« Le bilan exact nous ne le savons pas, nous ne savons pas non plus pourquoi un village 100% chrétiens, mais le prêtre sur place a compté quatre-vingt quinze (95) corps et a laissé le reste parce qu’il ne tenait pas», voilà ce que l’on peut lire dans un rapport du diocèse de Mopti sur l’attaque du village de Sobane Da, dans le cercle de Bandiagara, région de Mopti.
Dans ce rapport publié le 10 juin 2019 et dont la rédaction de Ziré a pu se procurer une copie, Père Michel Douvon, administrateur diocésain pour le diocèse de Mopti, précise qu’au moment de l’attaque du village de Sobane Da, le maire de Sangha a été joint au téléphone plusieurs fois et a promis l’arrivée des forces de sécurité qui ont été saisies à plusieurs reprises par téléphone, mais aucune suite n’a été donnée à ces sollicitations.
« Et pourtant, il y a une présence militaire de l’armée malienne à Djankabou qui est à 30 kilomètres de Sobanda. Pourquoi ce silence face à l’appel de détresse de la population ? Depuis dimanche 09 juin 2019 vers 18 h où l’attaque a eu lieu et à l’heure où la communauté nous joint au téléphone ce matin, lundi 10 juin 2019, vers 8 h 53, aucune présence de force de sécurité n’a été vue sur le terrain. Vers 9 h 30 quelques personnes de la santé sont venues prendre des blessés graves au nombre de douze personnes pour l’hôpital de Sangha et susceptibles d’être sauvées et ont laissé les cas appréciés désespérants sur le terrain », peut-on lire dans le rapport.
Selon le même document signé par Père Michel Douvon, vers 09 h 30, après le passage des hommes de santé, l’alerte a été donnée aux villages environnants de venir en aide pour enterrer les morts. « Le village étant 100% chrétiens catholiques, les prêtres de la paroisse sont venus. Ainsi, le prêtre chargé de l’inhumation, lui-même, a compté 95 corps sans vie à 11 h 15 ce lundi 10 juin 2019 et encore aucune présence de force de sécurité sur place. Où allons-nous et où sommes-nous? Les tombes sont creusées, les prêtres sont là sur place, et on demande à la population d’attendre les gendarmes de Bandiagara pour pouvoir procéder à l’inhumation des corps. Des corps criblés de balles ou passés au feu depuis hier 18 h (le 9 juin) jusqu’à 11 h ce matin (le 10 juin), on ne peut pas les enterrer sans l’autorisation des forces de sécurité qui ne sont pas venues à l’appel de détresse de la population. Nous sommes au-delà de l’humain et de l’imaginable ! », précise le rapport.
Le document ajoute également : « A l’instant que nous avons reçu le message de la communauté de Sobanda, nous avons informé le gouverneur de Mopti a travers le colonel chargé de la sécurité du gouverneur qu’il a promis d’informer le gouverneur en personne et le commandant de zone, nous avons aussi informé le chef de la section police MINUSMA. C’est après cela que nous avons informé la CEM ».
« Ce rapport ne dit pas tout. Dans le village de Sobanda rien n’a été épargné. Le bilan exact nous ne le savons pas, nous ne savons pas non plus pourquoi un village 100% chrétiens, mais le prêtre sur place a compté 95 corps et a laissé le reste parce qu’il ne tenait pas. Nous condamnons avec force toute violence et en même temps nous en appelons à l’Etat et aux forces de sécurité de prêter l’oreille aux appels de détresse de sa population », peut-on toujours lire dans le rapport.
Pour rappel, le gouvernement avait fait un premier communiqué annonçant quatre-vingt quinze morts (95), le jour de l’attaque. Ces chiffres ont été revus à la baisse le lendemain, 11 juin 2019. Finalement le bilan officiel du gouvernement s’élève à trente-cinq morts, dont vingt-quatre enfants.
Ousmane BALLO
Source: Ziré-Hebdo