Les autorités soudanaises ont ordonné à la Croix-Rouge de suspendre ses activités au Soudan, a annoncé samedi l’organisation à l’AFP, alors que Khartoum cherche à limiter le travail des ONG humanitaires dans le pays.
“Nous avons reçu une lettre officielle de la Commission des affaires humanitaires (un organisme gouvernemental, ndlr) nous informant de la suspension de nos activités à partir d’aujourd’hui, 1er février”, a déclaré le porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Soudan, Rafioullah Qoureshi.
“Nos activités sont suspendues”, a-t-il ajouté.
La Commission des affaires humanitaires (HAC) a évoqué “plusieurs problèmes techniques” liés aux projets que le CICR comptait mener cette année, selon M. Qoureshi.
Le CICR sert souvent d’intermédiaire neutre au Soudan. En 2012 et 2013, il a ainsi facilité le transfert de dizaines de personnes au Darfour, dont des prisonniers de guerre libérés par les autorités soudanaises, des travailleurs étrangers, des membres des forces armées soudanaises et d’autres personnes capturées par des groupes armés.
L’organisation a aussi fourni une assistance à plus de 1,5 million de personnes dans les régions du Soudan déchirées par les violences, que ce soit sous forme de services de santé, d’aide alimentaire, de semences, d’outils ou encore de pompes à eau, a indiqué M. Qoureshi.
Bien que les projets du CICR soient suspendus, ses quelque 700 employés locaux et internationaux vont rester dans les bureaux de l’organisation, alors que des discussions doivent s’ouvrir “dans les jours à venir” avec le ministère des Affaires étrangères, la HAC et d’autres agences gouvernementales, a-t-il dit.
L’objectif est “de reprendre dès que possible nos activités pour venir en aide aux victimes des conflits armés”, a souligné M. Qoureshi.
Le responsable de ce dossier à la HAC, Souleimane Abdel Rahmane, n’était pas joignable dans l’immédiat pour commenter ces informations.
Si les responsables soudanais expriment régulièrement leur volonté de travailler avec les agences humanitaires internationales, Khartoum a restreint l’accès aux Etats du Kordofan-Sud et du Nil Bleu, où des combats opposent des rebelles aux forces soudanaises depuis juin 2011 et où plus d’un million de personnes ont été déplacées ou sévèrement touchées, selon l’ONU. Aucune aide n’a ainsi pu parvenir dans les secteurs tenus par les rebelles dans ces deux Etats depuis 2011.
En 2012, la HAC avait aussi expulsé sept organisations humanitaires internationales de régions pauvres de l’est du Soudan, et Médecins sans frontières (MSF) avait été contraint de suspendre ses activités dans une partie du Darfour-Nord, en raison des restrictions imposées par le gouvernement soudanais.
En 2009, Khartoum avait retiré les autorisations de 13 ONG travaillant au Darfour, après l’émission par la Cour pénale internationale (CPI) d’un mandat d’arrêt pour crimes de guerre contre le président soudanais Omar el-Béchir.
M. Qoureshi a précisé que les activités du CICR avaient déjà été suspendues au Soudan dans les années 1990.
Cette nouvelle suspension intervient alors que le président Béchir a appelé lundi à une “renaissance” politique et économique du Soudan, ravagé par la guerre et la pauvreté.
La moitié des 19 Etats du Soudan sont touchés par des violences et l’ONU évalue à 6,1 millions le nombre de personnes ayant besoin d’aide humanitaire.
© 2014 AFP