Malgré les consignes du gouverneur de la région de Kayes, qui a introduit aux préfet et au sous-préfet de de Yélemané et de Tambacara de reprendre le dialogue avec les sages de Kersigané, avant toute décision, le sous-préfet de Tambacara vient de mettre les pieds dans le plat en imposant son interlocuteur dans ce village. M. Abdoulaye KEBE a été ainsi imposé comme chef de village reconnu par les autorités maliennes à Kersignané. Il s’agit pour beaucoup d’une autre provocation qui risque de replonger la localité dans le chao des années précédentes.
Dans une décision en date du 04 juillet dernier, le sous-préfet de Tambacara décide que M. Broulaye KEBE soit le seul chef village officiel de Kersignané. En effet, les opposants au chef du village actuel et à l’ordre établi par la tradition locale ont eu recours au sous-préfet de Tambacara pour imposer leur volonté à la majorité des habitants de Kersignané. Au prix de défier l’ordre de sa hiérarchie qui n’est autre que le gouverneur de Kayes, qui avait prôné le dialogue entre les protagonistes, le sous-préfet a vite fait son choix. Toute chose qui n’est pas conforme aux traditions de la localité. Il a, à cet effet, fait circuler sa décision dans les différentes communes de Yélemané et dans la ville de Kersigané.
Dans ledit document, il est indiqué que les conseillers de Kersigané ont unanimement déclaré que le seul mode de succession à la chefferie reconnue par la tradition est la désignation par ordre du plus âgé parmi les hommes de la famille KEBE, originaire de la ville de Kersigané.
« À cet effet, nous donnons notre avis favorable pour la nomination de M. Abdoulaye KEBE, né vers 1928, fils de feu Djimé KEBE et de Aïssé GASSAMA, cultivateur à Kersigané, comme chef de village de Kersigané », telle est la sentence du préfet.
Mais sa décision fait l’objet de contestation par les sages du village qui crient à la diffamation de la part sous-préfet. Cette attitude du sous-préfet, aux yeux de plusieurs responsables locaux, est jugée comme une ingérence d’un administrateur dans des affaires des communautés.
Le vieux Massiré SIBY, membre du conseil des sages de Kersigané réplique aux allégations du sous-préfet : « Personne ne lui a dit ce qui est écrit dans sa décision. On lui a bien dit que même si le fils est le plus âgé du village, il ne peut pas être le chef si un père plus jeune que lui est vivant. C’est comme cela que ça se passe et une formation politique ne peut changer cette donne », a-t-il dit ! Ce dernier accuse les hommes politiques de s’immiscer dans leur affaire de chefferie, en complicité avec le sous-préfet.
« Depuis des siècles, le processus n’a pas changé. Ces politiciens pensent que notre tradition peut être gérée comme leurs partis politiques. Nous sommes déterminés. Cette décision est nulle pour nous. Personne d’autre que le chef de village légitime ne nous gouvernera. Ils savent très bien notre détermination. Ils passeront sur nos cadavres pour arriver à leur fin », a dit-il clamé !
Pour certains, M. Mohamed AG AKLINI, puisque c’est de lui qu’il s’agit, veut tester la détermination des populations de Kersigané, qui comme à leur habitude se dressent comme un seul homme en rempart contre l’injustice.
« Nous nous demandons quel droit peut-il imposer un chef de village sans l’aval des populations ? Une administration est bien là pour assister les populations et non pour leur tenir tête », nous a confié un habitant du village.
Rappelons que la catastrophe a été évitée de justesse dans le village de Kersigané, dans la commune rurale de Konsinga, cercle de Yélimané, le dimanche 23 juin 2019, grâce à la promptitude du gouverneur de Kayes, selon des sources concordantes sur place.
Des villageois, certainement en complicité avec le sous-préfet de Tambacara, avaient mobilisé de nombreux gendarmes pour introniser ce même Abdoulaye KEBE, comme nouveau chef de village, alors que celui investi par les sages est toujours vivant et jouit de l’ensemble de ses facultés. Il s’agit désormais d’un calvaire sans fin pour les populations de ce village avec cette nouvelle décision du sous-préfet.
PAR CHRISTELLE KONE
Source : Info-Matin