e président américain Joe Biden et l’Union européenne mènent le concert de condamnations internationales après un week-end de répression sanglante en Birmanie, la journée de samedi ayant le plus lourd bilan depuis le coup d’Etat il y a deux mois, avec au moins 107 morts dont 7 enfants.
Auteure d’un putsch le 1er février qui a renversé la cheffe du gouvernement civil Aung San Suu Kyi, l’armée birmane a réprimé dans le sang les manifestations quotidiennes réclamant le retour de la démocratie et la libération des anciens leaders, tuant au total plusieurs centaines de civils.
Le nombre de morts est passé à au moins 459, selon l’AAPP, une ONG locale qui recense le nombre des morts depuis le putsch.
Les Nations unies ont estimé le nombre de morts de samedi à 107 personnes – dont sept enfants – mais s’attendent à ce que ce bilan augmente encore. Les médias locaux font état de 114 morts.
“C’est terrible”, a déclaré dimanche Joe Biden à des journalistes. “C’est absolument scandaleux et d’après les informations que j’ai reçues, beaucoup de personnes ont été tuées de manière complètement inutile”.
L’Union européenne, par la voix de son chef de la diplomatie, a de son côté condamné dimanche soir “une escalade de la violence inacceptable”, “une voie insensée” choisie par la junte militaire birmane. Dans un communiqué, le Haut représentant de l’UE Josep Borrell a qualifié cette journée de samedi de “jour d’horreur et de honte”.
Enfants tués
Mais selon la chaîne Myawaddy TV, gérée par l’armée, le bilan de la journée de samedi est de 45 morts et de 552 arrestations. La télévision a justifié la répression en affirmant que les manifestants avaient fait usage d’armes à feu et de bombes contre les forces de sécurité.
Dimanche, malgré le danger, les Birmans sont une nouvelle fois descendus dans les rues de Rangoun et d’autres villes pour réclamer le retour à la démocratie, et de nombreuses funérailles ont eu lieu à travers le pays.
“Une fille a reçu une balle dans la tête et est décédée à l’hôpital, tandis que deux hommes ont été abattus sur place”, a ainsi déclaré à l’AFP un secouriste de la ville de Monywa.
A Hlaing, un quartier de Rangoun, un garçon de 16 ans a perdu la main dans une explosion, en essayant de renvoyer une grenade lancée par les forces de sécurité sur les manifestants, a déclaré un secouriste.
A Mandalay, la famille d’Aye Ko, un père de quatre enfants, tué dans la nuit de samedi à dimanche, lui a rendu hommage lors d’une cérémonie. “Il était le seul à nourrir la famille, le perdre est une grande perte pour nous”, a déclaré un proche à l’AFP.
L’AAPP a recensé 13 morts pour la journée de dimanche.
La Grande-Bretagne conseille à ses ressortissants de partir
La veille, les militants pro-démocratie avaient appelé à des manifestations le jour où l’armée organise tous les ans un gigantesque défilé devant le général Min Aung Hlaing, désormais à la tête de la junte.
Les chefs des forces de défense de 12 pays, dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, le Japon et l’Allemagne, ont condamné dans la nuit de samedi à dimanche l’utilisation de la force par l’armée birmane contre des civils “non armés”.
“Une armée professionnelle suit les normes internationales de conduite et a la responsabilité de protéger le peuple qu’elle sert, non de lui nuire”, indiquent-ils dans un rare communiqué conjoint.
Lundi, le ministère britannique des Affaires étrangères a conseillé à ses ressortissants en Birmanie de partir le plus tôt possible, suite à “une augmentation significative du niveau des violences récentes”.
L’ambassade américaine à Rangoun a quant à elle demandé à ses citoyens dimanche de limiter leurs mouvements, les appelant à la “prudence” s’ils devaient voyager.
L’armée a utilisé des balles réelles dans plus de 40 cantons de neuf régions, y compris à Rangoun, la plus grande ville du pays, selon l’AAPP.
“Les forces de la junte ont tiré à l’arme automatique sur les zones résidentielles, tuant de nombreux civils, dont six enfants entre dix et seize ans”, a déclaré l’ONG. “Le fait que le régime militaire illégitime vise les enfants est un acte d’inhumanité grave”.
Fuite de milliers de Karens
Parallèlement, un groupe de rebelles armés de la minorité ethnique des Karens, l’Union nationale karen, a affirmé avoir été bombardé par des chasseurs de la junte dans l’est samedi, quelques heures après que le groupe rebelle s’est emparé d’une base militaire.
Hsa Moo, de l’ethnie karen et militante des droits de l’homme, a déclaré à l’AFP que trois personnes avaient été tuées et au moins huit blessées.
Il s’agit de la première attaque aérienne dans cet Etat depuis 20 ans. La cible, la cinquième brigade de l’Union nationale karen (KNU), est l’un des plus grands groupes armés du pays et affirme représenter le peuple karen.
De nouvelles frappes aériennes dimanche ont poussé 3.000 personnes de deux villages de l’État de Karen à traverser la frontière thaïlandaise pour se mettre à l’abri, selon Hsa Moo.
Source: lepoint