les camions des transporteurs passent plusieurs jours, voire des semaines au niveau des usines avant d’être chargés. Cela engendre forcément des coûts supplémentaires», admet volontiers notre interlocuteur. «S’y ajoute, indique-t-il, le problème du règlement 14, la charge à l’essieu. Cette mesure communautaire vise à mettre fin à l’extrême surcharge des véhicules de transport de marchandises et à préserver nos routes. Ainsi, un camion qui transporte généralement 60 tonnes par voyage, est obligé de réduire cette quantité à moins de 50 tonnes».
À la direction commerciale de Diamond Ciment, on est aussi catégorique : «Nous avons deux unités de production de ciment. Une à Kayes et l’autre à Dio et depuis deux ans, la tonne est vendue à 82.500 Fcfa, sans compter le transport au niveau de Diamond ciment. Nous n’avons rien augmenté», assure la direction de l’usine. Selon les responsables de Diamond ciment, la crise actuelle de ciment au Sénégal a contraint les transporteurs à se tourner vers les usines maliennes et la demande est si forte qu’ils peuvent passer plusieurs jours avant d’avoir le précieux produit de construction. Dans ces conditions, tranche un responsable de cette société, les chauffeurs n’ont d’autre choix que d’augmenter leurs frais.
Pour mémoire, il y a trois usines de ciment au Mali : Diamond Ciment qui compte deux usines de production d’une capacité d’un million de tonnes par an. La CIMAF qui peut produire jusqu’à 500.000 tonnes par an et Ciments et matériaux du Mali (CMM-SA) qui a également une capacité de production de 500.000 tonnes. C’est insuffisant quand on sait que le besoin national en ciment est de l’ordre de 3,5 millions de tonnes par an.
Babba B.
COULIBALY
Source: Journal l’Essor-Mali