Si l’on s’en tient au contenu des différents rapports, notamment ceux de 2019 et de 2020 de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei), on ne peut s’empêcher d’avoir le sentiment d’une justice à deux vitesses aux dépens de l’ancien ministre des Affaires religieuses et du Culte, Thierno Amadou Oumar Hass Diallo, écroué à la Maison centrale d’arrêt (MCA) de Bamako-Coura depuis le 31 décembre 2021 pour des soupçons d’enrichissement illicite pour un montant de 355 066 061 Fcfa en 7 ans de fonction ministérielle. On devrait même être scandalisé par l’acharnement contre l’ancien ministre quand on sait que des personnalités épinglées, de rang inférieur, et auxquelles l’Oclei reproche chacune un milliard et poussières de Fcfa sont libres comme poissons dans l’eau. Elles continuent en tout cas de vaquer à leurs occupations, à l’abri des rigueurs de la détention préventive.
En d’autres termes, les faits éventuels reprochés à Thierno Amadou Oumar Hass Diallo ne seraient que peccadilles à côté de l’ampleur des dégâts de ses “co-enquêtés”.
Tenez ! Dans le rapport 2019 de l’Oclei, le dossier n°1 concerne un inspecteur de sécurité sociale. Le 26 février 2019, le Conseil de l’Oclei a effectivement ouvert une enquête pour des présomptions d’enrichissement illicite le concernant.
Les biens lui appartenant sont composés de 20 maisons d’habitation, une parcelle non bâtie, 4 véhicules particuliers. La valeur totale des biens acquis ou mis en valeur de 2014 à 2019, estimée par une expertise immobilière indépendante, est de 960 618 000 Fcfa. Le cumul des salaires et accessoires de salaires, primes et indemnités de l’intéressé est un peu plus de 63,3 millions de Fcfa dans la même période. L’écart non justifié s’élève à plus de 906 millions de Fcfa.
Le 18 juin de la même année, l’Office s’est intéressé au cas d’un inspecteur des finances, propriétaire de 22 maisons d’habitation, 46 parcelles non bâties, un bâtiment commercial et 2 parcelles tous vendus, 2 parcelles non identifiées. Cette personne, aux dires de l’Office, a utilisé comme prête-noms des membres de sa famille, dont des enfants mineurs. La valeur totale des biens acquis ou mis en valeur de 2014 à 2019, estimée par expertise immobilière indépendante, est de 1 531 269 081 Fcfa. Le cumul des salaires, primes et indemnités s’élève 29 473 628 FCFA dans la même période. L’écart non justifié s’élève à 1 501 795 453 Fcfa.
L’homme à abattre
Le 27 août 2019, un second inspecteur des finances est “débusqué” par l’Office. Il est retrouvé en possession de 21 maisons d’habitation dont 3 déjà vendues, 47 parcelles non bâties, dont 3 déjà vendues, 10 parcelles non identifiées. Comme son prédécesseur, il a utilisé comme prête-noms des membres de sa famille, dont des enfants mineurs.
La valeur de ses biens, estimée par une expertise immobilière indépendante, est de 1 726 636 050 Fcfa entre 2014 et 2019. Au cours de la même période, les salaires, accessoires de salaires, primes et indemnités par lui perçus s’élèvent à 34,9 millions de Fcfa. L’écart non justifié est de 1 691 713 198 Fcfa.
Dans le rapport 2020, l’Office soupçonne, en même temps que le ministre Diallo, un inspecteur des finances pour un écart à justifier de 706 416 643 Fcfa ; un inspecteur du trésor pour un écart non justifié de 719 659 147 Fcfa, entre autres.
Le hic est qu’aucune de ces personnalités n’est arrêtée. Certes qui a volé un œuf volera un bœuf. Dans ce cas, pourquoi ne pas mettre tout simplement tout le monde dans le même sac si l’objectif de la Transition en cours est réellement le Mali Kura, fondé sur une justice égale pour tous ?
Malheureusement, peut-être que sous la dictée de plus fort qu’eux en son temps les enquêteurs de l’Office n’ont pas jugé nécessaire de faire la part des choses, en décidant sans contradiction que Thierno Diallo est coupable alors qu’une contre-expertise pouvait par exemple leur permettre d’estimer sa maison de Nioro du Sahel à son vrai coût de réalisation, étant donné que le chargement de sable à Nioro est de 10 000 Fcfa contre 80 000 Fcfa, voire plus, dans la capitale. Sans oublier que cette maison a été construite bien avant qu’il soit ministre puisqu’il a servi à l’Ambassade du Mali à Bruxelles pendant plusieurs années. C’est encore là-bas que Thierno Hass a acheté sa première Remorque pour la mettre en location à Bamako. Ce n’est pas tout. Thierno Hass Diallo dispose aussi d’une Ecole de formation professionnelle depuis des années qui lui rapporte aussi de l’argent. C’est dire que Thierno Hass Diallo faisait ses affaires avant d’être dans le gouvernement. Ce qui est sûr, les acteurs du pèlerinage (des gens peuvent ne pas l’aimer dans ce milieu) savent unanimement que Thierno Amadou Oumar Hass Diallo se battait toujours pour le maintien du coût du pèlerinage à un niveau soutenable pour les candidats. Il a crânement refusé les chants de la sirène du profit pour ne tenir compte que de l’instruction du défunt président IBK pour un pèlerinage à la portée du plus grand nombre de fidèles musulmans.
Autrement dit, au ministère des Affaires religieuses et du Culte, il avait bel et bien la possibilité de s’enrichir en catimini, mais s’était gardé de le faire par peur du qu’en-dira-ton. Mais Machiavel, visiblement, est encore trop fort.
