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Birama Diakon : « Il faut créer un environnement favorable à la lecture et donner aux lecteurs maliens ce qu’ils veulent lire »

« La littérature fait directement appel à l’imagination : lire, c’est une façon de faire fonctionner son imaginaire particulier ». Ce qui peut nous faire comprendre que la lecture à une valeur inestimable. Victor Hugo ne faisait aucun doute là-dessus : « Lire, c’est boire et manger. L’esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas ». C’est dans cette dynamique que notre équipe de reportage a rencontré le directeur national des bibliothèques et de la documentation du Mali Birama Diakon, professeur d’enseignement supérieur et anthropologue.

Le Pays : En tant que directeur national des bibliothèques et de la documentation du Mali, que pouvez-vous nous dire sur l’état de la littérature malienne d’aujourd’hui ?

Birama Diakon : Aujourd’hui, je crois que depuis pratiquement 2012, on sent un bouillonnement littéraire au Mali. À travers les dépôts légaux que nous enregistrons, nous le savons. Il y a également la naissance de jeunes écrivains. Ce qui nous permet d’avoir une idée de la production littéraire au Mali.

Il est généralement admis que les Maliens ne lisent plus, partagez-vous ce constat ?

Effectivement, ça se dit que les Maliens ne lisent pas, mais je ne partage pas tellement ce constat. Il faut créer un environnement favorable à la lecture et donner aux lecteurs maliens ce qu’ils veulent lire.

Certes il y a des bibliothèques, mais souvent elles ont des difficultés de fonctionnement. Il y a également des centres de lecture qui existe. En prenant le taux annuel de fréquentation (car chaque année on fait un bilan des lecteurs) on se rend compte que le nombre est assez faible. Mais je crois que cela vient de l’environnement comme je l’avais si bien dit, il faut organiser beaucoup d’activités autour des livres. Chose qui ne se fait plus depuis quelque temps. Par exemple le salon des livres, les cafés littéraires, les ateliers d’écritures constituent des activités autour du livre qui créent un environnement favorable à la lecture.

Avec la crise que nous avons connue, on fait ces activités-là de moins en moins, mais depuis 2019 il y a quand même eu des efforts pour revenir à un statut antérieur. Déjà vous venez d’assister à la Rentrée littéraire qui est un grand évènement littéraire et qui regroupe les écrivains, les chercheurs de plusieurs pays. Donc, je pense que les Maliens commencent à lire.

Vous avez parlé de la crise qui serait ce qui handicaperait les activités qui font la promotion de la lecture. Est-ce que quelque part, cette crise ne devrait pas au contraire contribuer à renforcer ces activités-là, parce que si on essaie de voir, la littérature ne doit-elle pas contribuer aussi à la gestion de la crise ?  

C’est clair ! C’est ce que j’ai dit, peut être que ça n’a pas été compris. J’ai dit que la crise a été un élément de choc pour la production littéraire, c’est-à-dire que nous avons constaté en 2012 que beaucoup de Maliens se sont mis à écrire. Donc ce fut un choc ; ç’a été en tout cas révélateur des talents des Maliens. Mais il y a aussi la crise financière, parce que les activités sont aussi financées, c’est de l’argent.

Aujourd’hui nous avons des problèmes pour pérenniser des activités autour du livre et des auteurs. Les activités autour du livre c’est quoi ? C’est les cafés littéraires qui est un entretien entre l’auteur est son public. On invite un auteur à la bibliothèque nationale, il dialogue avec les étudiants, les élèves. C’est ça un café littéraire. Il y a aussi les ateliers d’écriture, c’est-à-dire on apprend aux enfants comment écrire un roman, quels sont les techniques pour écrire un roman. Vous avez assisté [lors de cette 12e édition NDLR] à la Rentrée littéraire à un atelier sur comment créer un personnage. Ce sont ces activités-là qu’on appelle des activités autour du livre et c’est ce qui manque. Ce sont ces activités-là aussi qui créent des vocations. Plus on le fait plus on crée un environnement favorable à la littérature et à la lecture. Si ces évènements se perpétuent, les enfants apprendront à faire un roman, à imaginer avec ceux qui ont déjà écrit, comme les grands auteurs maliens, etc.

Donc si nous vous comprenons bien, vous pensez que les lettres aujourd’hui peuvent contribuer à la bonne gestion de la crise ?

Bien sûr ! Comme l’a dit [Ibrahim NDLR] Aya l’autre jour « la crise là, c’est une crise de récits ». La littérature crée les liens ; la littérature informe, forme et peut transformer les gens dans le bon sens.

Vous avez également évoqué la Rentrée littéraire. Nous venons effectivement de boucler une semaine de rencontre littéraire au Mali. Pourriez-vous nous dire les raisons fondamentales de l’institution de cette pratique et pensez-vous que de son institution jusqu’à nos jours qu’elle a porté des fruits ?

Oui je le pense très bien parce que ce n’est pas un évènement du ministère de la Culture en tant que tel. Ce sont des acteurs maliens, de volontaires qui se sont associés et qui ont créé le fond littéraire du Mali. C’est Aya qui est le secrétaire et qui a institué la Rentrée littéraire. La première édition était en 2008 et nous sommes à la 12e édition. Au départ, les objectifs que le fond littéraire du Mali s’est fixés, c’est de rendre visible l’auteur, améliorer la distribution. Tout ce que nous avons discuté, c’est-à-dire travailler à faire connaitre la littérature malienne au Mali d’abord et ensuite à l’extérieur. Je crois qu’ils ont atteint leurs objectifs parce qu’aujourd’hui nous avons une centaine d’écrivains ici et nous avons travaillé ensemble avec les acteurs de l’UEMOA, nous avons pris des contacts et nous sommes en train de voir comment créer une structure. C’est au cours de la Rentrée littéraire que tout ça là a été discuté. C’est vraiment une rencontre utile et qui permet aux acteurs de se rapprocher et d’élaborer des projets communs.

Interview réalisée par

Fousseni Togola & Oumou Cissé, stagiaire

Source: Journal le Pays- Mali

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