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Amadou Goïta, président du Parti socialiste Yelen Koura : «Nous ne n’accepterons jamais le chantage du Mnla»

Lancé officiellement le 25 mai 2013 par ses leaders qui entendent faire la politique autrement, le Parti socialiste Yelen Koura réaffirme son appartenance  au Front uni pour la démocratie et la République (Fdr). Dans l’interview qui suit, le président de ce nouveau parti, Amadou Goïta, nous retrace le cheminement ayant conduit à la naissance de sa formation politique, ses objectifs et ses ambitions pour un Mali nouveau. Il aborde également la problématique de la présidentielle du 28 juillet prochain et le «cas Kidal» que nous imposent les bandits armés du Mnla. Bonne lecture !

 

Amadou Koita

Amadou Koita

Notre Printemps : Comment avez-vous eu l’idée de créer ce Parti socialiste?

Amadou Goïta : Ce parti a été créé par des jeunes de ce pays qui s’intéressent à la vie de la Nation ; qui se sont retrouvés dans le feu de l’action 2002 pour apporter leur soutien au président Amadou Toumani Touré. Et qui, pendant ces 10 années, ont décidé de se donner la main à travers un projet commun, un projet pour le Mali, un projet pour le développement du Mali, un projet pour le renforcement de la démocratie et de la République, un projet de la citoyenneté. Donc, nous avons décidé de mettre en place le Parti socialiste. Socialiste, pourquoi ? Pour plus de solidarité, pour plus de fraternité et pour plus d’entraide. Dieu seul sait que s’il y a une chose dont notre pays a fort besoin, c’est de ça aujourd’hui. Donc, le parti qui a été lancé le 25 mai dernier, est un nouveau parti, mais qui vient avec ses 32 dents. Surtout pour qui connaît les acteurs qui l’animent et qui ont été les jeunes acteurs de la démocratie pendant ces dernières 10 années, après un bref séjour au Pdes. Ce sont eux qui ont décidé, en camarades de génération venant de divers horizons, de créer ce parti pour apporter leur pierre au renforcement de la démocratie malienne.

 

Justement, vous avez parlez du Pdes et on sait que vous avez joué un rôle important dans ce parti. Et après, vous vous êtes retrouvé au Fdr comme porte-parole, si je ne m’abuse,  puis, vous avez eu à travailler avec Jeamille Bittar. Mais, qu’est-ce qui explique qu’il y a aujourd’hui une rupture pour créer le parti socialiste ?

Oui, vous avez raison, on était dans le Pdes. Mais, nous avons quitté le Pdes pour des questions de fond et pour des questions de principes. Ce qui nous a conduits avec Jeamille Bittar qui était le 1er-vice président d’alors, à nous retrouver en 2012 pour participer à l’élection présidentielle ; en un mot, pour nous soumettre aux suffrages du peuple. Malheureusement, les événements du 22 mars nous ont conduits à une situation difficile ; à une situation où aujourd’hui le peuple malien craint même l’avenir ; à une situation où le peuple malien doute. Et il a fallu le concours de la Communauté internationale pour nous aider à sortir de cette impasse. A l’époque, nous avions demandé au camarade Bittar qui était notre candidat, que compte tenu de la situation difficile dans laquelle le pays se trouve, et étant un jeune mouvement politique qui n’a pas eu la chance de s’implanter à suffisance, avec surtout le coup d’Etat qui a fragilisé même les grandes formations politiques, il fallait qu’on revoie nos ambitions. Et qu’il était préférable, pour la présidentielle, d’y renoncer pour se préparer pour les années à venir. Mais, pour préparer aussi les législatives et les communales, car un parti politique, c’est ça aussi : il faut s’implanter, il faut aller lentement et sûrement. Malheureusement, notre camarade Bittar a cru bon d’aller à cette présidentielle, quels que soient les risques. Nous, nous avons dit que nous avons une carrière politique à construire et à sauvegarder. On s’est alors dit qu’au Pdes, on ne s’est pas beaucoup entendu, de même qu’à l’Umam, mais pourquoi ? Est-ce que c’est nous qui sommes en cause ou ce sont les autres qui ne parviennent pas à nous comprendre ? Est-ce que c’est nous qui avons des principes durs ou quoi ? De toutes les façons, nous nous sommes dit que la politique, ce n’est pas seulement pour se servir, mais pour servir la Nation. Et c’est en servant qu’on peut se servir. A partir de ce constat, nous avons décidé d’aller à notre propre formation politique, constituée essentiellement de jeunes de notre génération (40, 41, 42 ans…). Une formation que nous voulons construire lentement, mais sûrement ! Voilà pourquoi nous avons décidé de ne pas présenter un candidat à la prochaine élection présidentielle. D’ailleurs, nous n’avons pas les moyens de participer à une élection présidentielle, il faut être réaliste et objectif en politique. Il faudrait  que nous nous préparions pour les législatives et les communales. Nous avons un devoir vis-à-vis de la Nation qui est de participer à notre manière à la joute présidentielle à venir, en soutenant un candidat crédible, capable et qui a l’expertise nécessaire, mais issu des rangs du Fdr. Ce sont les critères que nous nous fixés et nous sommes en train de travailler avec nos différentes coordinations des six communes du District de Bamako et de l’intérieur du pays, pour qu’elles statuent et choisissent un candidat que nous allons soutenir pour la présidentielle. Et notre souhait est d’avoir quelques élus jeunes (femmes et hommes) lors des législatives et des communales. Puis, l’avenir nous dira plus.

