Encourager la productivité agricole dans la région du Sahel est crucial pour réduire l’insécurité alimentaire chronique, améliorer la nutrition des familles, promouvoir la croissance économique et aider à renforcer la résilience des populations. Le secteur ne reçoit cependant pas assez de financement de la part des gouvernements comme des bailleurs de fonds internationaux, qui favorisent les solutions à court terme.
En effet, bien qu’il y ait eu un regain d’intérêt à investir dans l’agriculture au cours des cinq dernières années, en partie dû par le besoin d’une plus grande autonomie face à la hausse des prix, le secteur ne fait toujours pas l’objet d’une attention suffisante.
Ainsi, en 2009, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a renouvelé l’engagement, pris lors de la Déclaration de Maputo en 2003, de consacrer au moins 10% des budgets nationaux à l’agriculture. Mais, 10 ans après, seuls 10 des 54 pays de l’Union africaine ont atteint cet objectif.
Et, selon un rapport publié par Oxfam, bien que la croissance des petites exploitations agricoles puisse profiter aux populations pauvres deux fois plus qu’une croissance dans d’autres secteurs, l’aide au développement de l’agriculture dans le monde a diminué de 77% entre 1983 et 2006. Cependant, il y a eu une prise de conscience en 2008, lorsque les prix des denrées alimentaires ont flambé et que les gouvernements des pays de l’Afrique de l’Ouest ont réalisé qu’ils étaient trop dépendants des importations de denrées de base.
Mais dans les pays qui ont atteint l’objectif de 10% du budget consacré à l’agriculture, comme le Burkina Faso ou le Niger, la qualité de l’investissement restait problématique.
Ainsi, selon les sources, lorsqu’on réserve 17% du budget à l’agriculture, mais qu’on ne dépense que 65 à 70% de cette somme en faveur des agriculteurs et que le reste va aux dépenses du ministère, telles que les réunions, les salaires, les 4×4, etc, on n’atteint pas réellement cette barre des 10%.
Au Mali, le nouveau président de la République, SE Ibrahim Boubacar Keïta a dans son programme prévu de rehausser la part du budget de l’Agriculture.
C’est pourquoi, pour assurer la sécurité alimentaire d’une population de plus en plus croissante dans un espace économique ouvert et concurrentiel, IBK prévoit de porter à 15% la part du budget de l’Agriculture dans le budget national. Cela va permettre au nouveau pouvoir de prendre en compte le développement des filières de l’élevage, de la pêche, de l’aquaculture et la diversification des ressources halieutiques pour une préservation des ressources naturelles. Pour les régions du nord, il prévoit de mobiliser 10 milliards de FCFA pour le développement de l’agriculture dans le désert pour soutenir une croissance forte et durable.
Faire profiter les pauvres
Investir dans les petites exploitations est particulièrement important, car non seulement ce type d’agriculture contribue à environ 80% de la production alimentaire du continent (comme c’est le cas au Mali) les petits exploitants sont aussi parmi les plus vulnérables et les principales victimes de l’insécurité alimentaire dans la région.
Dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest, la majorité de la population vit dans les zones rurales, où l’agriculture est la principale source de nourriture et de revenus mais les contraintes liées aux biens de production et à l’accès au crédit et une connaissance limitée des techniques de production améliorées et des techniques commerciales freinent la croissance du secteur.
Au Sahel, la sécheresse chronique empêche également les projets d’accroître la production. Il faut parfois 3 à 4 ans pour se remettre d’une crise comme la sécheresse de 2012, et seulement si ces années sont bonnes.
Soulignons que quand une récolte est mauvaise, les petits agriculteurs vendent les rares animaux qu’ils possèdent, retirent leurs enfants de l’école, s’endettent encore plus, épuisent leurs réserves de nourriture et de semences, s’enfoncent dans l’insécurité alimentaire, et seront d’autant plus vulnérables.
Il y a là, la nécessité de s’orienter vers une agriculture mécanisée, et également permettre aux petits exploitants d’accéder au crédit. Aussi, les petits agriculteurs n’ont souvent pas de tracteurs ou d’autres équipements sur le terrain, et on ne peut pas tout faire avec une houe.
Bien qu’il existe actuellement une variété de programmes de micro financement qui offrent des crédits aux agriculteurs, la plupart sont assortis de taux de prêt à 14 à 30%. Il est donc presque impossible pour les petits agriculteurs de gagner assez d’argent pour rembourser le capital et les intérêts au cours des six mois de la période d’emprunt, tout en réalisant des bénéfices.
Dieudonné Tembely
Source: Le 26 Mars