Cette intervention du Colonel Maïga s’inscrit dans un contexte de tensions délicates entre le Mali et l’Algérie, exacerbées depuis décembre 2023 par la convocation et le rappel des ambassadeurs de Bamako et d’Alger. Il a saisi cette plateforme internationale pour affirmer la souveraineté du Mali et réitérer sa volonté de protéger son intégrité face aux ingérences extérieures comme c’est le cas de la voisine, l’Algérie. Dans ses propos, Colonel Maïga a, tout d’abord, salué et reconnu la sagesse du président algérien Abdelmadjid Tebboune. D’après le représentant du président de la transition malienne à cette 79è assemblée générale des nations unies, le 29 août 2024, lors d’une tournée dans le sud algérien, le président Tebboune a déclaré que la Libye, le Niger et le Mali sont des nations fraternelles qu’il soutiendrait et non desservirait. Pour le porte-parole du gouvernement malien, le peuple malien n’a pas été surpris par les propos de Tebboune, qui indiquent, éloquemment son panafricanisme, à l’instar de ses célèbres prédécesseurs, dont feu le Président Abdel Aziz Bouteflika, affectueusement appelé «Abdelkader Mali » suite à son établissement à Gao et l’engagement des autorités maliennes, à travers les actions suivantes : offrir le territoire malien comme base arrière aux Moudjahidines, ouvrant ainsi un front sud ; participer aux affrontements armés contre le colonisateur français, en déployant des combattants maliens aux côtés des Moudjahidines sur le territoire algérien, pour défendre la liberté et la dignité des algériens ; défendre la cause algérienne dans toutes les instances diplomatiques, jusqu’au recouvrement de leur indépendance. Toutefois, le Colonel Maïga dit qu’il est du devoir du Mali d’attirer l’attention du président algérien sur les propos incongrus de deux (02) de ses collaborateurs, allant à contresens de son souhait de promouvoir des relations harmonieuses avec ses voisins, dont le Mali. Il s’agit du ministre des affaires étrangères et de l’ambassadeur de l’Algérie aux nations unies.
Un chef de de la diplomatie, donneur de leçons pour le Mali
Selon le Colonel Maïga, le ministre algérien des affaires étrangères a affirmé le 31 juillet 2024 que « la crise malienne ne pouvait être résolue que par des moyens politiques », soulignant l’importance de l’Accord d’Alger. Le Colonel Maïga a qualifié cette affirmation d’« ingérence sérieuse », rappelant que le Mali avait officiellement mis fin à cet Accord en janvier 2024, estimant qu’il ne servait plus les intérêts maliens. « Le Mali est maître de ses décisions, et personne ne peut revendiquer un amour pour notre pays supérieur à celui de nos propres citoyens », a-t-il déclaré, dénonçant les tentatives d’Algériens visant à maintenir un accord que les Maliens jugent désormais obsolète. A l’endroit de ce ministre, le représentant du chef de l’État à cette tribune des nations unies s’insurge à travers ce qui suit : « Nous constatons une grave ingérence dans les affaires intérieures du Mali. Depuis la fin de l’Accord d’Alger le 25 janvier 2024, le Mali n’exprime qu’un seul vœu le concernant, que son âme repose en paix. Monsieur le ministre des Affaires étrangères, l’accord est bel et bien mort. Vos incantations ne serviront pas à le ressusciter. Pour chaque balle tirée contre nous, nous réagirons par réciprocité, pour chaque mot employé de travers, nous réagirons par réciprocité. Quant aux représentants permanents algériens, en plus d’offrir le gîte et le couvert, certainement avec des succulents plats de tchaktchouka et de chorba à des terroristes et des renégats en débandades, son rôle d’estafette désorientée ne contribue guère à la promotion des relations de bon voisinage ».
Un ambassadeur, diffamateur de l’armée malienne
Le deuxième responsable mis en cause par Colonel Maïga est l’ambassadeur algérien aux Nations Unies, qui, en août 2024, avait insinué qu’une frappe de drone dans le nord du Mali avait causé des pertes civiles, suggérant un manque de contrôle sur ces opérations. Maïga a rejeté ces accusations, les qualifiant de « diffamatoires » et affirmant que les pilotes de drones maliens étaient « hautement qualifiés et respectaient les normes internationales ». Il a précisé que ces frappes ciblaient des groupes terroristes et non des civils, et que les Forces de défense et de sécurité maliennes étaient parfaitement capables de mener ces opérations sans intervention extérieure. A cet ambassadeur indélicat, le Colonel a déclaré : « Aujourd’hui, les groupes terroristes ont été sérieusement affaiblis, les forces de défense et de sécurité sont déployées sur l’ensemble du territoire national. En outre, les actions offensives de nos forces se poursuivent pour démanteler les réseaux terroristes résiduels ».