 

Je reviens sur votre rupture avec l’Umam de Jeamille Bittar. Certaines rumeurs circulaient que votre clash est dû à un problème de sous. Qu’en dites-vous ?

Vous savez, c’est très grave de mettre les sous au centre de la politique. Je ne pense pas que c’est à cause des sous que nous nous sommes retrouvés avec Bittar. D’ailleurs, si c’était le cas, on n’allait pas défier les tenants du pouvoir, à l’époque, pour le suivre. Ce sont des principes qui nous ont amenés et c’est pour un combat commun. A partir du moment où on a constaté qu’on ne pouvait plus aller dans cette aventure présidentielle, nous l’avons averti. On est de la même génération, car il n’y a que 3 ou 4 ans entre nous. Alors, il fallait être objectif et réaliste. Maintenant, histoire de sous ? Je ne sais pas de quels sous il s’agit ? Moi, j’ai l’habitude de dire que les petits hommes parlent de sous, les hommes moyens parlent d’événements et les grands hommes parlent de l’avenir et du devenir de la Nation ! Je ne pense pas qu’il puisse avoir une question de sous entre Bittar et moi. Si c’était une question de sous, ce sont ceux qui ont ces sous qui vont devenir président de la République. Je pense que c’est moi qui étais son Directeur de campagne. Et je lui ai demandé d’être objectif et réaliste, de ne pas se laisser aller à une aventure comme cela. Je lui ai aussi dit : «Mon frère, renonçons ; ce n’est pas abdiquer, mais c’est pour mieux nous préparer». Après, nous aurions appris que lui, il a dépensé des millions. Bon, si c’est des millions qu’il a dépensés, ça n’a pas passé par nous ! Ceux qui nous connaissent dans ce pays, savent que nous ne nous laissons pas manipuler de la sorte. Je pense sincèrement que ce n’est pas l’argent qui fait la politique ; ce sont les idées, les idéaux, les convictions, les projets de société.

 

En créant le parti socialiste, ne dites- vous pas que vous vous êtes lancé dans une arène de loups avec les vieux partis politiques ?

Non, pas du tout. Je crois qu’on ne doit pas parler d’une arène de loups. Je pense plutôt qu’il faut rendre à la politique ses lettres de noblesse. Il ne faut pas que les gens stigmatisent les hommes politiques. Il ne faudra pas que les gens indexent les hommes politiques. Non ! Les hommes politiques ont accepté même  de diluer leur vie privée pour le collectif. Ils se consacrent, jour comme nuit, à écouter les populations du Mali ; à partager leurs peines, leurs joies et leurs souffrances ; à faire en sorte que demain puisse être meilleur qu’aujourd’hui. C’est vrai, il y a eu des dérapages, mais cela ne doit pas enlever à la politique ses lettres de noblesse. Moi, je ne suis pas de ceux qui pensent que le terrain politique est un terrain de loups. Non, c’est le terrain des hommes qui ont des idées et qui veulent les défendre. C’est vrai, dans toute corporation, dans toute structure, il y a des brebis galeuses. Mais, de là, faudrait-il remettre la pratique politique en cause ? Non, les grands hommes ont fait la politique ; les grands hommes sont en train de faire la politique et les grands hommes feront la politique. D’ailleurs, la politique n’est réservée qu’aux grands hommes, qu’à ceux-là qui se battent pour les autres, qui pensent aux autres et apportent leur petite contribution pour améliorer la vie de la Nation. Cela est extrêmement important. Il ne saurait avoir de démocratie sans des hommes politiques crédibles. Il faut donc cesser de stigmatiser les politiciens. Moi, je me dis que nous sommes des jeunes et nous avons à apprendre auprès de nos aînés.

