Il y a un an s’est déroulé au Mali le massacre de Moura, conséquence du ciblage des populations peules par les mercenaires russes.
Au Mali, le massacre de civils rassemblés à Moura, dans la région de Mopti, s’est déroulé du 27 au 31 mars 2022. Durant cinq jours, environ 300 habitants de cette localité et ses environs ont été exécutés par l’armée malienne et le groupe paramilitaire russe privé Wagner.
Des experts mandatés par l’Onu ont réclamé, le 31 janvier dernier, une enquête “indépendante immédiate” sur les éventuels “crimes de guerre et crimes contre l’humanité” commis lors de ce massacre, soulignant que la plupart des victimes appartenaient à la minorité peule.
Des atrocités, mais peu de témoignages
“Sur le massacre de Moura, ce sont à peu près, de mémoire, 300 personnes qui sont simplement éliminées par les Famas (les Forces armées maliennes, ndlr), avec Wagner”, rappelle Gabriel, du collectif de recherche All Eyes on Wagner. Son identité est connue de la rédaction de la DW mais pour sa protection, il utilise le pseudonyme Gabriel.
“Il y a aussi une série d’autres opérations très violentes réalisées et à chaque fois, les témoignages parlent d’hommes blancs qui ne parlent pas français, d’hommes blancs qui parlent probablement russe. Il faut aussi savoir que les hommes de Wagner, comme ils n’ont pas d’uniformes particuliers, n’hésitent pas à se vêtir d’uniformes des armées avec lesquelles ils travaillent.
Il y a eu des histoires dans différents endroits et à chaque fois ce sont des massacres réalisés avec plein d’atrocités, peu de témoignages, très peu d’informations qui filtrent. Et toutes ces opérations se passent principalement dans le nord du Mali, effectivement contre les communautés peules ou les Touaregs.”
Wagner plus violent que les groupes armés
En juin 2021, un autre groupe d’experts de l’Onu, sur la Centrafrique cette fois, avait transmis au Conseil de sécurité plusieurs rapports mettant en cause les violences du groupe Wagner à l’encontre des populations civiles.
Les experts parlaient alors de “meurtres indiscriminés”. En décembre de la même année, l’International Crisis Group mettait en garde contre les atteintes aux droits humains et le fait que les musulmans et les peuls étaient systématiquement visés par les attaques des mercenaires russes.
Des chiffres plus récents publiés par l’Acled (Armed Conflict Location & Event data Project), une ONG qui compile les données sur les conflits dans le monde, démontrent comment la présence du groupe paramilitaire russe au Mali et en RCA s’est soldé par une conséquence dramatique : “le ciblage accru des civils.”
L’Acled souligne toutefois une différence de méthode entre les deux pays.
Au Mali, le groupe Wagner a surtout opéré aux côtés des Famas, tandis qu’en RCA, il a bénéficié d’une plus large liberté qui lui a permis d’agir le plus souvent seul, surtout à partir de la seconde moitié de 2021.
Carte blanche à Wagner en RCA
“Les actions où des civils sont pris pour cible représentent respectivement 52% et 71% des faits de violence politique commis par le groupe Wagner en RCA et au Mali”, précise l’Acled. Soit largement plus que l’armée ou les groupes rebelles.