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Camp de Kati : Le grand ménage

Depuis mercredi soir, une opération baptisée « Sanya » a pris le contrôle de la garnison de Kati pour mettre fin à la pagaille : une trentaine de militaires mutins sont mis aux arrêts.

Camp kati operation sanya

Finis les coups de sang, les coups de feu intempestifs, les check-points à l’utilité contestable, les équipées sauvages du genre de celle de lundi dernier qui perturbaient la vie des habitants de la ville garnison de Kati. Une opération spéciale, du nom de code « Sanya » (propreté), menée par plusieurs dizaines de véhicules lourdement armés, embarquant de soldats aguerris venus du Nord, ont investi la cité pour y remettre de l’ordre. Et restaurer une discipline qui avait bel et bien déserté du camp Soundiata Keita depuis le coup d’Etat militaire du 22 mars.

 

 

Les multiples barrages établis tout au long de la route principale qui traverse la petite agglomération et ceux qui entourent les bureaux et logements des auteurs du coup d’Etat n’existent plus. Tout a été nettoyé. Des militaires cagoulés, dressés sur des Toyota pick-up surmontés de mitrailleuses à double canon ont pris possession des lieux. Le camp et ses alentours sont sécurisés depuis mercredi soir.

 

 

Selon la hiérarchie militaire, cette opération était prévue de longue date. Mais il est certain que la mutinerie de soldats mécontents, réclamant fortune et grades, a dû précipiter les choses. Leurs agissements – tirer en l’air et semer la pagaille, blesser par balles et séquestrer un officier, « taxer » le bureau des douanes de la ville –  ont été « la gifle » de trop. Ils l’ont réalisé un peu tard pour eux. Un de leurs mentors présumés, le capitane Amadou Konaré, le numéro 2 de l’ex-CNRDRE, s’est refugié au ministère de la défense, mais le général Amadou Aya Sanogo, qui a perdu son emprise sur ses anciens compagnons, est resté à Kati.

 

 

Mercredi soir, tandis que le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita enregistrait son adresse à la nation, l’opération « Sanya » avançait sur la ville-garnison. Objectif : imposer l’ordre et la discipline par tous les moyens. Commandée par le lieutenant-colonel Elisée Dao, la mission n’a rencontré aucune résistance. « Depuis qu’ils ont appris qu’on arrive, ils nous ont envoyé un message pour dire qu’ils veulent se rendre », explique le commandant des troupes devant une grande cour où l’on peut lire : « Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat ».

 

 

Pour l’officier, l’opération est une réussite totale dans la mesure où personne n’a été tué ou blessé. Sur la durée de l’opération, il n’a pas donné de précision se limitant simplement à dire qu’elle se poursuivra tant que besoin sera. Le lieutenant-colonel Elisée Dao a lancé un appel à la population pour la rassurer et lui confirmer que l’armée assure désormais sa sécurité et qu’aucun coup de feu ne viendra perturber son sommeil. L’officier a invité les mutins encore en cavale, à un retour pacifique au camp pour répondre de leurs actes devant les autorités militaires. Il a enfin indiqué que si certaines armés sont récupérées, d’autres peuvent être cachées ça et là : il faut donc les trouver.

 

 

Dans les rues de Kati, la présence de l’opération « Sanya» ne gêne personne. La circulation est fluide, pas de contrôle systématique ou de fouilles intempestives. Le commandant de la zone militaire de Kati, le colonel Soumaila Prosper Traoré, semble lui aussi satisfait de ce nettoyage. Lui, qui depuis pas mal de temps ne contrôlait pas totalement la zone de défense dont il est le chef militaire. « On est arrivé à récupérer l’armement et à faire venir les mutins à la raison : c’est à ma grande satisfaction », confie-t-il avant d’expliquer aux autres militaires que l’uniforme fait du militaire un esclave de la population. C’est donc cette culture, qu’il promet de d’inculquer à ses hommes pour imposer la discipline et l’ordre normal des choses.

 

 

INSTAURER UN ORDRE NOUVEAU. Le colonel Soumaila Prosper Traoré reconnaît cependant avoir été « contrarié quelque part » durant un certain temps. « Ce que j’ai à faire, je le ferais parce que le soldat me respecte », a-t-il lancé avant de se retirer dans ses bureaux. C’est exactement la recommandation que lui a faite le chef d’Etat major général des armées qui est venu au camp Soundiata pour vérifier le déroulement de l’opération. « Je suis venu pour constater l’effectivité des dispositions prises. Il faut continuer à travailler pour mettre fin à la mutinerie », a indiqué le général Dahirou Dembélé accompagné de son staff dans la caserne de Kati.  Il a confirmé que la trentaine de mutins qui a perturbé la quiétude des populations, a majoritairement déposé les armes avant de se rendre. Mais certains courent toujours…

 

 

Pour lui, le contrôle du camp Soundiata Keita par le commandement militaire est la preuve que les chefs militaires sont prêts à prendre toutes leurs responsabilités en main comme exigé par le président Ibrahim Boubacar Keita dans son message de mercredi. Pour bien faire le travail, un ordre nouveau sera instauré, promet le général Dahirou Dembélé, avant de demander « aux fugitifs » de revenir au camp en attendant leur traduction en conseil de discipline par les différents chefs d’Etat major.

 

 

Le lieutenant colonel Elisée Dao dirige des opérations sur le terrain en sa qualité de sous chef d’Etat-major général des Armées chargé des opérations militaires. Mais la conception et la coordination sont assurées par le colonel major Oumar Dao. Derrière son bureau, l’officier a planifié toute l’opération : les hommes, les équipements et le dispositif. Pour le stratège, il est du devoir des forces armées et de sécurité d’intervenir partout où le besoin se fait sentir. « Au Nord comme au Sud » ajoute-t-il rappelant le principe sacrosaint qui veut que l’armée soit aux ordres du politique.

 

 

« ETIA 43 Dami », peut-on lire sur les véhicules militaires stationnés ça et là à Kati. Comprenez qu’il s’agit là d’une équipe inter-armes bien formée et équipée, une troupe d’élite.  Les « Etia », pour ceux qui les connaissent, agissent plus qu’ils ne bavardent. Leur force réside dans leur diversité : armée de terre, garde nationale, parachutistes … Certains militaires reviennent fraichement du Nord. D’autres étaient en patrouille, il y a peu, dans le secteur de Nara, une très vaste bande de sable très fréquentée par les bandits armés.

 

 

Mercredi, c’est un peu en pensant à eux que le président de la République promettait « l’avènement de la nouvelle République et de la nouvelle armée ». Et c’est en se référant aux indisciplinés, qu’il annoncé avoir « instruit au gouvernement de procéder sans délai à la liquidation des comptes et l’établissement du procès verbal de dissolution du Comité militaire pour la reforme des forces de sécurité et de défense ».

 

 

Ibrahim Boubacar Keita a commandé : « Que la hiérarchie prévale ! Que les chefs militaires s’assument ! Que la chaîne de commandement se fasse obéir ou qu’elle s’avoue impuissante et incompétente, alors ce qui doit être fait le sera, et ce sans délai ». Comme le disent les militaires, le chef l’Etat a été reçu cinq sur cinq.

 

 

A. M. CISSE

 

SOURCE: L’Essor
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