Le Tribunal de grande instance de la Commune III du District de Bamako a jugé, hier, l’affaire dit du «tweet» de l’ancien chef de la Cellule de communication et des relations publiques de la présidence de la République. Tiégoum Boubèye Maïga est accusé d’avoir eu un «accès frauduleux dans un système informatique» et d’avoir effectué une «introduction frauduleuse de données dans un système d’information». Des infractions prévues par des dispositions de la loi n°2019-056 du 5 décembre 2019, portant répression de la cybercriminalité.
Tout a commencé le 6 janvier dernier, lorsque le compte Twitter de la présidence de la République a affiché un message critiquant le président américain Donald Trump pour avoir revendiqué l’assassinat du général iranien, Qassem Soleimani. Comme on pouvait s’y attendre, le tweet est rapidement devenu viral sur les réseaux sociaux. Et la présidence de la République n’a pas tardé à réagir par un communiqué expliquant que son compte Twitter a été piraté et que des enquêtes ont été ouvertes pour démasquer les éventuels auteurs.
Tiégoum Boubèye Maïga a lui aussi immédiatement reconnu son erreur par un tweet : «Il se trouve que j’avais oublié de me déconnecter du compte présidentiel après mon départ de Koulouba. Il n’y a ni pirates, ni hackers, mais juste une malencontreuse erreur de manipulation».
Notre confrère a aussi ajouté en guise d’explication : «En voulant tweeter sur la crise américano-iranienne, je me suis retrouvé sur le compte de la présidence, dont je possédais les clés, par erreur. Aucune volonté de nuisance».
Devant le Tribunal hier, la ligne de défense du journaliste a été bâtie sur ces propos avouant son erreur. Selon Me Souleymane Soumountéra, l’un des avocats de la défense, aucun élément du dossier n’a permis de démontrer que Tiégoum Boubèye Maïga a fait une introduction frauduleuse dans le compte Twitter de la présidence. La réalité est qu’il a travaillé à la Cellule de communication de cette institution, a ajouté Me Soumontéra.
À ce titre, insistera-t-il, Tiégoum Boubèye Maïga avait le compte Twitter de la présidence dans son téléphone, en plus de son compte personnel. «Normalement, s’il est démis de ses fonctions, on devait le déconnecter pour lui permettre d’accéder à son compte. J’ai l’impression que c’est ce qui n’a pas été fait», a argumenté l’avocat, qui a ajouté que c’est par inadvertance que son client est passé sur le compte Twitter de la présidence, en voulant tweeter sur son compte personnel.
Me Soumountéra a estimé que c’est une erreur qui est de l’ordre du possible dans le domaine de l’informatique. L’avocat a suggéré que la traçabilité doit démontrer qui a fait quoi. «Devant le Tribunal aujourd’hui, le ministère public et la partie civile n’ont pas apporté d’autres éléments qui puissent emporter la conviction du juge. On est en matière pénale, nous espérons que notre client sera libéré des charges qui sont retenues contre lui», a conclu Me Soumountéra, en réaffirmant sa confiance en la justice.
Pour sa part, Me Mahamane Djitteye, conseil de la partie civile, a indiqué qu’il s’agissait d’expliquer au Tribunal que ce tweet n’émanait pas de la présidence, mais qu’il a été fait par «malveillance» par une autre personne. Et l’avocat a battu en brèche les arguments soutenant qu’il s’agissait d’une erreur.
L’avocat a demandé que Tiégoum Boubèye Maïga soit condamné au paiement du franc symbolique pour le préjudice moral causé à la présidence de la République.
Après les débats à la barre, le Tribunal a mis l’affaire en délibéré. Le verdict est attendu le 11 février prochain.
Bembablin DOUMBIA
Source : L’ESSOR