Agés seulement d’un quart de siècle, le multipartisme intégral et la démocratie dans notre pays souffrent de plusieurs maux dont le nomadisme politique (encore appelé transhumance politique) qui constitue le principal mal. Cette transhumance politique ne cesse de gangrener l’ensemble du système démocratique. Un concept politique qui a pris de l’ampleur sous ATT. Lors de ses deux mandats, la quasi-totalité des formations politiques avaient choisi de s’agglutiner autour de lui pour soi-disant soutenir son programme de gouvernance. A telle enseigne que certains analystes politiques avaient naïvement admis à l’époque qu’au Mali, on était parvenu à inventer, grâce à ce concept qui nie toute contradiction démocratique, une démocratie « consensuelle ». Ce qui n’a pas tardé à être démenti.
Il a simplement fallu l’avènement du malheureux coup d’Etat de mars 2012 pour qu’on se rende compte qu’ATT n’était pas réellement soutenu par l’ensemble de ces formations qui juraient pourtant terre et ciel pour lui. Une triste réalité bien attestée dès les premières heures de sa chute. Certaines d’entre elles, non contentes d’applaudir les nouveaux princes du jour, n’avaient pas hésité à participer à une campagne d’intoxication qui traitait son régime de tous les noms d’oiseau.
Dans notre pays, jusqu’à preuve du contraire, un leader politique a malheureusement encore la possibilité de se balader entre les formations politiques avec son mandat de député ou de conseiller sans que celui-ci ne soit mis en jeu. Ainsi, au mépris et au grand dam de leur électorat, les hommes politiques maliens ont régulièrement pris la mauvaise habitude de prendre leur bâton de transhumance pour aller brouter le « bourgou » de la coalition au pouvoir. Une pratique qui, manifestement, a pour conséquence d’affaiblir, voire anéantir, l’opposition parlementaire de notre jeune démocratie. Pourtant, malgré cette triste réalité, ce phénomène de clientéliste politique, incontestablement très « démocraticide », se porte toujours à merveille et profite au pouvoir en place.
Pour l’intérêt de la démocratie mais aussi et surtout pour le respect de l’électorat malien (qui, de plus en plus, boude les urnes), il est urgent et même très urgent que l’ensemble de la classe politique de notre pays convienne à arrêter cette gangrène afin qu’elle ne finisse par amputer pour de bon l’ensemble de notre système démocratique que le peuple malien a si chèrement arraché au prix du sang. A cet effet, Monsieur le Président IBK, avec le recul de vos trois ans d’exercice du pouvoir, vous devez désormais adhérer au combat contre le nomadisme (ou l’opportunisme) politique. Cela, même si l’on sait que votre règne bénéficie de l’afflux des nomades politiques.
Monsieur le président alors sans tarder, si vous ne voulez pas être complice de la mort programmée de notre démocratie naissante, sifflez la fin de la pratique malhonnête du nomadisme politique ! Aussi illico presto, vous devez garantir le fait démocratique en choisissant, le Chef de Gouvernement dans les rangs du parti majoritaire. Ainsi, de la manière la plus élémentaire, Monsieur le président, vous devrez vous investir à retrouver des voies et moyens nécessaires afin d’empêcher que des formations politiques très opposées idéologiquement sur un programme de gouvernance, comme par exemple le RPM et l’URD, puissent faire liste commune. Comme ce fut hélas le cas lors des Législatives passées ! Cela permettrait, tout au moins, de faire une délimitation nette entre le pouvoir et une vraie opposition parlementaire.
Monsieur le Président de la République, vu l’ampleur de la menace, en bon démocrate, initiez alors une loi qui sauvegardera de façon pérenne le système et le fait démocratiques au Mali ! Ce faisant, vous entrerez dans les annales politiques de votre pays comme étant le Chef d’Etat qui aura empêché que des opportunistes politiques assassinent à jamais notre démocratie naissante.
Par Gaoussou M. Traoré
Source : Le Challenger