Docteur en géographie politique, sciences politiques et chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le Monde (LAM) de Sciences Po Bordeaux, Boubacar Haidara nous livre son analyse sur la CMAS et Mahmoud Dicko.
Ce virage politique ne s’est pas enclenché seulement avec la création de la CMAS. La CMAS est plutôt l’outil de perpétuation de l’engagement politique de Dicko depuis plusieurs années, lorsqu’il était le Président du Haut conseil islamique. La création de la CMAS répond, selon moi, au besoin pour l’Imam Dicko – qui a bien compris que sa force repose sur sa capacité à mobiliser – de s’adosser à une structure organisationnelle pour poursuivre ses combats, ceux qu’il a toujours menés.
La forte capacité de mobilisation dont il a toujours fait preuve lui suffit à peser sur la scène politique nationale.
L’alliance CMAS – groupements politiques peut-elle la parasiter ?
L’Imam Mahmoud Dicko a fondé sa notoriété sur les différentes luttes politiques qu’il a menées, notamment contre le Code de la famille, entre 2009 et 2011, la résolution de la crise depuis 2012, le refus de l’éducation sexuelle en 2019, etc. On constate donc que ses intérêts ont toujours été politiques. Il les justifie en affirmant qu’en tant que société majoritairement musulmane, les aspirations des Musulmans doivent nécessairement être prises en compte dans l’élaboration des politiques publiques.
Certains voient dans les positions actuelles de la CMAS une manipulation politique pour peser dans le choix des ministres à venir. Le cas échéant, cette proximité de Mahmoud Dicko avec des organisations purement politiques – dans ce cas précis les mouvements FSD et EMK – n’est en rien un fait nouveau pour qui s’intéresse un tant soit peu à l’actualité politique malienne. Les acteurs islamiques n’ont-ils pas contribué à porter au pouvoir le président actuel ? Ne l’a-t-il pas lui-même reconnu dans une apparition télévisée ?
Le communiqué conjoint du 26 mai 2020 du Mouvement Espoir Mali Koura (EMK), du Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) et de la CMAS, ne fait que conforter l’Imam dans sa ligne : continuer à peser dans le paysage politique malien.
Certains trouvent que Kaou Djim va beaucoup trop loin. D’aucuns estiment même qu’il pourrait desservir Dicko…
Issa Kaou N’djim n’annonce pas de réorientation majeure dans la stratégie de Mahmoud Dicko. Simplement, il exprime ses idées en des termes plus véhéments et manque certainement du tact et de la finesse de son mentor.
Propos recueillis par Boubacar Sidiki Haidara
Journal du Mali