Cyrille Coulibaly
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Le Colonel Abdoulaye Maïga à la Tribune de l’ONU
« Le Mali ne cédera ni à la pression internationale ni aux tentatives de déstabilisation »
Lors de son intervention remarquée à la tribune des Nations Unies, le ministre de l’Administration territoriale et porte-parole du gouvernement malien, le Colonel Abdoulaye Maïga, a livré un discours puissant sur la situation du Mali. Ce discours, axé sur la souveraineté du pays, la lutte contre le terrorisme et la coopération internationale, a également été marqué par une mise en garde directe ; notamment à l’endroit de l’Algérie.
Le Colonel Maïga n’a pas mâché ses mots en décrivant la souffrance du peuple malien, malmené et abandonné par une communauté internationale qui, selon lui, a échoué à protéger le Mali. « Violenté, humilié, pillé et torpillé », le Mali a longtemps souffert des ingérences extérieures qui, sous couvert d’assistance, ont contribué à sa déstabilisation.
Toutefois, les Assises Nationales de la Refondation, lancées en 2021, ont permis au pays de procéder à un diagnostic exhaustif de la situation et d’adopter des mesures structurelles pour restaurer l’autorité de l’État. Le Colonel Maïga a salué les récents succès des Forces Armées Maliennes (FAMa) qui, par leurs opérations autonomes, ont repris le contrôle des régions stratégiques, notamment Kidal. Il a souligné que ces victoires, fruit d’une stratégie offensive, sont un signal fort envoyé aux groupes terroristes, désormais affaiblis. Cependant, il a aussi dénoncé le soutien de « sponsors étatiques étrangers » à ces groupes criminels, mentionnant explicitement l’Ukraine pour son implication dans des attaques terroristes à Tinzawaten.
Un avertissement à l’égard de l’Algérie
En effet, le discours du ministre malien intervient après les déclarations du ministre algérien des Affaires étrangères et du représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations Unies. Le premier a affirmé le 31 juillet 2024 que la crise malienne nécessitait une solution politique, rejetant l’option militaire. Selon lui, l’accord d’Alger, bien que critiqué au Mali, aurait contribué à préserver la souveraineté du pays. Des propos que le gouvernement malien a qualifiés de “grave ingérence dans ses affaires intérieures“.
Pour les autorités maliennes, l’accord d’Alger est désormais révolu, et la gestion de la crise sécuritaire au Mali relève exclusivement de la souveraineté nationale. Le 26 août 2024, le représentant permanent algérien à l’ONU a, quant à lui, accusé le Mali d’avoir commis une frappe de drone dans le nord du pays, causant la mort de civils. Des accusations que Bamako a fermement rejetées, dénonçant une “campagne de désinformation” visant à discréditer les Forces de Défense et de Sécurité maliennes (FAMa). Le gouvernement malien a rappelé que les opérations de ses forces armées, y compris l’utilisation de drones, respectent les normes internationales et visent exclusivement des cibles terroristes. Tout en soulignant l’engagement historique du Mali aux côtés de l’Algérie durant la guerre de libération, le ministre malien a exprimé son indignation face aux attaques verbales de ces deux diplomates algériens. Il a rappelé que le Mali avait offert son territoire comme base arrière aux Moudjahidines algériens et avait participé activement à la lutte contre le colonisateur français. Cet héritage commun, a-t-il soutenu, devrait encourager une relation de respect mutuel, et non des interventions malveillantes.
Le porte-parole du gouvernement malien a conclu son intervention en adressant une mise en garde claire aux autorités algériennes. « Pour chaque mot employé de travers, nous réagirons par réciprocité, pour chaque balle tirée contre nous, nous réagirons par réciprocité », a-t-il déclaré.
Sur la scène internationale, le Mali a fait le choix de diversifier ses partenaires. Le Colonel Maïga a salué la coopération avec des puissances telles que la Russie, la Chine et la Turquie, tout en réaffirmant l’ouverture du Mali à tous les partenaires sincères, à condition que leurs interventions respectent la souveraineté nationale.
Un complot international dénoncé
« Aux saigneurs de la guerre et du chaos, avec l’aide de Dieu, nous triompherons, encore et toujours, de vos œuvres funestes et diaboliques », a-t-il déclaré.
Le discours du ministre a également été marqué par une dénonciation vigoureuse des tentatives de déstabilisation du Mali orchestrées par des puissances étrangères. Il a évoqué l’hostilité envers la Confédération des États du Sahel (AES), une alliance stratégique formée avec le Burkina Faso et le Niger pour lutter contre le terrorisme. Le Colonel Maïga a rappelé que le Mali avait saisi le Conseil de Sécurité de l’ONU pour dénoncer les actes d’agression de la France, qualifiant ces actes de « terrorisme armé, économique et médiatique ».
En clôturant son discours, le Colonel Abdoulaye Maïga a réaffirmé la détermination du Mali à triompher des forces du chaos. Son message, clair et direct, est celui d’un pays résolument tourné vers la défense de sa souveraineté, en dépit des complots et des ingérences étrangères. « Aux saigneurs de la guerre et du chaos, avec l’aide de Dieu, nous triompherons », a-t-il conclu avec force et insistance, rappelant que le Mali ne cédera ni à la pression internationale ni aux tentatives de déstabilisation.
Adama Coulibaly
Source : Le Nouveau Réveil