Le Fmi et le gouvernement malien se rabibochent et la lettre de confort que donnera l’institution financière sera un grand ouf pour notre Trésor public à la diète et nos services fiscaux et douaniers qui s’arrachent les cheveux pour procurer à l’Etat quelques ressources. La lettre de confort signifie en effet que les réserves majeures sont levées et que l’aide budgétaire peut reprendre.
On sait que des partenaires- dont la France, partenaire stratégique pour nous, s’il en est- attendaient ce signal pour reprendre leur coopération financière, afin de ne pas empirer les problèmes déjà très lancinants de notre pays. Dans ce sens, l’accord entre le Fmi et le gouvernement dont les grandes lignes ont été livrées à la presse hier jeudi sauve les meubles. Tout était à craindre, car la ficelle était grosse et les partenaires de notre pays particulièrement remontés contre les licences d’un pouvoir qui cherchait à s’émanciper un peu trop vite.
CE N’EST PAS UN BLANC-SEING QUE LE FMI DONNE POURTANT, à en juger par les mesures déjà prises par le gouvernement et celles attendues pour la reprise des décaissements par Washington et ce, pas avant décembre prochain. Dans un conseil de ministre extraordinaire, le gouvernement dut relire l’article 8 du code des marchés relatifs au secteur de la défense et de la sécurité. Le nouveau texte restreint considérablement les domaines éligibles au gré à gré et la concession faite avec la rapidité que l’on a vue est présentée comme une mesure d’efficience. C’est-à-dire donc de gouvernance financière à saluer car permettant de faire les investissements les plus judicieux au coût le plus abordable. Mais du coup, l’observateur ne peut pas ne pas se demander pourquoi une telle mesure qui sert l’intérêt exclusif du peuple n’a été prise que sous la pression de nos partenaires. Il ne peut pas non plus ne pas se faire une idée des ressources perdues dans le passé à cause d’un code de passation de marchés qui n’a rien à envier à une auberge espagnole. Encore que l’objectivité commande de relever qu’aucun marché de la taille de celui des soixante dix milliards CFA querellé par nos partenaires n’a été dans le domaine public. Or en l’occurrence, le Fmi porte à peine des gants.
C’EST SUR LA TELEVISION NATIONALE QU’IL DENONCE DES SURFACTURATIONS.
Et c’est sur une radio étrangère que les Maliens apprennent que sur ledit marché, il y a eu une commande surréaliste d’imperméables. « Pour plusieurs armées, précise la dépêche ». Dans les circonstances qui autorisent l’humour, on aurait pu dire que les imperméables sont ceux dont une armée a le plus besoin dans les conditions extrêmement pluvieuses de Kidal. Surtout que les bottes acquises n’auront aucune peine à négocier l’abondante boue de la zone, si elles sont, elles aussi alignées sur le prix publié, à cœur joie, par la presse (22 000 Cfa la paire de chaussette). Mais ce n’est hélas pas le temps de l’humour. Quand c’est le Fmi, champion de l’ultra libéralisme où le concept de surfacturation ne veut pas dire grand-chose qui s’étouffe devant les prix unitaires qu’il découvre, ce ne doit pas faire rire. Quand, c’est le Fmi qui exige que les auteurs des fraudes épinglées soient poursuivis et traduits en justice, alors que c’est le gouvernement en guerre déclarée contre la corruption qui aurait dû le faire plus tôt, ça ne fait pas rire. Quand c’est le Fmi qui exige l’annulation de marchés douteux, quitte à ce que leurs bénéficiaires se retournent légalement contre l’Etat, ça ne fait pas rire. Pour ce qui est de la souveraineté,les enseignements sont clairs : non seulement, elle n’est pas possible avec l’argent des autres mais il est évident qu’en se battant pour une meilleure gouvernance de nos ressources, le devoir de compassion pour le peuple de nos campagnes et de nos villes sera d’abord venu des gendarmes du capital, comme on aime à qualifier les Institutions de Bretton Woods. Paradoxal et comique. Sauf que le temps n’est plus à l’humour.
Adam Thiam