Généreux, enluminé de sons chaleureux, rythmés parfois par le son suave des instruments traditionnels mandingues, le reggae de Tiken Jah Fakoly est toujours aussi enchanteur. Dans son 9 e album, Dernier Appel, cet Ivoirien vivant au Mali défend une fois encore de sa belle voix grave, profonde, touchante, ses frères africains.

Pourquoi ce titre Dernier Appel ? Je lance un appel en faveur de tous les peuples d’Afrique car je suis panafricain. Je pense que nous devons faire l’unité de l’Afrique pour représenter une force sur la scène internationale. Sans cela, nous ne pouvons nous faire entendre. L’Europe pèse car elle est unie, de même que les USA, organisés en confédération. Nous devons nous aussi nous unir si nous voulons faire entendre notre voix dans le monde.

Vous défendez une image positive de l’Afrique. Je pense que l’Afrique est le continent de l’avenir. En Occident, tout a été fait. Chez nous, tout reste à faire. Mais il faut du temps. Nous sortons de 400 ans d’esclavage puis de la colonisation. Les indépendances ne sont acquises que depuis 54 ans. Il a fallu plusieurs siècles pour construire l’Europe ou les États-Unis. Le temps fait partie d’un processus normal.

Quels sont les atouts du continent ? Le soleil d’abord ! Voyez comme il manque en Occident. Quand il est là, c’est un événement. Et puis, il y a de la place, des terres pour bâtir et cultiver. Nous avons le cacao, le café, le coton. Quand ce n’est pas l’or, ce sont les diamants. Sans oublier le manganèse, le cuivre, le cobaltæ Bref, nous avons tout pour faire de ce continent un paradis. Les Occidentaux le savent. D’ailleurs maintenant que la situation politique en Côte d’Ivoire est stabilisée, les investisseurs étrangers se battent pour venir s’y établir…

Un mot sur l’épidémie Ebola ? Elle a été maîtrisée au Nigeria. C’est donc aussi possible en Guinée, au Libéria et en Sierra Leone. Il faut sensibiliser les populations. Avec d’autres artistes, nous préparons un titre de façon à inciter les gens à respecter les mesures de protection. Ensuite, il faudra se mobiliser au plan politique. Voici 40 ans que ce virus est apparu. Aucune recherche n’a été engagée pour la mise au point d’un vaccin. Il faut interpeller les dirigeants africains et occidentaux en ce sens.

Dans votre album, un titre s’adresse à la diaspora. Vous êtes contre le départ des Africains de leur pays ? Je ne comprends pas comment nos frères vont se suicider dans l’océan ! On n’a pas à fuir la galère. Il faut la combattre sur place ! Même si c’est dur. Quant à la diaspora, j’aimerais qu’elle envoie autre chose que le seul argent. Elle devrait adresser des conseils, témoigner que l’Eldorado occidental est un mythe. Le mieux serait encore qu’elle rentre au pays pour partager son expérience.

Vous êtes pour l’effacement de la dette des pays africains. Ces dettes ont été contractées par des dirigeants qui ont détourné l’argent à leur profit. L’Occident créancier n’a pas mis en place des contrôles pour les en empêcher. Dans ces conditions, la population n’a pas à payer pour l’imprévoyance de l’Occident et pour la corruption de ses dirigeants.

Que faire contre ces derniers ? Arrêter de se taper dessus, après avoir été divisés par leurs manipulations, et voter ! Je crois en l’école. Quand tous les Africains sauront lire et écrire, ils parviendront par leur vote à faire partir ces dirigeants corrompus.

Grâce à vos concerts, vous avez créé 5 écoles en Afrique. Deux en Côte d’Ivoire, une au Mali, une au Burkina Faso, une au Niger. Mon rêve est d’en créer une dans chaque pays d’Afrique. Donc 54 !

Où, quand ? Boisseuil, espace Crouzy, vendredi 7 novembre, 21 heures. (www.horizonscroisés.fr, box office 05.55.33.28.16 et autres réseaux habituels, Fnac, cultura, tickenet, digitick etc.)

source : lepopulaire.fr