En gardant le silence sur la question de la révision constitutionnelle lors de son dernier discours sur l’état de la Nation prononcé devant le congrès, Joseph Kabila aurait ouvert la voie à tous les soupçons possibles, se convainc le président du groupe parlementaire UDPS et alliés Samy Badibanga.
L’organisation de la présidentielle en 2016 procède d’une gageure. Nombreux sont les opposants qui se montrent de plus en plus sceptiques estimant que le décor est planté pour consacrer le prolongement du mandat du chef de l’État Joseph Kabila. Plusieurs faits démontreraient à suffisance que l’actuelle majorité au pouvoir n’est pas prête à conduire les Congolais à cette échéance électorale nonobstant les assurances faites par le président de la République dans son dernier discours sur l’état de la Nation devant les deux chambres du Parlement. À l’opposition parlementaire où ce discours a été décrypté de fond en comble, on reste convaincu que tout est balisé pour assurer un glissement du calendrier électoral au-delà de 2016. Président du groupe parlementaire UDPS et alliés, le plus grand groupe parlementaire d’opposition à l’Assemblée nationale, Samy Badibanga ne cache plus ses appréhensions.
Devisant dernièrement sur le sujet avec la presse, il a fait savoir que le fait de faire du recensement électoral un des préalables majeurs à l’organisation des élections est un signe qui ne trompe pas. En créant l’Office national d’identification de la population (Onip) en lieu et place du Bureau central du recensement (BCR) qui, au départ, était censé organiser le recensement général de la population et de l’habitat, l’opposant pense qu’il y a là anguille sous roche. L’Onip qui se substitue aujourd’hui au BCR avec les mêmes attributions n’affiche aucun empressement à débuter ses activités et l’objectif qui lui est assigné ne pourra être atteint avant 2016. Foi de l’opposition parlementaire ! Pour cette dernière, en effet, il faudra mettre trois à quatre ans pour accomplir les opérations de dénombrement de la population dans un pays aussi vaste que la RDC dépourvu des moyens de communication.
Entre-temps, la communauté internationale qui continue à faire pression pour que la Céni dote le pays d’un calendrier global des élections devra encore patienter étant entendu que la publication de l’agenda électoral est tributaire des résultats des opérations de l’Onip. Alors que la Céni ne dispose pas encore de toutes les lois d’accompagnement nécessaires pour accomplir sa mission en plus du déficit financier qui entrave son bon fonctionnement, les exigences de la communauté internationale paraissent, aux yeux de l’opposition, comme une étourderie. Pour Samy Badibanga et ses compères de l’opposition parlementaire, le chef de l’État est resté évasif dans son discours sur la question de la révision constitutionnelle pour laquelle il n’a pipé mot. Il n’a pas, d’après lui, fait allusion au respect de la Constitution, une des recommandations phares des concertations nationales dont il s’est fait le défenseur, ni donné de réponse claire et précise quant à ce. Il pense qu’en gardant le silence sur cette matière, « Joseph Kabila a ouvert la voie à tous les soupçons possibles ». D’où la levée des boucliers observée dans les rangs de l’opposition où l’on déclare être disposé à user de toutes les voies légales et démocratiques pour veiller au respect de la Constitution, et surtout dans ses dispositions intangibles qui ne doivent donner lieu à aucune révision.
Apportant de l‘eau au moulin de leur collègue, d’autres opposants sont convaincus que l’embrouillamini actuel procéderait d’une volonté délibérée de déboucher sur un cas de force majeure d’ici 2016 qui consacrerait un vide au sommet de l’État, avec à la clé, le maintien de Joseph Kabila tant qu’un nouveau président de la République ne serait pas élu. L’opposition réitère cependant son appel au dialogue selon l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba estimant que seul un processus concerté pourra tirer le pays du gouffre dans lequel il s’est enfoncé. Elle est prête à saisir la main tendue de Joseph Kabila pour autant qu’elle soit sincère et débouche sur des discussions avec le pouvoir sur le processus électoral. « Il nous faut un processus concerté, en commençant par une loi électorale et un calendrier électoral global adoptés par consensus. L’objectif est d’aboutir à des élections apaisées, démocratiques, libres, transparentes et acceptées par tous », a ajouté Samy Badibanga.
Source: adiac-congo.com