 

Parlons à présent élection. Pensez-vous que la date du 28 juillet prochain retenue pour le 1er tour de la présidentielle pourra être respectée ?

Cette date était déjà inscrite dans la feuille de route du gouvernement de transition. Feuille de route qui a été adoptée par l’Assemblée nationale et qui prévoyait l’organisation de l’élection présidentielle au mois de juillet. Et je pense que le gouvernement est en train de travailler pour que cette échéance soit respectée. Le ministère de l’Administration territoriale, la Ceni et la Dge travaillent pour cela. Faisons donc en sorte que cette date puisse être respectée et que nous ayons des élections transparentes, crédibles et qui ne souffriront pas de contestations post-électorales.

 

Avec les négociations avec le Mnla armé, pensez-vous qu’on pourra avoir des élections à Kidal ?

Bien sûr, sans Kidal, on ne peut pas parler d’élection. Je crois que le préalable de la tenue des élections, c’est la libération de Kidal. Les élections doivent se faire sur toute l’étendue du territoire malien, de Kayes à Anderboukane, de Tessalit à Kidal… Aujourd’hui, nous osons espérer que dans les jours à venir, le problème de Kidal sera résolu. Nous estimons qu’accepter d’aller à des élections sans Kidal, c’est accepter de facto la partition du Mali. Nous n’allons jamais l’accepter. Je pense que la Communauté internationale ne l’accepterait jamais. Car, la couverture juridique, c’est la Communauté internationale, c’est la résolution 2085 des Nations Unies et la résolution 2100. Ces deux résolutions disent qu’il faut aider le Mali à reconquérir son intégrité territoriale et à organiser des élections transparentes, libres et crédibles. Nous, nous croyons que Kidal fait partie du Mali. Avec les négociations qui sont en cours, si le problème peut être résolu, tant mieux ! Mais, nous disons que nous n’accepterons jamais le chantage du Mnla. Nous n’accepterons pas que le Mnla prenne le Mali en otage. Le Mnla ne représente pas les Touaregs. Les vrais Touaregs sont là, ils n’ont pas pris les armes contre le Mali. Ils sont dans l’administration malienne ; ils sont dans le secteur privé ; ils se battent quotidiennement pour le développement de ce pays. Ceux qui ont pris les armes contre le Mali, ceux qui se sont égarés, doivent comprendre que dans un système démocratique, dans un pays où la décentralisation nous offre tous les moyens légaux pour revendiquer quoi que ce soit, on ne devrait pas prendre des armes contre son pays. En tout cas, négociation, oui, mais pas avec ceux-là qui sont accusés de crimes odieux.

 

Quel message avez-vous pour les militants et sympathisants de votre parti, et pour le peuple malien en général ?

Je remercie nos militants et sympathisants pour la mobilisation extraordinaire dont ils ont fait preuve lors du lancement du parti. Je les félicite et les encourage à persévérer autour des idéaux du parti et à être les vecteurs d’implantation de ce parti.

Je lance un vibrant appel à l’ensemble du peuple malien à se donner la main. Les défis auxquels nous sommes confrontés, sont énormes. Et nous sommes un grand peuple ; un peuple qui peut certes rencontrer des difficultés, mais qui a les ressources humaines nécessaires pour les surmonter. Je souhaite des élections transparentes, apaisées et crédibles sur l’ensemble du territoire malien et au terme desquelles, le vainqueur sera félicité par le vaincu. Toute chose qui permettra au Mali de retrouver sa place d’antan dans le concert des grandes Nations de notre planète.

Réalisée par E. BRUNO

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