Du côté ivoirien aussi bien que malien selon toute vraisemblance, de l’eau a été ajoutée au ‘’gnamakoudji’’-jus de gingembre-pour le diluer, le rendant ainsi moins épicé. A en juger par les discours et actes plus ‘’policés’’ depuis quelques semaines entre Bamako et Abidjan.
Depuis l’arrestation des 49 soldats ivoiriens, la tension était montée de plusieurs crans entre autorités ivoiriennes et maliennes. Mais sont perceptibles, depuis quelques jours, des signaux indicateurs d’une relative accalmie. Grâce d’abord aux bons offices du président togolais, Faure Gnassingbé, ensuite à ceux du président sénégalais, Macky Sall au Mali.
Les autorités de la transition ont fait un premier pas en libérant pour des raisons «humanitaires» le 3 septembre 2022, les 3 dames faisant partie des 49 interpellés le 10 juillet 2022. Ce sont Awa Bakayoko, Blédou Kangah Adèle et Sita Bamba. Ce qui annonce des lendemains meilleurs pour les 46 autres forces spéciales ivoiriennes qui attendent de recouvrer leur liberté. Mais pour ce faire, il y a du chemin à parcourir de la part du pays de Félix Houphouët Boigny, avec notamment dans la méthode en faisant preuve de beaucoup de tact. Abidjan a priori n’y voit pas d’inconvénient. Car même si elles n’ont pas fait d’excuses publiques comme le voudrait Bamako, les autorités ivoiriennes reconnaissent ouvertement des «manquements » dans la procédure.
En tous cas de part et d’autre, les avis convergent à reconnaître que la diplomatie est la voie la mieux indiquée pour tourner la page. En effet, le sujet préoccupe plusieurs hautes personnalités et acteurs politiques ivoiriens qui ont émis leurs avis. Le président du Pdci-Rda, non moins ancien président de la République, Henri Konan Bédié, a souhaité que les autorités ivoiriennes agissent avec «humilité, discrétion et diplomatie» dans cette affaire. Le son de cloche est le même pour cet autre ancien président, Laurent Gbagbo, qui se serait disponible à recourir à ses carnets d’adresse se trouvant dans la capitale malienne.
Les bisbilles pourraient donc connaitre un dénouement heureux avec la carte de la diplomatie sur la table. Toutefois, l’affaire se joue entre deux pays sans oublier que les soldats ivoiriens se trouvent sous autorité judiciaire. Après une première libération pour des raisons « humanitaires », comment espère-t-on s’y prendre pour dénouer une affaire judiciarisée ?
Ce qui pose la question de savoir si la justice malienne aura les coudées franches pour agir – raison d’Etat oblige- les négociations impliquant deux voire plusieurs Etats ? Le principe républicain de la séparation des pouvoirs, notamment de l’exécutif et du judiciaire, sera-t-il sacrifié? Même si, sur le chantier du Mali Koura, la justice malienne a aussi besoin de prouver qu’elle est en train de changer.
Ousmane Tangara JB
Source : Le Challenger