“Tous ceux qui connaissent Thierno savaient très bien qu’il n’est jamais dans l’argent. Sinon, il avait la possibilité de gagner de l’argent, mais il n’a jamais voulu se mêler. Durant son séjour au département des Affaires religieuses et du Culte, il s’est battu pour améliorer les conditions du Hadj afin de permettre à nombreux fidèles d’effectuer le 5ème pilier de l’islam à moindre coût. Voilà, pourquoi, le Mali était le seul pays à diminuer chaque année le coût du Hadj”, nous a confié un ancien cadre du département. Avant de préciser : “Thierno a fait bénéficier à l’Etat des centaines de millions de Fcfa par rapport au Hadj. Il a fait diminuer beaucoup de charges que le gouvernement prenait en charge, notamment les frais pour l’encadrement. Pour la petite histoire, le Mali a toujours été cité en exemple par les autorités saoudiennes pour la bonne organisation du Hadj”.
En tout cas, le ministre Thierno Hass Diallo ne mérite pas une telle récompense, après avoir servi avec loyauté son pays. Surtout qu’il gérait le département le plus pauvre du gouvernement avec un budget annuel d’environ 800 millions Fcfa.
La seule certitude aujourd’hui est que tôt ou tard la vérité finira par triompher.
El Hadj A.B. HAIDARA
XX
Incarcération du ministre Thierno Hass Diallo
Les dessous d’une affaire alambiquée!
Délit de compétence ! C’est cette “faute” combattue par les administrations lourdes et sclérosées sous nos tropiques qui vaut certainement à l’ancien ministre des Affaires religieuses et du Culte, Thierno Amadou Hass Diallo, d’être derrière les barreaux depuis le 31 décembre 2021. Alors que le président de la République de l’époque IBK (paix à son âme), son collègue feu Hamadoun Konaté, des diplomates accrédités et des partenaires techniques et financiers ne tarissaient pas d’éloges à son égard et lui prédisaient une meilleure carrière gouvernementale, Thierno Amadou Hass Diallo, brillant intellectuel, qui connaît les religions révélées comme les traits de sa paume, a vu le ciel s’effondrer sur lui avec les conclusions d’une enquête taillée sur mesure. A qui devait profiter le ” crime ” ? Suivez notre regard.
Trois (3) maisons d’habitation, 51 parcelles non bâties (dont 5 au nom de ses enfants), comprenant 47 concessions rurales d’une contenance de 45 ha 51 a 65 ca, dont la valeur immobilière est évaluée par une expertise à plus de 420 millions de Fcfa contre 65 millions Fcfa, résultant du cumul des salaires, accessoires de salaires, primes et autres indemnités, 7 ans durant au poste de ministre de la République, soit un écart non justifié de 355 millions de Fcfa.
Il s’agit là de la quintessence de ce qui est reproché à l’ancien ministre des Affaires religieuses et du Culte, Thierno Hass Diallo, comme source d’enrichissement illicite. C’est la conclusion d’une enquête que l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei) a conduite à son encontre, en août 2019, et qui lui vaut un séjour dans la Maison centrale d’arrêt de Bamako après qu’il a été placé sous mandat de dépôt, le vendredi 31 décembre 2021, par la Cour suprême. En clair, ce n’est pas une affaire de gestion financière de son ministère puisqu’aucun technicien en la matière ne l’accompagne en prison dans ce cadre, à savoir : les ordonnateurs de dépense au moment des faits ayant fait l’objet d’enquêtes des services compétents en la matière comme le Bureau du Vérificateur général ou le Contrôle général des services publics.
Est-ce à dire qu’il faut chercher ailleurs ?
Selon certaines sources, les ennuis du ministre Thierno Hass Diallo ont curieusement commencé en 2019 quand les appréciations les plus élogieuses étaient faites à son sujet jusque dans l’entourage immédiat du président IBK (paix à son âme).
Tenez, selon les mêmes sources, un jour, le ministre Hamadoun Konaté (paix à son âme) avait lâché : “Thierno, tu es le meilleur parmi nous”.
Cette haute appréciation faisait suite à celle d’un diplomate étranger qui louangeait le ministre Thierno Hass Diallo devant le président Ibrahim Boubacar Kéita.
D’autres personnalités nationales ne manquaient pas non plus de vanter ses mérites à son poste, à l’aise avec toutes les confessions religieuses (toutes tendances confondues), comme un poisson dans l’eau bénite, et son éloquence à faire pâlir de jalousie plus d’un dans le cercle rapproché de Koulouba. Toutes ces remarques fondaient-elles le président IBK à avoir des ambitions plus hautes pour lui dans le gouvernement, y compris au poste de Premier ministre ?
Curieusement et subitement, les enquêtes pleuvaient de toutes parts : Bureau du Vérificateur général, Contrôle général des services publics, Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei), etc. Ce, d’autant plus que le budget de son ministère dépassait à peine, au départ, les 800 millions de Fcfa par an à côté des mastodontes ministériels et autres services aux budgets faramineux.
En tout cas, cela a intrigué plus d’un, au Mali et à l’étranger, que ce soit son petit ministère, avec un budget minuscule, qui fasse l’objet d’acharnement des services d’enquête de tous genres, au point de lui valoir aujourd’hui un séjour carcéral, consécutivement à ces enquêtes, de l’indépendance à nos jours.
Allez savoir…
El Hadj A.B. HAIDARA
Source: Aujourd’hui-Mali