L’homme, pour être indépendant, doit vivre à la sueur de son front. C’est la raison pour laquelle, chacun trouve le moyen lui permettant d’obtenir son pain quotidien. Tel est le cas des ramasseurs d’ordures dont notre équipe est allé à la rencontre ces derniers jours dans certaines zones de stockage de déchets de la ville de Bamako, notamment aux dépotoirs de Wonogounas, de Bagadadji et du côté du stade Omnisport Modibo Keïta.
Le Mali est un pays pauvre, dit-on. Pour que tout le monde puisse avoir son pain quotidien, des gens sont obligés de faire des travaux autrefois considérés comme dégradants afin de subvenir à leurs besoins vitaux.
Au Mali, plus précisément à Bamako, il y a un groupe de personnes qui a consacré le reste de sa vie au ramassage des déchets plastiques pour survivre. Pour certains, c’est dans un souci environnemental visant à rendre plus sain notre cadre de vie en le débarrassant de certains déchets pouvant servir à d’autres utilités. Pour d’autres, c’est plutôt le manque d’emploi qui les pousse à se rendre sur les monticules de déchets avec l’espoir de tomber sur du « diamant ». À ce titre, nous avons tendu notre micro baladeur à Mme Massa Traoré. Pour lui, le ramassage des déchets plastiques lui permet de payer la scolarité de ses enfants. À elle de préciser ensuite : « Je fais ce travail il y a trois ans de cela et c’est à partir de ce travail que je subviens aux besoins de mes enfants. »
D’après nos statistiques, il y a 15 ans maintenant que cette dame exerce ce travail parce qu’elle soutient l’avoir commencé depuis 2012. Dans ces difficultés, certaines ramasseuses n’hésitent à vomir sur les opulents de la nation qui ne seraient, selon elles, animées par un sentiment de solidarité à l’égard des plus démunies de la société. Aux dires de Fatoumata Dembélé, les Maliens ne sont que des orgueilleux, affirme-t-elle, avant d’ajouter : « Lorsque j’ai mis au monde des triplés, j’ai été filmée par les journaux et mon image sortait à la télé. Tout le monde se préoccupait de moi en s’imprégnant de mes besoins. Je leur évoquais mes problèmes. Mais maintenant, personne ne songe à moi. »
En conséquence, elle n’a eu d’autre solution que de ramasser les déchets plastiques et les vendre par kilogramme pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille. « J’ai beau attendre les promesses qui m’ont été faites, mais hélas tant de mal que de bien. Aujourd’hui je me rends au dépotoir des ordures et je ramasse les plastiques que je vends pour nourrir ma famille », explique-t-elle.
Nous nous sommes également rendus au dépôt d’ordures de Kalabancoro, c’est là que nous avons tendu notre microphone à une femme ramasseuse d’objets précieux dans les ordures. Soumba de son nom, elle nous confie : « Je viens ici pour ramasser les sachets plastiques, les anciens fers, les bouteilles, les pneus, afin de les vendre. Je nourris ma famille par cette activité car je n’ai pas d’autres moyens pour faire vivre mes enfants. » Aux dires de cette dame, elle n’est pas la seule à pratiquer ce travail dans le coin et tous ceux qui s’adonnent à cette activité salissante ne le font pas de gaieté de cœur, c’est dû à la pauvreté qui est devenue le quotidien des Maliens. Quelques instants plus tard, on s’est rendu dans un autre lieu de la même commune, dans le but de nous recueillir encore plus d’informations sur cette pratique. Nous avons pu rencontrer sur ce monticule d’immondices des filles, femmes et même des vieux hommes.
Là, nous nous sommes rapprochés de Ramatoulaye, une jeune fille qui nous livre ces confidences : « Je fais ce truc lors des vacances en tant qu’élève car pendant ces temps, on n’a rien à faire. Je le fais aussi volontairement pour pouvoir acheter mes crédits, avoir des jetons pour ne pas aller déranger mes parents. On peut et doit le faire aussi dans le souci de rendre propre notre environnement ».
De son côté, Moulaye, un vieux père, ne connait d’autre activité que celle-ci. « C’est devenu mon métier car j’obtiens tout ce dont j’ai besoin dans ça », laisse-t-il entendre. Le vieux Moulaye ne s’arrête pas là, il continue en nous rappelant cette fameuse déclaration : « Il n’y a pas de sots métiers, il n’y a que des sottes gens.» Cette assertion nous montre que tout travail qui puisse permettre à l’être humain de subvenir à ses besoins vitaux, n’est pas à négliger.
Il convient de faire remarquer que ces travailleurs contribuent énormément à l’assainissement de notre cadre de vie. Un travail qui revient effectivement à tout un chacun, citoyens aussi bien que dirigeants. A ce juste titre, ces fouineurs d’ordures méritent des récompenses pour le service qu’ils rendent à la nation. Dans les quartiers du Mali, nous retrouvons des dépotoirs d’ordures qui ne cessent de se remplir, abandonnés au vent et à la pluie en cette période hivernale. Alors que, de nos jours sous d’autres cieux, les ordures sont devenues une denrée précieuse, notamment de la matière première à partir de laquelle tournent des usines et créent beaucoup d’emplois.
Djènèba Touré et Bakary Fomba, stagiaires
Source: Le Pays